«Des élections crédibles, justes, transparentes aux échéances prévues». Dans son discours d'investiture retransmis en direct à la télévision nationale, le 7 juin, le nouveau Président de la transition au Mali, le colonel Assimi Goïta, se veut rassurant. Avait-il le choix alors qu'il venait de renverser, deux semaines plus tôt, les Président et Premier ministre, s'attirant le courroux de la communauté régionale et internationale? À ceux-là, il lance: «Je voudrais rassurer les organisations sous-régionales, régionales et la communauté internationale en général que le Mali va honorer l'ensemble de ses engagements pour et dans l'intérêt supérieur de la nation».
Ce sera à peu près tout. Le reste de son discours, qui dura à peine huit minutes, le nouvel homme fort de Bamako l'a réservé à des promesses faites aux Maliens. Ceux dont il est désormais le Président légal depuis que la Cour suprême l'a confirmé comme chef de l'État malien.
Les différentes revendications sociales semblent désormais inscrites à l'agenda du nouveau Président qui ira même jusqu'à promettre de transférer les deux tiers des fonds de souveraineté de la présidence au profit des «populations les plus démunies», pour leur fournir de l'eau et créer des centres de santé «sur toute l'étendue du territoire national».
«Très peu écouté à l'extérieur»
La prise du pouvoir du colonel Assimi Goïta, auteur de deux coups d’État en neuf mois, a créé le mécontentement au sein de la communauté internationale. En réaction, la Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO) et l’Union africaine (UA) ont suspendu le Mali de leurs instances. La France a mis fin à ses opérations militaires dans le pays alors que la Banque mondiale a suspendu ses opérations financières «jusqu'à ce que la situation soit plus claire».
«Le colonel Assimi Goïta est en ce moment très peu écouté de l'extérieur et il en est conscient. C’est tout à fait normal qu’il s’adresse à ceux qui sont encore capables de l'écouter, ceux qui ne peuvent faire autre chose que de l'écouter», décrypte le politologue ivoirien.
À ce titre, il juge «bonne la stratégie consistant à susciter une dynamique endogène à même de constituer une sorte de barricade contre d’éventuelles sanctions de la communauté internationale». Celle-ci serait plus encline à accompagner un pouvoir bénéficiant d'une certaine assise populaire.
D'autant plus que, depuis 2010, la situation sociale ne s'est guère améliorée au Mali du fait, notamment, de la situation sécuritaire dans le nord et le centre.
«Des centaines de milliers d’enfants ne vont plus à l'école depuis 2012 ou 2013, plusieurs dizaines de milliers de personnes sont poussées à vivre dans des situations précaires dans des camps de réfugiés. À tout cela s’ajoute la grave crise sociale qui perdure depuis bientôt 10 ans dans l’ensemble du pays», énumère l'analyste ivoirien.
Le nouveau Président n'avait donc pas d'autre choix, soutient-il, que de fortifier le front interne, «aller dans cette dynamique endogène, se montrer compréhensif des réels problèmes des Maliens pour les amener à parler d'une seule voix et faire face aux différentes menaces».
Un Premier ministre expérimenté
C’est toujours dans cette perspective que le colonel Assimi Goïta a nommé un Premier ministre en la personne de Choguel Kokalla Maïga.
Pour réussir sa mission, Choguel Kokalla Maïga devra gagner la confiance des Maliens en faisant prévaloir «l’intérêt supérieur du Mali, dans le dialogue, la cohésion et la négociation afin de trouver des réponses aux besoins des Maliens, et pouvoir relancer le pays», suggère Sylvain N'Guessan.
«Tout mon souhait est que le colonel Assimi Goïta puisse dérouler le reste de cette transition sans heurt et passer la main, afin que les civils puissent à nouveau diriger l'État malien vers des horizons meilleurs», a-t-il conclu.