La Lune, le Soleil et d’autres possibles provocateurs d’un conflit nucléaire accidentel

Il y a 40 ans jour pour jour, le monde était au bord d’une guerre nucléaire en raison d’une erreur informatique. Mais les ordinateurs sont loin d’être la principale cause d’un conflit nucléaire accidentel: les militaires doivent aussi faire attention à la météo et même à ce qui se passe en dehors de l’atmosphère. En voilà quelques exemples.
Sputnik

En novembre 1979, une erreur informatique a failli provoquer un conflit nucléaire à grande échelle entre les États-Unis et l’URSS. Ce n’était pas le premier ou le dernier cas où une guerre a pu être évitée de justesse, mais des situations dangereuses similaires n’ont pas toujours été la conséquence de problèmes informatiques. Voilà le top-8 des causes potentielles d’un conflit nucléaire.

Erreur humaine: le «mauvais bouton» au mauvais moment

Le 12 janvier 2018, les Hawaïens, dans le Pacifique, ont reçu des messages sur leurs smartphones, annonçant qu'un missile balistique allait frapper les îles. Le contenu de ce message a ensuite été démenti par les autorités. Le gouverneur de l'État d'Hawaï, David Ige, a mis les points sur les i: «L'erreur est survenue au moment d'une procédure ordinaire de changement d'équipe. Un employé s'est trompé en appuyant sur un mauvais bouton», a-t-il ainsi commenté pour la chaîne de télévision CNN.

Le commandement de la Défense aérospatiale de l'Amérique du Nord (NORAD) a aussi évoqué un malentendu, assurant qu'il n'avait «détecté aucune menace de missile balistique sur Hawaï».

Des nuages menaçants?

Le 26 septembre 1983, alors que la Guerre froide était au plus chaud, les satellites du système d'alerte précoce soviétique Oko, mis en exploitation en 1982, ont signalé le tir de plusieurs missiles balistiques intercontinentaux américains en provenance de la Malmstrom Air Force Base, dans le Montana.

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Le lieutenant-colonel Stanislav Petrov, qui était de service au poste opérationnel de commandement Serpoukhov-15, à une centaine de kilomètres de Moscou, a considéré ces signaux comme une fausse alerte lorsque des alarmes sonores et lumineuses ont été déclenchées dans son bunker souterrain. Convaincu qu'une véritable offensive américaine nécessiterait beaucoup plus de missiles, il a réussi à convaincre ses supérieurs d’attendre une confirmation des données par les radars terrestres.

Par la suite, une enquête a établi que les capteurs des satellites Oko ont mal interprété la réflexion des rayons solaires sur les nuages évoluant à haute altitude, la confondant avec le dégagement d'énergie au décollage de missiles.

Une bande d’ordinateur mal placée

Le 9 novembre 1979, lors de la crise de Suez, les officiers de quatre centres de commandement américains, y compris du Commandement de la défense aérospatiale de l'Amérique du Nord (NORAD), ont vu sur leurs écrans un grand nombre de missiles soviétiques, ce qui semblait être une attaque à grande échelle contre les États-Unis. En six minutes, des préparatifs d'urgence ont été effectués: les bombardiers nucléaires étaient prêts au décollage et les équipes des missiles balistiques intercontinentaux ont été placées en état d’alerte.

Mais les systèmes de radar d'alerte précoce et de satellites ont ensuite confirmé qu’aucun tir de missiles n'avait eu lieu. Il s’est plus tard avéré que la fausse alarme avait été lancée après qu’une bande d’ordinateur destinée à être utilisée pendant des exercices d’alerte aux missiles avait été installée par erreur dans un ordinateur en service opérationnel, selon le rapport d’Alan Phillips, 20 Mishaps That Might Have Started Accidental Nuclear War.

Une éruption solaire

Le 23 mai 1967, les postes d’observation radar du NORAD situés au-delà du cercle polaire arctique ont enregistré de fortes radiations et des interférences qui ont été interprétées comme un brouillage intentionnel des radars destiné à dissimuler le lancement de missiles soviétiques.

Les équipages de bombardiers stratégiques ont reçu l’ordre de décoller, ordre qui a par la suite été annulé. La fausse alerte avait en fait été provoquée par les radiations résultant d'une puissante éruption solaire, associée à une éjection de masse coronale.

Le taux de radioactivité était le plus élevé au-dessus des pôles terrestres où l’atmosphère et la couche d’ozone sont les plus minces, d’après Space.com.

«Ingérence de la Lune»

Le 5 octobre 1960, le poste de commandement du NORAD a reçu un signal de la station d’alerte précoce de Thulé, au Groenland, sur une frappe massive de missiles balistiques intercontinentaux soviétiques.

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Heureusement, les États-Unis n’ont pas riposté après cette fausse alerte: l’incident a eu lieu avant la crise des missiles de Cuba alors que la tension dans les relations américano-soviétiques n’était pas encore à son apogée. De plus, le dirigeant soviétique Nikita Khrouchtchev se trouvait à ce moment-là à New York, en tant que chef de la délégation soviétique à l'Assemblée générale des Nations Unies.

L’enquête a établi que la réflexion d’un signal radio par la surface lunaire était à l’origine de cette fausse alerte, d’après l’ouvrage Computer Technology and Social Issues de David Garson.

Un blackout important

Le 9 novembre 1965, l’Office de gestion des secours d’urgence (OEP) auprès de l’administration américaine a considéré la gigantesque coupure de courant électrique qui affectait plusieurs États du nord-est des États-Unis, ainsi qu’une partie de la province de l'Ontario au Canada, comme le résultat d’une frappe nucléaire. Pendant ce blackout, plus de 30 millions de personnes réparties sur 207.000 km2 ont été privées d'électricité pendant près de 13 heures, selon le New York Times.

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Plusieurs dispositifs d’alerte installés à proximité des grandes villes et des sites militaires aux États-Unis pour distinguer les pannes de courant «normales» de celles causées par une explosion nucléaire, ont envoyé un signal rouge sur les écrans des postes de commandement, alors qu’ils devaient en transmettre un jaune pour montrer qu’ils étaient hors circuit. Ces indications erronées ont mis le centre de commandement de l’OEP en état d’alerte.

Explosion d’un satellite

En octobre 1962, une sonde soviétique, Mars 1962A (Spoutnik 22), a explosé en orbite d’attente peu après son lancement le 24 octobre par la fusée Molnia 8K78 depuis le cosmodrome de Baïkonour, au Kazakhstan. L’accident a eu lieu en pleine crise des missiles de Cuba.

«L'explosion d'un engin spatial russe en orbite pendant la crise des missiles de Cuba [...] a amené les États-Unis à croire que l'URSS avait lancé une attaque massive de missiles balistiques intercontinentaux», a affirmé en 1968 le physicien et radioastronome britannique Bernard Lovell, directeur de l'observatoire de Jodrell Bank (Université de Manchester) de 1945 à 1980.

Un ours étourdi

Le 25 octobre 1962, vers minuit, un gardien de la base aérienne de Duluth, dans le Minnesota, a vu un personnage gravir la barrière de sécurité. Il a ouvert le feu avant d’activer le régime «alerte au sabotage» ce qui déclenche automatiquement des alarmes dans toutes les bases de la région.

À Volk Field, dans le Wisconsin, le signal fautif a lancé les préparatifs au décollage des chasseurs-intercepteurs F-106A dotés d’armes nucléaires. Les pilotes pensaient que la Troisième Guerre mondiale avait commencé, mais une communication immédiate avec Duluth a montré qu’il s’agissait d’une erreur. À ce moment-là, les avions roulaient déjà sur la piste et il a fallu y envoyer un véhicule pour les arrêter.

L'intrus de Duluth s’est avéré être un ours, d’après le rapport d’Alan Phillips, 20 Mishaps That Might Have Started Accidental Nuclear War.

Malgré toutes les précautions, la possibilité d’une guerre par inadvertance en raison d’une suite imprévue d’événements demeure une menace mortelle. À l’époque où de nombreux pays possèdent des armes nucléaires, la plus grande vigilance s’impose.

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