Crise séparatiste au Cameroun: la "stratégie de la terreur" contre les écoles continue

© AFP 2023 REINNIER KAZEUn cours au Cameroun
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Alors que l’éducation est de plus en plus menacée dans les régions anglophones du Cameroun, en proie à un conflit séparatiste, l’Onu tire la sonnette d’alarme. Dans une déclaration, l’organisation a condamné la destruction de deux écoles dans la région du Sud-Ouest anglophone et appelle à "s’abstenir d’actions qui entravent l’accès à l’éducation".
Décidément, l’école reste l’une des cibles privilégiées des groupes armés dans le conflit séparatiste en cours dans les régions anglophones du Cameroun. Face à la recrudescence des attaques, dans une énième sortie, les Nations unies et leur partenaire humanitaire au Cameroun disent leur ras le bol et "condamnent avec fermeté toutes les actions visant l’éducation".
"Tous les auteurs d’attaques doivent s’abstenir d’actions qui entravent l’accès à l’éducation, conformément à la résolution 2601 (2021) du Conseil de sécurité",a déclaré dans un communiqué rendu public le 16 février, dont Sputnik a obtenu copie, Matthias Z. Naab le coordinateur humanitaire de l’Onu au Cameroun.
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Cette dernière sortie des Nations unies fait suite à une vague d’incendies criminels perpétrés contre deux écoles, début février, dans la région du Sud-Ouest séparatiste. En effet, les 8 et 11 février, des hommes armés appartenant à "des groupes armés non étatiques" ont incendié respectivement l’école primaire publique de Molyko à Buea et le collège catholique "Queen of Rosary" à Mamfe. Des incendies mis en scène, dont les images ont été largement relayées sur les réseaux sociaux. Dans sa sortie, le coordinateur humanitaire de l’Onu rappelle qu’avec ces attaques répétées "l’avenir de milliers de jeunes camerounais est en danger".
"L’éducation est un droit fondamental pour tous les enfants, et pourtant beaucoup n’ont pas été autorisés à jouir de ce droit", a regretté le coordinateur humanitaire de l’Onu au Cameroun.
Pour Aristide Mono, analyste politique, ces multiples appels au calme et déclarations des organisations internationales sonnent comme un rappel: "Cet appel connaîtra le même sort que toutes les exhortations et pressions internes et internationales connues jusqu’ici dans cette crise".
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"Les acteurs internationaux doivent plutôt continuer de travailler pour favoriser le dialogue entre les deux camps pour résoudre cette crise. Cette sortie du bureau humanitaire de l’Onu n’est qu’un simple appel qui ne résout aucune attente des séparatistes", commente-t-il au micro de Sputnik.

"Le message de la terreur"

En effet, le boycott des écoles fait partie de la stratégie des séparatistes. Depuis le début de ce conflit, les milices continuent de lutter contre la reprise des cours dans ces deux régions du Cameroun. On y a très souvent enregistré des offensives contre les établissements scolaires restés ouverts et des prises d’otages. Lors de l’une des dernières atrocités en date, fin 2021, trois élèves et une enseignante ont été tués, dans l'attaque d'un lycée de la région du Sud-Ouest séparatiste. Cette stratégie repose selon Aristide Mono sur la diffusion d’"un message de la terreur à l’effet de communication comme c’est le cas des stratégies dans les conflits asymétriques".
"Les belligérants terroristes sont en quête permanente d’actions réussies pour porter des coups à leurs ennemis, les écoles qui abritent des enfants, cibles très vulnérables, constituent de meilleurs choix […]. Ces groupes armés veulent ainsi démontrer aux yeux de tous que l’État est incapable de protéger ses citoyens", explique le politologue.
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Depuis 2017, les écoles sont fermées dans plusieurs localités de ces deux régions et beaucoup n’ont jamais rouvert leurs portes. Selon l’Onu, ces incidents répétés ont déjà privé jusqu’ici plus de 700.000 élèves et étudiants de leur droit à "une éducation correcte et sûre" dans les deux régions séparatistes. Pour rappel, en 2017, les séparatistes anglophones ont pris les armes contre le gouvernement de Yaoundé pour revendiquer la création d’un territoire indépendant. Les tensions avaient auparavant commencé en novembre 2016 sous la forme de revendications corporatistes: des enseignants déploraient la nomination de francophones dans les régions anglophones et des juristes désapprouvaient la suprématie du droit romain au détriment de la Common Law anglo-saxonne. Seulement, au fil des ans, le conflit s’est enlisé. Selon le dernier rapport de l’ONG Human Rights Watch (HRW) publié en janvier 2022, ce conflit a déjà fait plus de 4.000 morts civiles et poussé plus d’un million de personnes à abandonner leurs foyers. Des milliers d’hommes et de femmes y ont besoin d’assistance.
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