En Algérie, les autorités dépassées par la nouvelle vague de Covid-19

© AFP 2024 RYAD KRAMDILe Premier ministre algérien Abdelmadjid Djerad le jour de l'inauguration de la Grande Mosquée d'Alger
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L’Algérie enregistre une recrudescence des cas de patients atteints de Covid-19. Les autorités multiplient les décisions contradictoires en fermant les terrasses et les parcs mais en permettant la reprise de la prière du vendredi dans les mosquées, suspendue depuis neuf mois.

Les hôpitaux sont dans la zone rouge depuis la fin du mois d’octobre. Après une baisse marquée des cas de contamination quotidiens au coronavirus avec une moyenne de 300 cas par jour durant le mois d’août, les statistiques ont nettement rebondi pour atteindre, ce lundi 9 novembre, 642 personnes infectées et 14 décès.

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L’Algérie a intégré le club des pays dont le chef d’État a été atteint du Covid-19. Évacué en urgence le 28 octobre, le Président Abdelmadjid Tebboune est hospitalisé dans un établissement spécialisé de la ville de Cologne en Allemagne. Entre-temps, dans certains hôpitaux algériens, la situation est devenue ingérable.

C’est le cas de la ville de Jijel (350 km à l’est d’Alger) où le personnel soignant fait face à un afflux sans précédent de malades contaminés. Le contexte sanitaire est tel que le docteur Mohamed Rouibah, anesthésiste-réanimateur dans le principal hôpital de la région, a lancé un appel à l’aide aux membres de la diaspora originaires de Jijel. Le médecin fait état d’un manque d’équipements de respiration artificielle ainsi que de moyens de protection pour le personnel hospitalier.

Plan d’action d’urgence

Mais le wali (préfet) de Jijel n’a pas du tout accepté le tableau noir dressé par le docteur Mohamed Rouibah, ni même son appel aux dons. Jeudi 5 novembre, il a décidé de limoger l’anesthésiste-réanimateur. Une mesure qui a provoqué la colère du corps médical de cet établissement hospitalier qui est entré immédiatement en grève pour exiger son annulation. Pour ses collègues, mettre fin aux fonctions de ce spécialiste en réanimation en ces temps de pandémie aura des conséquences dramatiques. Le directeur de l’hôpital a finalement refusé d’appliquer la décision du wali.

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De leur côté, les autorités ont décidé de lancer un «plan d’action d’urgence» afin de contenir la propagation du coronavirus. Lors d’une réunion avec les membres du gouvernement, tenue le jeudi 5 novembre, le Premier ministre Abdelaziz Djerad a indiqué que ce programme s’articulait autour de trois axes: «Le renforcement des mesures de prévention dans ses volets sanitaire et sécuritaire, une stratégie de communication plus efficiente et une sensibilisation plus forte envers les citoyens, et l'application rigoureuse des dispositions coercitives réglementaires.» 

«Les regroupements de toutes natures et la non-observance des protocoles sanitaires dans différents lieux –en particulier les moyens de transport, les commerces et les espaces publics– ont été les principaux facteurs qui ont provoqué la résurgence de cas de clusters et favorisé la propagation rapide du virus», précise le communiqué officiel de la Primature.

Pour le gouvernement, cette hausse des cas de contamination est due, avant tout, à un «relâchement de la population».

Mesures restrictives

Abdelaziz Djerad a également décidé de prolonger le couvre-feu dans 29 wilayas (départements), dont la capitale. 

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À partir de ce mardi 10 novembre, celui-ci débute à 20h –au lieu de 23h– jusqu’à 5h du matin. De son côté, la préfecture d’Alger a imposé de nouvelles mesures plus restrictives: fermeture de tous les parcs et des lieux de détente, interdiction de consommer dans les cafés et les restaurants y compris sur les terrasses. Il faut dire qu’actuellement, le pire pour les Algériens serait de revenir à un confinement plus strict, comme cela a été le cas au début de la pandémie. Une telle situation serait catastrophique pour l’économie.

Mais l’opinion publique ne comprend pas certaines décisions des autorités, qui risquent d’accélérer la propagation du coronavirus. C’est le cas notamment de la reprise de la prière du vendredi dans les mosquées qui était interdite depuis le mois de mars. À Alger, cette initiative a coïncidé avec l’ouverture de la Grande Mosquée, un édifice religieux monumental qui peut accueillir 120.000 fidèles.

Pour le premier vendredi de ce mois de novembre, «seules» 10.000 personnes ont été autorisées à venir y prier.

Dos au mur

Le docteur Fawzi*, médecin-réanimateur dans un hôpital de la capitale, explique à Sputnik que l’autorisation dans les mosquées de la prière du vendredi ne répond à aucune logique. Selon lui, «le référendum constitutionnel (du 1er novembre), la rentrée scolaire des collégiens et des lycéens ainsi que la reprise de la prière du vendredi» sont les trois événements importants de ce début de mois qui risquent d’aggraver la situation sanitaire dans les prochains jours.

«Le personnel médical ne va pas tarder à en subir les effets alors que la situation est déjà très complexe. Nous sommes dos au mur. Notre service est bondé depuis plusieurs jours. Il n’y a pas un seul lit de libre. Malheureusement, les places se libèrent souvent après un décès. En moyenne, nous perdons un patient par jour», explique le médecin.

Le réanimateur indique que d’autres services de l’hôpital, notamment l’endocrinologie et la médecine interne, ont été transformés en services Covid. En plus de l’afflux important de malades, le docteur Fawzi a constaté que dans de nombreux cas, les symptômes sont plus sévères. «Contrairement à la première vague que nous avons connue durant le printemps, nous observons dans notre service l’arrivée de patients avec des taux de saturation en oxygène très bas et qui nécessitent immédiatement des soins intensifs», dit-il.

Actuellement, de nombreux hôpitaux du pays sont saturés, obligeant les personnels soignants à trouver des solutions pour sauver le maximum de vies.

«Notre objectif est de ne pas laisser les malades sans oxygène, même s’ils ne sont pas dans un service Covid», affirme le docteur Fawzi.

Le réanimateur tient à rester optimiste, même s’il s’attend à des semaines difficiles.

*Prénom d’emprunt, la personne en question ayant préféré conserver l’anonymat.

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