Lors d’un entretien accordé samedi 19 décembre à la chaîne Asharq News, le chef du gouvernement marocain, Saad Dine El Otmani, a répondu à son homologue algérien, Abdelaziz Djerad, qui a estimé dans une déclaration à la presse que l’accord de normalisation des relations entre le royaume chérifien et Israël constituait «un danger» certain à la sécurité nationale algérienne.
«Il n’y a rien dans ce que fait le Maroc sur le plan politique, diplomatique ou militaire pour assoir sa souveraineté sur le territoire du Sahara occidental qui viserait de près ou de loin l’Algérie», a déclaré M.El Otmani, soulignant que l’accord conclu avec Israël «n’était pas du tout orienté contre nos frères algériens».
Qu’en est-il du point de vue algérien?
Sur le plan géostratégique et sécuritaire, l’Algérie est très inquiète pour sa sécurité nationale. Depuis la destruction de la Libye en 2011 suite à l’intervention de l’Otan sous instigation française, toute la bande frontalière algérienne s’est encore enflammée.
Dans ce contexte, l’accord signé entre le Maroc et Israël sous les auspices des États-Unis, en contrepartie de la reconnaissance par Donald Trump de la souveraineté du royaume chérifien sur le territoire du Sahara occidental, a été mal vu par les autorités algériennes pour plusieurs raisons. La première est qu’il est intervenu près d’un mois après l’intervention militaire marocaine au passage frontalier d’El Guerguerat, dans la zone tampon démilitarisée à l’extrême sud du Sahara occidental. Une intervention qui a amené le Front Polisario à annoncer son retrait de l’accord de cessez-le-feu signé avec l’Onu et le Maroc en 1991, ouvrant ainsi la porte à un probable embrasement militaire de cette région. Ceci s’est également produit alors que 200 dangereux terroristes ont été libérés dans la région du Sahel après que la France a payé une rançon de plusieurs millions d’euros pour libérer des otages.
Le Maroc tente de rassurer
Ainsi, l’arrivée d’Israël au Maroc après avoir rétabli ses relations, avec l’appui américain, avec le Tchad, le Soudan, et probablement encore avec le Mali, la Mauritanie et le Niger, est pressentie comme un danger par l’Algérie qui se voit à cet effet complètement encerclée par un arc de feu qui pourrait avoir de graves incidences sur sa sécurité nationale.
«Quand on dit aux citoyens qu’il y a des opérations à l’étranger visant la stabilité du pays, voici les preuves, quand on voit que nous sommes entourés de dangers et de guerres», a-t-il ajouté, soulignant qu’«il y a une volonté de ramener l’entité israélienne et sioniste à nos frontières». Cette question de normalisation des relations avec Israël est prise très au sérieux par les Algériens du fait qu’elle inclut également, en plus de la coopération économique, la collaboration en matière de sécurité, de renseignement et des technologies militaires.
Tout en assurant que le royaume chérifien «ne portera jamais atteinte à ses voisins», Saad Dine El Otmani a rappelé que «le roi Mohamed VI a, à maintes reprises, lancé des appels à l’adresse de nos frères algériens afin de régler tous les problèmes en les soumettant aux discussions afin de leur trouver des solutions dans un cadre fraternel».
Les positions
L’Algérie refuse de normaliser ses relations avec Israël tant que les droits du peuple palestinien à la liberté, l’indépendance et l’édification d’un État viable avec Jérusalem-Est comme capitale ne sont pas respectés. Elle soutient également un référendum d’autodétermination du peuple sahraoui conformément aux résolutions du conseil de sécurité de l’Onu.
De son côté, le Maroc a fait savoir qu’il maintenait les mêmes positions de principe de soutien à la cause palestinienne conformément à l’initiative de la Ligue des États arabes de 2002, soulignant que l’accord avec Israël ne remettait en rien en cause cet engagement.