Il ne s'agit pas d'une simple visite de politesse, s'accordent les experts. La visite du premier ministre nippon démontre que le Japon fait progresser ses intérêts nationaux et que M. Abe lui-même est persuadé que les relations Tokyo-Moscou sont cruciales sur le long terme.
Ce que souhaite le premier ministre, c'est de renforcer les liens avec la Russie, et ce n'est pas par hasard que M. Abe a été le seul membre du G7 présent à la cérémonie d'inauguration des Jeux olympiques d'hiver de 2014 à Sotchi.
Le moment de la visite n'est non plus anodin. M. Abe se tourne vers la Russie alors que les Etats-Unis coopèrent avec cette dernière pour remédier à la crise syrienne et ne peuvent plus exiger du Japon de suivre la stratégie d'endiguement de la Russie.
"Ce qui est encore un signe que la politique d'isolation d'Obama a échoué", a déclaré le président de la commission des Affaires étrangères de la Douma Alekseï Pouchkov à Bloomberg.
"C'est une visite importante qui atteste du fait que le Japon a décidé de ne pas mettre tous ses œufs dans le même panier", a-t-il souligné.
Entre-temps, Washington n'a pas trop apprécié la décision de M. Abe de venir à Sotchi. En février, le président américain avait demandé à M. Abe de suspendre sa visite jusqu'à ce que le sommet du G7 se tienne au Japon les 26 et 27 mai.
La Russie et le Japon ont de nombreux intérêts communs. Pauvre en ressources énergétiques, le Japon cherche à diversifier ses sources de pétrole et de gaz alors que la Russie a besoin de nouveaux investissements, sur fond de crise mondiale. En outre, M. Abe a clairement laissé entendre qu'il voulait résoudre l'ancien litige territorial entre la Russie et le Japon autour des îles Kouriles avant de quitter son poste. Cette année, il envisage d'inviter le président russe au Japon et espère arriver à un accord.
Un autre problème qui préoccupe le pays du Soleil-Levant est la situation autour de la mer de Chine méridionale. Le Japon prend une part de plus en plus active dans les discussions autour des eaux contestées de cette région. Tokyo espère qu'un dialogue mené en parallèle avec Moscou et Pékin permettra de refroidir les ardeurs de la Chine.