Intervenant au ministère russe de la Défense, Vladimir Poutine a mis en garde les États-Unis contre une sortie du Traité sur les forces nucléaires à portée intermédiaire parce qu'elle aura de très graves conséquences pour la sécurité mondiale.
«La déclaration des États-Unis sur leur retrait du Traité sur les forces nucléaires à portée intermédiaire suscite une profonde préoccupation. Cette initiative pourrait avoir des conséquences des plus négatives, en affaiblissant considérablement la sécurité régionale et mondiale […] En fait, à long terme, nous pouvons parler de dégradation, voire d’effondrement, de l’ensemble de l’architecture de contrôle des armements, ainsi que de non-prolifération des armes de destruction massive», a indiqué le Président.
Insistant sur le fait que la Russie était ouverte à toute initiative destinée à renforcer la sécurité mondiale, le Président a souligné que son pays ne laisserait pas sans réponse la sortie des USA du traité FNI.
«Si les États-Unis rompent le traité — je l’ai déjà dit publiquement et crois nécessaire de le répéter encore une fois clairement en votre présence – nous serons obligés de prendre des mesures complémentaires pour renforcer notre sécurité», a-t-il ajouté.
Budget « militariste» américain
Le Président a également attiré l’attention sur le fait que le budget du Pentagone est presque 16 fois plus important que celui de la Défense russe.
«Nous constatons une disparité dans le financement [de la Défense, ndlr] entre les grandes puissances. Le Pentagone dispose d'un budget de plus de 725 milliards de dollars, un chiffre record, même en tenant compte de l’inflation. En fait, c’est un budget militariste. Et nous, nous avons un budget de 46 milliards. »
Conséquence de la signature du FNI pour l’URSS
Selon le Président, compte tenu du fait que l’Union soviétique avait en 1987 uniquement des missiles basés sur terre, la signature du traité FNI a signifié pour elle un désarmement unilatéral, puisque les États-Unis ont conservé leurs missiles basés en mer et dans les airs.
«Du point de vue de l'Union soviétique, cela a été un désarmement unilatéral. Pourquoi les dirigeants de l'URSS ont-ils accepté ce désarmement unilatéral, Dieu seul le sait, mais cela a été fait. Et nos partenaires ont continué à développer les armements navals et aériens», a souligné Vladimir Poutine.
Participation d'autres pays à la révision du FNI
Reconnaissant que le traité FNI n'était pas parfait, Vladimir Poutine a souligné que rien n'empêchait d'autres pays qui ont des missiles de portée intermédiaire de se joindre [aux signataires, ndlr] pour le réviser ou discuter d'un traité qui pourrait le remplacer.
«Oui, effectivement, ce traité pose un certain nombre de problèmes. Les autres pays dotés de missiles à portée intermédiaire […], qu'est-ce qui les empêche de commencer les négociations sur leur adhésion à l'accord actuel ou d'entamer les discussions des paramètres d'un nouveau traité?»
Triade nucléaire russe
Parmi les facteurs qui contribuent au renforcement de la stabilité dans le monde, Vladimir Poutine a cité les 82 % d'armes modernes dans la triade nucléaire russe.
«La triade nucléaire, qui joue un rôle clé dans le maintien de la parité mondiale, s'est nettement renforcée. Elle est composée à 82 % d'armes modernes. Le développement des armes les plus récentes, qui n’ont pas d'équivalents dans le monde, a connu des avancées considérables, ce que j'ai exposé le 1er mars lors du message annuel à l'Assemblée fédérale », a-t-il déclaré.
Selon le Président, les nouveaux missiles hypersoniques russes Avangard et Kinjal, les missilles intercontinentaux lourds Sarmat ainsi que le système russe de combat laser Peresvet «décuplent le potentiel de l’armée et de la flotte assurant ainsi de manière fiable et inconstestable la sécurité de la Russie pour les décennies à venir. Ils renforcent l'équilibre des forces et, par conséquent, la stabilité mondiale»
Les nouveaux armements russes violent-ils le FNI?
Contrairement à ce qu'affirment les États-Unis, les nouveaux missiles que la Russie a mis au point ne violent pas les dispositions du Traité FNI et les accusations de Washington sont donc infondées, a souligné le Président.
«Le missile Kinjal est une arme hypersonique unique au monde dont la vitesse dépasse les 10 Mach. Oui, nous en disposons et ce n'est pas une violation du Traité FNI. Où y a-t-il donc ici violation? C’est un système embarqué par un avion. Il n’est pas basé au sol».
Les Etats-Unis, qui ont déployé leurs systèmes de défense antimissile Aegis en Roumanie et qui envisagent de le faire en Pologne, ont bien été les premiers à violer le Traité FNI.
«Ces systèmes peuvent être utilisés en mer pour le lancement de missiles de ce type et ils le sont effectivement. Maintenant, en violation du traité, ils seront déployés au sol».
Le Président a rappelé que les drones d’attaque américains étaient également des armements interdits par le Traité FNI.
«Et les drones qui présentent toutes les caractéristiques de missiles à portée intermédiaire sont très largement utilisés. Et? Ils violent ouvertement le traité. Et c'est à nous que sont adressés des reproches qui ne sont que des hypothèses qui ne reposent sur rien», a conclu le Président.
En octobre, Donald Trump avait annoncé que les États-Unis prévoyaient de sortir du Traité sur les armes nucléaires à portée intermédiaire signé le 8 décembre 1987 par Mikhaïl Gorbatchev et Ronald Reagan. Le document en question abolissait l'usage de toute une série de missiles d'une portée comprise entre 500 et 5.500 kilomètres.