Le rapprochement de la Russie avec la Chine n'est un secret pour personne. Entre l'Organisation de Coopération de Shanghai, la présence de Xi Jinping aux célébrations des 70 ans de la victoire sur l'Allemagne nazie le 9 Mai 2015, le regroupement des BRICS, et une politique jointe au Moyen-Orient, le conflit sino-soviétique semble bien loin et bien oublié.
Cependant l'élément politique n'est pas la seule raison. Il y a aussi, et surtout, celui économique. Les deux géants eurasiens sont avant tout des partenaires, chacun ayant ses avantages relatifs.
Au début des années 2010, l'Arabie Saoudite était le principal fournisseur de la Chine en pétrole (près de 20% des importations chinoises de brut); aujourd'hui, la Russie a pris la place de la monarchie saoudienne (15% pour l'un et 13% pour l'autre).
De plus, à l'inverse de Riyad, Moscou accepte de vendre son pétrole en Yuan, et non pas en Dollars. Ce qui facilite l'intérêt de Pékin. Rappelons enfin que la Chine consomme 31,75 Millions de barils par jour; un marché titanesque.
Mais cette relation est-elle durable, ou juste conjoncturelle? L'actualité et les marchés évoluent vite, et les amis de hier peuvent se tourner le dos demain. Surtout que les trois pays cités ne sont ni à l'abri de crises (comme la Chine actuellement, ou la dette saoudienne). L'histoire nous a appris qu'une fragilité économique amène des troubles sociaux et des changements majeurs dans le pays en question.
« La motivation de cette évolution réside dans le fait que la Chine est extrêmement dépendante de de l'étranger pour ses importations de pétrole. En 2015, le ratio de 60% de la consommation de pétrole chinoise venant de l'étranger a été dépassé; et dans ce contexte, la Russie présente par rapport à d'autres sources d'approvisionnement un gros avantage pour la Chine, qui est que ces approvisionnements peuvent emprunter une voie terrestre: des oléoducs qui empruntent une voie moins vulnérable, et moins susceptible d'être interrompus que des approvisionnements maritimes. »
« Il y a deux choses à prendre en compte. Sur le plan historique il reste des motifs de tension entre la Chine et la Russie; l'expansion russe s'est faite aux dépends de l'empire chinois au 19ème siècle; (…) la Chine apporte de nouveaux débouchés et de nouveaux moyens de financement; la Chine assure son approvisionnement et ouvre la voie vers de nouveaux marchés pour d'autres produits venant de Russie.
Cela renvoie à la gestion macro-économique de ces pays; (…) les grands projets développés font partie d'une tentative pour essayer de limiter les effets des crises engagées et de retrouver une dynamique de croissance. »
Une volonté macroéconomique dirigiste pourra-t-elle sauver ces trois pays? L'avenir nous le dira. Or, beau nombres d'analystes estiment que le prix du baril, à moins d'un changement géopolitique mondial, ne montera pas à plus de 40 Dollars. Les exemples de l'Afrique du Sud avec les cours de l'or et du diamant dans les années 80, et de la Hollande avec la tulipe, montrent que les mono économies se fragilisent avec le temps, donnant lieu à des bouleversements internes parfois graves.
Le sénateur John McCain avait déclaré voici quelques années que, sous l'administration Poutine, la Russie pouvait devenir un acteur majeur à l'échelle globale, à condition que les prix des énergies fossiles restaient élevés.
La course est donc lancée! Et les premiers arrivés pour le marché chinois seront les premiers servis.
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