La fin de "l’exceptionnalisme français": Paris confronté à un retrait douloureux au Niger
© AFP 2024 -À Niamey, le 3 août 2023
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Réclamé depuis longtemps, le retrait français du Niger est une défaite de la France qui deviendra "une des petites nations" de l’Europe. Sa domination sur l'Afrique de l'Ouest est en train de décliner et elle n'a pas la capacité militaire pour inverser la situation au Niger, estiment deux analystes interrogés par Sputnik.
Annoncé récemment par Emmanuel Macron, le retrait militaire et diplomatique français du Niger est un coup dur pour le prestige de Paris, avance auprès de Sputnik Paolo Raffone, analyste stratégique et directeur de la Fondation CIPI à Bruxelles.
"La perte de la Françafrique est un coup dur pour le prestige français. Sans les dépendances néocoloniales en Afrique, la France n'est plus une puissance globale mais une des petites nations européennes qui doit résoudre les nombreux problèmes de sa cohésion interne et de ses relations avec ses voisins européens. C’est la fin de l’exceptionnalisme français", relate l’expert.
Les effets de ce virage pour la France seront néfastes, développe Ian Liebenberg, politologue et professeur émérite à l'Université de Namibie et à l'Université de Stellenbosch en Afrique du Sud:
"De toute évidence, ce sera négatif car c'est une indication pour beaucoup sur le continent africain et ailleurs dans le monde, que la domination de la France sur l'Afrique de l'Ouest est en train de décliner".
Selon lui, "l'image de la France a souffert".
Retrait douloureux
Paris devra dorénavant faire face à son impuissance sur le continent africain, lance Paolo Raffone rappelant que la Françafrique a été créée "avec le Niger et le Tchad comme pierres angulaires" pour empêcher les Soviétiques et les Chinois d'entrer sur le continent.
"La France, à elle seule, n'a pas la capacité militaire pour inverser la situation au Niger ou dans la région du Sahel", explique-t-il.
L’expert rappelle la réaction de la Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO) suite au renversement de Mohamed Bazoum par les militaires fin juillet. L’organisation régionale a menacé d’intervenir militairement si l’ordre constitutionnel n’est pas établi. En réagissant, le Niger, avec ces deux voisins, le Mali et le Burkina Faso, a créé un pacte militaro-politique, l'Alliance des États du Sahel (AES), censé protéger Niamey d'une intervention éventuelle.
"Trois pays – le Mali, le Burkina Faso et le Niger – ont signé un pacte politico-militaire pour maintenir les Français à l'écart, et d'autres pays les rejoindront probablement, réduisant de facto la pertinence de la CEDEAO centrée sur le Nigeria", développe-t-il.
"Face à cette réalité, et compte tenu du mécontentement grandissant au sein de l'armée française, le Président Macron a finalement décidé de retirer ses diplomates et ses militaires du Niger. Cette décision aurait été prise en accord avec les États-Unis qui tenteront de maintenir leurs troupes au Niger tout en négociant avec la Russie et la Chine", note M.Raffone.
Par conséquent, "la France est hors du Niger et probablement l'UE sera bientôt hors de la région".