"Le grand gagnant ce sont les États-Unis": un eurodéputé commente l’enquête sur les Nord Stream
17:47 15.02.2023 (Mis à jour: 00:45 16.02.2023)
© Sputnik . Sergey Guneev
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Absence de résultats fiables sur le sabotage des Nord Stream, profits records des compagnies énergétiques US… Ces éléments pointent du doigt les États-Unis, premiers bénéficiaires de la destruction des gazoducs. L’eurodéputé Thierry Mariani livre ses réflexions sur l’article écrit par le journaliste Seymour Hersh qui accuse Washington du sabotage.
La destruction des Nord Stream profite aux États-Unis, ce qui contribue à la crédibilité de l’enquête du journaliste américain Seymour Hersh qui les accuse du sabotage, a estimé le député européen Thierry Mariani, dans une interview accordée à Sputnik Afrique.
"On a la confirmation une fois de plus de ce que tout le monde pense. C'est à dire, Seymour Hersh pose les vraies questions: à qui profite le crime? Qui avait intérêt à faire cette opération?".
En effet, "quand on regarde le résultat économique de ce sabotage et le grand gagnant ce sont les États-Unis. Les compagnies pétrolières américaines et leurs producteurs de gaz naturel liquéfié font des profits records", indique-t-il.
Selon ses dires, les compagnies pétrolières américaines, ExxonMobil et Chevron, ont vu leurs profits plus que tripler. Puis, les exportations américaines de gaz naturel en Europe ont doublé durant les six premiers mois de 2022 pour atteindre 27 millions de tonnes, précise l’eurodéputé. Enfin, plus de 230 méthaniers ont accosté en 2022 en Europe.
Tandis que Washington est le premier bénéficiaire de cet acte de sabotage ayant coupé la principale conduite gazière qui relie la Russie au Vieux Continent, c’est notamment l’Europe qui est "un grand perdant qui ne veut pas le reconnaître". M.Mariani rappelle que les prix de l’énergie ont triplé et les industries européennes, parmi lesquelles les entreprises allemandes, se retrouvent pénalisées par cette flambée.
"C'est l'Union européenne qui aujourd'hui fait les frais financièrement de la fin de ce gazoduc", conclut-il.
Impacts sur l’Europe
Cependant, l’Europe vit dans "un aveuglement économique", se rangeant du côté de Washington, son allié de longue date, poursuit l’eurodéputé. Un cordon ombilical difficile à rompre, car certains pays "dépendent essentiellement de l’Otan pour leur défense".
L’UE ne proteste même pas contre la nouvelle loi adoptée par les États-Unis et visant à réduire l’inflation dans le pays par de grandes subventions de sa propre industrie, parfois au détriment des aides européennes:
"Après les sanctions c'est un nouveau coup dur pour l'Europe qui, elle, se tire vraiment une balle dans le pied". D’après l’homme politique, les Vingt-Sept devraient plutôt développer des relations économiques avec d’autres pays comme l’Inde, la Chine ou la Corée "pour être beaucoup moins dépendants".
Cette omerta médiatique règne "tout simplement parce que la vérité dérange". Une raison pour laquelle ces révélations de Seymour Hersh sont passées plutôt sous le silence.
"La presse française n'en parle très peu", note-t-il tout en évoquant une émission sur RTL à ce sujet. Une faible réaction à l’article publié par le journaliste ayant reçu le prix Pulitzer, et disproportionnée en comparaison avec d’autres enquêtes:
"Ce qui est extraordinaire, c'est que dès qu'il y a une estimation de pertes sur la Russie par un obscur journaliste norvégien ou islandais, ça fait les titres de la presse française. Mais quand le prix Pulitzer dit le résultat de son enquête et que cela dérange, on en parle très peu".
Quand la vérité sera-t-elle officielle?
Un élément important dans cette affaire est que la Russie n’est toujours pas autorisée à participer à l’enquête. Entretemps, les prospections européennes ne fournissent aucun résultat probant.
L’eurodéputé estime que la vérité ne se ferait pas connaître encore longtemps:
"Je pense que la quasi-totalité des gouvernements savent très bien qui a saboté ce gazoduc, mais n'ont aucune envie d'accuser leurs alliés […]. La vérité, on la connaîtra ou elle sera officielle, si je puis dire, dans un siècle, quand ce seront les historiens et quand tous ceux qui ont participé à ce conflit ne seront plus là".