Cherchant à riposter à la baisse de production pétrolière actée par l’Opep+, Washington menace de suspendre ses ventes d’armes aux pays du Golfe et de retirer ses troupes d’Arabie saoudite et des Émirats arabes unis. Une pression au niveau politique en réaction à une décision économique, ont estimé auprès de Sputnik différents experts saoudiens.
Cependant, la discussion sur ce sujet a été engagée aux États-Unis depuis un certain temps:
"Ce processus a déjà commencé. Les États-Unis réduisent progressivement leur propre contingent militaire dans le Golfe. Cela concerne les bases d’Arabie saoudite et des Émirats arabes unis […]. Maintenant, il est possible de présenter cette nécessité stratégique d’un point de vue politiquement avantageux dans la situation actuelle", a indiqué le général saoudien et analyste stratégique Issa al-Faiye.
Un jeu politique
Entretemps, l’arrêt des livraisons militaires aux pays du Golfe n’est pas profitable à Washington qui risque de perdre son influence non seulement dans la région, mais aussi au Moyen-Orient en général:
"Ils perdraient non seulement l’influence stratégique mais aussi beaucoup d’argent. Le lobby militaire américain et les représentants du complexe militaro-industriel le comprennent très bien […]. Ils peuvent donc menacer autant qu’ils veulent pour peser au niveau politique mais il est peu probable qu’ils rompent réellement les contacts. Car l’Arabie saoudite, les Émirats arabes unis et les autres pays du Golfe auront toujours la possibilité de trouver un autre marché d’armements ou de le diversifier en raison de menaces. Par exemple, ils peuvent acheter des armements à la Russie", a-t-il expliqué.
D’ailleurs, le pétrole est une matière première, une marchandise et non pas un jeu politique, note un professeur saoudien de droit international:
"Ce sont les Américains qui tentent de politiser le marché pétrolier et demandent de régler la production pour leurs propres bénéfices. Mais ils oublient que la Russie et l’Arabie saoudite ne sont pas les seuls à faire partie de l’Opep+, mais qu’il y a aussi une vingtaine d’autres pays. Cette décision [de diminuer la production de pétrole, ndlr] a été prise à l’unanimité, mais c’est Riyad qui est bizarrement coupable. Pourquoi? Parce que Washington a oublié que c’est notamment l’Opep+ qui a sauvé le marché pétrolier d’un effondrement total pendant la pandémie", a déclaré Asil al-Joueid.
Il a aussi rappelé que l’Arabie saoudite faisait la distinction entre les instruments politiques et économiques. Enfin, "le royaume n’intervient pas dans les affaires intérieures des États, contrairement à Washington".
Pomme de discorde
Les représentants des 13 membres de l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep) et leurs dix alliés se sont mis d’accord le 5 octobre, à Vienne, pour diminuer leur production à partir de novembre. Ce sera la baisse la plus importante depuis les coupes historiques de près de 10 millions de barils décidées pendant la pandémie de Covid-19 au printemps 2020.
En réaction, le Congrès américain a appelé à retirer les troupes américaines d'Arabie saoudite et des Émirats arabes unis, ainsi que de couper les ventes d’armes.