L'autodafé d'un Coran en Suède est un acte "offensant", a estimé mardi l'ONU, lors d'un débat à ce sujet au Conseil des droits de l'homme.
Cependant, limiter la liberté d'expression doit rester une exception, estime l'organisation
Ce débat avait été demandé par le Pakistan au nom de plusieurs pays de l'Organisation de Coopération Islamique (OCI) qui espèrent faire adopter une résolution à ce sujet dans la journée.
Mais plusieurs pays européens, dont la France et l'Allemagne, veulent poursuivre les négociations pour parvenir à un consensus.
"Les discours haineux de toutes sortes augmentent, partout" dans le monde, a averti le Haut-Commissaire de l'ONU aux droits de l'homme Volker Türk, appelant à les combattre par le dialogue et l'éducation.
Le projet de résolution condamne toute manifestation de haine religieuse, y compris les actes de profanation du Coran, et appelle les pays à adopter des lois permettant de prévenir et juger ces actes incitant à la discrimination ou la violence.
Il demande à l'ONU d'identifier les pays qui n'ont pas une telle législation et d'organiser une table-ronde d'experts chargés de se pencher sur le sujet.
"Les discours et les actes incendiaires contre les musulmans, l'antisémitisme, les actions et les discours qui ciblent les chrétiens - ou des groupes minoritaires (...) sont des manifestations d'un manque de respect total", a assuré M. Türk, les qualifiant d'"offensants".
Le 28 juin, Salwan Momika, un Irakien réfugié en Suède, a brûlé quelques pages d'un exemplaire du Coran devant la plus grande mosquée de Stockholm et pendant la journée de l'Aïd al-Adha, une fête célébrée par les musulmans à travers le monde.
La police suédoise avait autorisé le rassemblement au cours duquel des pages du Coran ont été brûlées, mais a ouvert par la suite une enquête pour "agitation contre un groupe ethnique", au motif que l'autodafé s'est déroulé devant une mosquée.
Réactions dans le monde musulman
Si "la limitation de tout type de discours ou d'expression doit (...) rester une exception", le droit international stipule que les pays doivent "interdire tout appel à la haine nationale, raciale ou religieuse", a indiqué M. Türk.
Mais, a-t-il dit, "toute restriction nationale au droit primordial à la liberté d'opinion et d'expression doit être formulée de manière à ce que son seul objectif et résultat soit de protéger les individus - plutôt que de soustraire la doctrine religieuse à la critique".
S'exprimant en visioconférence, le ministre des Affaires étrangères saoudien, Fayçal ben Farhane, a affirmé que la liberté d'expression "devrait propager la coexistence pacifique plutôt que de provoquer un choc des civilisations".
Prenant la parole au nom de l'OCI, l'ambassadeur pakistanais, Khalil Hashmi, a lui souligné que la profanation publique du Coran n'a rien à voir avec la liberté d'expression mais est "un affront à la dignité humaine".
Les pays européens ont également condamné l'autodafé du Coran, mais plusieurs d'entre eux ont demandé plus de temps pour parvenir à un consensus sur le projet de résolution.
Le représentant américain, Rashad Hussain, a appelé à combattre les discours haineux par le dialogue, soulignant que les Etats-Unis étaient opposés aux lois anti-blasphème.