Dans un entretien à Sputnik, Igor Nikouline, biologiste russe et ancien expert militaire sur les armes biologiques auprès de l’Onu, a estimé qu’il était convenable pour les autorités allemandes de repousser aussi longtemps la présentation des résultats de leurs tests montrant qu'Alexeï Navalny avait été empoisonné par un agent toxique de type Novitchok.
«Je crois que deux semaines plus tard, on aurait pu trouver des résidus de cette substance. Ils n'ont pas été en mesure de l'avoir il y a une semaine. Ils ont reporté la conférence de presse plusieurs fois. Ils ont attendu que le temps de décomposition de la substance arrive, et ils ont dit: "On a trouvé quelque chose là-bas, des restes, des traces de quelque chose qui n’est pas clair", mais quelque chose de ce groupe. Ils s'en tiendront probablement à cette position», a expliqué Igor Nikouline.
Seulement une chose est claire dans l’affaire Navalny, selon l’ancien expert de l’Onu, c’est que l’opposant russe n’a pas été empoisonné par un agent chimique militaire.
«Il est clair qu'il ne s'agit pas d'une substance toxique militaire parce qu'elle agit presque instantanément.»
Auparavant, Leonid Rink, l’un des concepteurs de l’agent toxique connu sous le nom de Novitchok, avait aussi expliqué que la personne empoisonnée par cette substance aurait succombé en quelques instants et que ce neurotoxique ne pouvait pas être utilisé contre une personne en particulier mais était capable d’éliminer toute une unité militaire.
Des scénarios évoqués par un expert
Pour sa part, Igor Nikouline pense qu'il est possible que l’état grave dans lequel se trouve Navalny ait été provoqué par un produit pharmaceutique, spécifiquement un qui contient des inhibiteurs de la cholinestérase mentionnés par les docteurs allemands.
«C'est une enzyme qui divise la protéine de l'acétylcholine, qui est un poison qui s'attaque au système nerveux. Il y en a beaucoup, presque une douzaine de médicaments utilisés pour le traitement de la maladie d'Alzheimer, Parkinson, beaucoup, ils bloquent la cholinestérase. Il l'a bu lui-même ou quelqu'un de proche lui a donné. Il est peu probable qu'il accepte des boissons ou de la nourriture d'étrangers», a détaillé l’ancien expert de l’Onu.
En outre, Igor Nikouline a évoqué la possibilité d’un empoisonnement accidentel suite à un mélange de produits qui contiennent des substances chimiques qui ne font pas bon ménage dans un organisme humain.
«Il peut aussi s'agir d'une intoxication accidentelle. […] Il a été dans des villages, a goûté un alcool artisanal. […] Il ne s'agissait peut-être pas d’un alcool artisanal, mais d’une liqueur d'amanites. Ou peut-être une sorte d’alcool artisanal contrefait avec du méthanol, par exemple», a conclu le spécialiste.
L’affaire Navalny
L’opposant russe Alexeï Navalny a été hospitalisé le 20 août à Omsk, en Russie, suite à un malaise qu’il a fait à bord d’un avion qui le transportait de Tomsk à Moscou et qui a dû atterrir en urgence. Les premières analyses faites par les médecins russes ont indiqué des troubles métaboliques qui ont provoqué une forte hypoglycémie. Ils ont par la suite déclaré qu’aucun poison n'avait été détecté dans le sang ou dans l'urine de Navalny.
Dans le coma depuis le 20 août, il a été transféré à l’hôpital de la Charité de Berlin.
Le 2 septembre, le gouvernement allemand a déclaré qu’Alexeï Navalny avait été empoisonné par un agent toxique de type Novitchok.
À son tour, Moscou a précisé que malgré plusieurs demandes aucune preuve n’avait depuis été fournie par Berlin.