L’Organisation mondiale de la santé (OMS) définit la mortalité maternelle comme étant le décès d'une femme pendant la grossesse ou dans les 42 jours suivant la naissance de l’enfant, quelle que soit la cause du décès, du moment qu’elle n’est ni accidentelle ni fortuite. Il est estimé que 68% des décès de cette nature dans le monde se produisent en Afrique subsaharienne. Mais dans cette partie du globe, la tendance est à la baisse depuis plusieurs années dans certains pays.
Des chiffres encourageants mais encore trop élevés
Selon les autorités sanitaires, la mortalité maternelle au Burkina Faso est essentiellement due aux hémorragies, aux infections, aux rétentions placentaires, aux ruptures utérines, aux complications des avortements et aux éclampsies.
Les causes obstétricales directes, précise l’UNFPA, représentent plus de deux tiers de ces décès. À ces raisons médicales, il convient d’ajouter plusieurs facteurs qui favorisent la mortalité comme la non-pratique de la consultation prénatale (CPN), l'insuffisance des soins obstétricaux essentiels et d'urgence, l'utilisation des accoucheuses villageoises incompétentes.
De son côté, l’OMS a fait de l'élimination des décès évitables et de l’amélioration de la santé et du bien-être des mères et nouveaux-nés sa priorité stratégique numéro 2 (sur cinq) au Burkina Faso pour la période 2017-2020, après le renforcement du système de santé.
Ainsi, un accent particulier a été mis sur la construction et l’équipement de nouveaux centres de santé –afin de les rapprocher toujours plus des zones reculées où vivent des femmes le plus souvent très pauvres et ayant le moins de chances de recevoir des soins médicaux appropriés–, mais aussi sur la formation du personnel.
Au Burkina Faso, seulement un tiers des femmes enceintes effectuent huit consultations prénatales comme le recommande. Ce texte radiophonique traite de la santé maternelle, les causes essentielles de la mortalité maternelle, et plus https://t.co/iOAxwdb3wY pic.twitter.com/tGxyedcWTG
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En 2015, on dénombrait dans le pays environ 2.000 formations sanitaires publiques (notamment quatre CHU, neuf CHR, 1.698 centres de santé et de promotion sociale, plus de 130 maternités et dispensaires isolés). Mais depuis, la situation sécuritaire, marquée les attaques récurrentes des groupes djihadistes, s’est fortement dégradée au point que, selon le Bureau de la coordination des affaires humanitaires des Nations unies (OCHA), 300 établissements ne sont actuellement plus fonctionnels ou fonctionnent a minima.
Une baisse qui s’explique
Au centre hospitalier régional (CHR) de Banfora (ville du sud-ouest et capitale de la région des Cascades qui compte environ 800.000 habitants et qui est assez représentative de l’ensemble du Burkina Faso, à l’exception notable des régions du Sahel et de l’Est, durement touchées par l’insécurité), la mortalité maternelle est en plein recul, comme le confirme une sage-femme interrogée par Sputnik:
«Nous avons enregistré cinq décès en août et en septembre, et une vingtaine en tout sur toute l’année. C’est beaucoup, car un décès maternel est toujours un drame terrible, mais c’est nettement moins que ce à quoi on a pu être confronté des années auparavant», a-t-elle déclaré.
Selon elle, cette «baisse très encourageante» a été rendue possible par plusieurs facteurs comme une meilleure qualité de formation des agents et un «suivi rigoureux des patientes».
«Au CHR de Banfora, qui est le centre de référence de la région des Cascades, nous avons 53 sages-femmes et maïeuticiens, trois gynécologues, deux attachés de santé en soins obstétricaux et gynécologiques et cinq médecins généralistes qui disposent des moyens nécessaires pour prendre en charge les patientes en toutes circonstances», a-t-elle ajouté.
Un autre facteur particulier qui explique le recul de la mortalité est la proposition systématique aux mères de la planification familiale, désormais gratuite au Burkina Faso depuis le 1er juin 2019.
Il est prouvé que des intervalles de naissance inférieurs à 24 mois accroissent les risques de morbidité et de mortalité aussi bien chez les mères que leurs bébés. Il ressort, en effet, de l’enquête démographique et de santé menée entre 2010 et 2011 que des naissances trop rapprochées amoindrissent la capacité physiologique de la mère, l’exposent à des complications durant et après la grossesse (fausse couches, éclampsies...) et augmentent le risque de mortalité.
Aucun décès maternel à l’accouchement tel est mon vœux pour cette nouvelle année. #zerodecesmaternel#ODD pic.twitter.com/ZV9JKGrH11
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Mais l’espacement des naissances, réputé bénéfique à la santé des mères et de leurs enfants, n’est pas toujours aisé à mettre en pratique. En effet, les femmes qui désirent y recourir ne sont en général pas libres de le faire.
«La plupart du temps, les femmes, même quand elles le souhaitent, n’acceptent pas sur le champ les moyens de contraception qui leur sont proposés dans le cadre du planning familial. Elles ont avant tout besoin de l’avis, si ce n’est l’accord, de leur époux qui s’y oppose parfois. Il y a des cas où une femme à qui on a implanté un stérilet revienne peu après demander à le faire retirer car le mari n’y est pas favorable», a expliqué la sage-femme.
En plus d’avoir une influence sur la mortalité maternelle, le planning familial en a aussi sur l’avortement. En 2019, l’UNFPA estime que 50.066 avortements ont été évités.
Des résultats meilleurs que ceux des voisins
Les chiffres de la mortalité maternelle au Burkina Faso demeurent, certes, encore élevés malgré leur baisse significative, mais il est important de souligner que le pays s’en sort bien mieux comparé à ses voisins. En effet, on enregistre 368 décès pour 100.000 naissances vivantes au Mali, 484 au Sénégal, 535 au Niger et 614 en Côte d’Ivoire.
Autant dire que l’Afrique subsaharienne a encore un long chemin à parcourir dans sa lutte amorcée depuis des décennies dans la lutte contre ce fléau.