Le Soudan du Sud espère une aide de la Russie en matière de sécurité, a déclaré à Sputnik Afrique ce 29 septembre le ministre sud-soudanais des Affaires étrangères, James Pitia Morgan, qualifiant de "très réussie" la rencontre du Président Salva Kiir avec Vladimir Poutine à Moscou.
"Je pense que la réunion a été très réussie. Elle était amicale et fraternelle. Et même si c'était la première fois, nous ne sommes pas nouveaux pour le peuple russe et pour les dirigeants russes. Nous avons été engagés dans de nombreux domaines, au niveau multilatéral et cette visite, même si elle était la première dans son genre, nous pouvons la qualifier de visite historique […]. Et je peux estimer que la visite a été vraiment, vraiment formidable", a déclaré le ministre dans une interview exclusive accordée à Sputnik Afrique.
Il a ajouté que le dirigeant de son pays et sa délégation étaient reconnaissants pour "l'accueil chaleureux" qu'ils ont reçu.
"Mon Président, le général Salva Kiir Mayardit, a exprimé hier sa joie pour l'accueil chaleureux qui lui a été réservé, ainsi qu'à sa délégation, par les dirigeants de Son Excellence Poutine et par le peuple russe. Nous leur en sommes très reconnaissants", a-t-il affirmé.
Efforts conjoints pour préserver la paix
Le chef de la diplomatie sud-soudanaise a souligné qu’en tant que nouvelle nation souhaitant "faire partie de la communauté internationale", le Soudan du Sud "appréciait" la volonté de la Russie de l'aider à assurer sa sécurité.
"Le Soudan du Sud est une nouvelle nation. Et en tant que nouvelle nation, nous sommes ouverts aux amis du monde entier qui peuvent nous venir en aide. Chaque fois que nous avons besoin d'aide, nous pouvons demander à un ami. Et nous disons toujours : "Un ami quand vous êtes dans le besoin est vraiment un ami". Et nous apprécions la déclaration de Son Excellence Poutine selon laquelle [la Russie] peut nous aider. Nous avons besoin d'aide. Et c'est pourquoi notre Président a pris cette mesure pour se faire des amis. Nous ne sommes pas une île. Le Soudan du Sud n'est pas une île. Et nous devons vivre avec les membres de la communauté internationale, et nous voulons faire partie de la communauté internationale, et nous voulons faire partie de la paix".
Le ministre a en outre souligné que son État "ne [voulait] pas devenir la proie de ceux qui ne veulent pas de paix" et qu'il était "heureux" d'avoir un "ami pro-paix" comme la Russie, qui est prêt à apporter une aide dans le domaine de la sécurité.
Il est nécessaire de sauvegarder et protéger la paix pour laquelle le peuple du Soudan du Sud s'est battu, afin que les citoyens ne soient pas, à nouveau, "mis dans une situation d'où ils viennent", a souligné le diplomate.
"Nous sommes issus du processus de libération et nous avons achevé ce processus. Le moment est venu pour nous de donner au peuple du Soudan du Sud la paix pour laquelle il se battait. Nous nous battions pour la paix. Nous ne nous battions pas pour rester en état de guerre, et nous avons obtenu la paix. Nous avons donc besoin que cette paix soit protégée. C'est très important. Nous avons besoin que cette paix soit protégée afin que le peuple du Soudan du Sud puisse bénéficier de ses fruits", a-t-il déclaré.
Aider les pays inondés par les réfugiés
Commentant le sujet des réfugiés soudanais arrivant au Soudan du Sud, M.Morgan a dressé un parallèle avec l'Ukraine et la Russie, affirmant que les peuples des deux États africains "partagent la même histoire", et sont "comme des frères et sœurs", quel que soit leur passé. Selon lui, le Soudan du Sud garde "la porte ouverte" aux Soudanais.
À l'appui de sa déclaration, le diplomate a rappelé que le Président Kiir avait contribué à l’époque à résoudre le conflit entre le gouvernement soudanais et le Front révolutionnaire soudanais, qui comprenait plusieurs groupes rebelles ayant provoqué de l'insécurité dans la région du Darfour, dans l'ouest du pays. Les efforts de Salva Kiir Mayardit avaient facilité la signature de l'Accord de paix de Djouba entre les belligérants, dans la capitale du Soudan du Sud.
Cependant, les affrontements armés entre les forces régulières soudanaises et le groupe paramilitaire des Forces de soutien rapide (FSR), qui ont éclaté en avril 2023, "menacent cet accord" et font affluer un nombre "écrasant" de réfugiés au Soudan du Sud.
"Cette situation est donc alarmante, car les zones frontalières, les écoles et les centres médicaux sont devenus des zones de réinstallation […]. La plupart des écoles sont désormais fermées parce que des gens s'y sont installés", a-t-il déploré.
Pour rappel, de violents affrontements entre les forces armées régulières soudanaises et les FSR ont éclaté à la mi-avril. Selon les derniers chiffres de l'Organisation mondiale de la santé (OMS), plus de 1,6 million de personnes ont été déplacées.
L’Onu tarde à réagir, le Sud-Soudan fait appel à Moscou
Pendant les entretiens avec M.Poutine, le Président Kiir a demandé une aide humanitaire pour résoudre le problème des réfugiés, ajoutant que le Soudan du Sud estime que la Russie "le fera".
"Notre Président, lors de ses entretiens avec son frère ici, le Président Poutine, a demandé si la Russie pouvait également venir nous aider sur cette question de la réinstallation des réfugiés et apporter son aide sur le plan humanitaire. Ce sont des besoins temporaires, mais que nous devons résoudre à présent. L'implication de la Russie [peut aider] à trouver des solutions à ce problème. Et nous pensons que la Russie le fera pour nous. La Russie sera en mesure de nous aider à trouver la solution. Ce qui est nécessaire, c'est une paix permanente afin que le Soudan puisse revenir à la normale afin que les personnes qui se trouvent actuellement dans les camps de réfugiés, dans les zones de réfugiés, puissent retourner dans leurs régions d'origine", a résumé le chef de la diplomatie sud-soudanaise.
Le 21 septembre, lors de la 78e session de l'Assemblée générale de l’Onu, le dirigeant sud-soudanais avait appelé la communauté internationale à aider son pays à accueillir des milliers de réfugiés ayant fui le Soudan voisin depuis le début du conflit.
Parlant de la réaction des Nations unies concernant les réfugiés soudanais, M.Morgan a dénoncé la réaction du Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés, qui a été "complètement absente ou minimale".