L’année 2022 a marqué un recul dans les dépenses militaires africaines. Le continent a moins dépensé, sans doute par ce qu’il doit se focaliser sur d’autres priorités, comme la sécurité alimentaire ou l’approvisionnement en eau, explique à Sputnik Mokhtar Saïd Mediouni, ancien colonel de l’armée de l’air algérienne.
Mais l’Afrique s’est aussi vue mettre des bâtons dans les roues par les anciennes puissances coloniales, ce qui explique son retard, notamment dans les airs ou dans la lutte antiterroriste, affirme l’expert militaire.
"La France et les anciens colons ont tout fait pour que l'Afrique ne s'arme pas, n'ait pas d'armée structurée, moderne. Je donnerais l'exemple du Mali, du Burkina Faso, de la Guinée, de la République centrafricaine, du Niger, du Tchad. C'est uniquement ces derniers mois que ces armées commencent à s'équiper en aviation, en drones et en moyens pour lutter efficacement contre le terrorisme", déclare-t-il ainsi.
L’Algérie mise sur la technologie
Côté algérien, les dépenses militaires ont aussi baissé de 3,7% en 2022, selon un rapport de l’Institut international de recherche sur la paix de Stockholm (SIPRI). Mais le pays continue ses efforts pour moderniser ses armées, en jouant la carte technologique, explique Mokhtar Saïd Mediouni.
"L'Algérie a entamé depuis des années un processus de modernisation et de professionnalisation de son armée […]. Aujourd'hui, on travaille avec de l'intelligence artificielle. On vit aussi une guerre de drones. Il est donc tout à fait normal que l'Algérie consacre plus de moyens pour être au diapason des armées modernes", déclare-t-il ainsi.
L’expert militaire souligne d’ailleurs l’importance de maîtriser son industrie militaire pour ne pas essuyer de pénuries, comme le montre l’exemple du conflit Ukraine, où Kiev court derrière les munitions. D’où l’intérêt pour l’Algérie d’initier une phase d’industrialisation militaire.
Et ce que l’Algérie ne peut pas produire elle-même, elle peut toujours l’acheter à ses partenaires militaires. Parmi eux, la Russie tient le rôle de fournisseur historique, même si Alger tente de diversifier ses approvisionnements, rappelle Mokhtar Saïd Mediouni.
"La coopération militaire avec la Russie est historique, elle date de très longtemps. Beaucoup de matériel utilisé dans l'armée algérienne est d'origine russe. Mais nous essayons de diversifier nos fournisseurs: avec la Chine, l'Allemagne, les États-Unis d'Amérique, ou d'autres pays occidentaux", conclut-il.
L’Algérie avait notamment acheté pour plus de sept milliards d’armements russes en 2021, provoquant la colère de Washington. Le sénateur républicain Marco Rubio avait même réclamé des sanctions contre Alger après ces livraisons.