C’est un chiffre jamais atteint auparavant, et encore «très certainement sous-évalué», avertit Global Witness, car «beaucoup de cas ne sont pas enregistrés et font rarement l’objet d’enquêtes».
«Par “défenseurs de l’environnement et des terres”, nous entendons tous les gens qui agissent pacifiquement contre l’exploitation injuste des ressources et milieux naturels», peut-on lire dans le rapport publié le 29 juillet.
Il ne s’agit donc pas seulement de militants écologistes, mais aussi de membres de tribus autochtones, de diverses populations dont le cadre de vie est menacé, ou de gardes forestiers et autres «rangers», sans qu’ils soient nécessairement engagés politiquement.
Ainsi, 40% des tués appartiennent à des peuples autochtones, une catégorie surreprésentée alors qu’elle ne constitue que 5% de la population mondiale. Pour ces communautés, l’écologie se révèle donc être un enjeu de survie immédiate. L’Amérique latine concentre les deux tiers des 212 victimes de 2019, dont 33 personnes en Amazonie.
NEW: Last year, 212 Land and #EnvironmentDefenders were murdered whilst defending their homes, their land and the environment against climate-wrecking projects.
— Global Witness (@Global_Witness) July 29, 2020
2019 was the deadliest year on record.https://t.co/9kI8wpPyPH pic.twitter.com/oOqaLCMyt1
Au Brésil notamment, les ressources naturelles suscitent la convoitise de grandes entreprises, mais aussi de trafiquants, tandis que le gouvernement de Jair Bolsonaro mène une politique de libéralisation de l’exploitation des terres déforestées. «Un feu vert donné aux réseaux criminels et aux entreprises peu scrupuleuses» pour s’approprier les ressources des territoires autochtones d’Amazonie, s’emporte le rapport.
Coup de hache ou opération militaire
Mais c’est la Colombie qui occupe la première place du macabre classement, avec pas moins de 64 morts, quand les Philippines se hissent à la deuxième avec 43 victimes. Deux pays qui à eux seuls représentent la moitié de ces meurtres, liés à leurs nombreux sites miniers et agro-industriels. Datu Kaylo Bontulan, représentant du peuple philippin Manobo, a ainsi perdu la vie dans une opération militaire en avril alors qu’il tentait de s’opposer à un projet de mine. L’armée philippine l’a présenté comme un membre de groupe rebelle tué lors d’un bref affrontement, tandis que ses proches rappellent qu’il s’agissait d’un civil.
La Cour constitutionnelle colombienne considère de son côté que 36 cultures autochtones courent un risque d’extinction, tandis que l’Organisation nationale indigène de Colombie (ONIC), une instance représentative des Amérindiens du pays, n’hésite pas à parler de «génocide en cours».
Over half of all killings of Land and #EnvironmentDefenders last year happened in just two countries: Colombia 🇨🇴 and the Philippines 🇵🇭
— Global Witness (@Global_Witness) July 31, 2020
Find out why those at the frontline of #ClimateBreakdown are targeted - and how you can support them: https://t.co/Ad7jfdlg36 pic.twitter.com/SN9UcqJyW3
Si l’Europe est la région du monde la moins affectée par le phénomène, Global Witness dénombre malgré tout deux morts en Roumanie, qui abrite l’une des forêts primaires les plus importantes du Vieux Continent. Alors qu’ils faisaient leur travail de surveillance contre l’exploitation sauvage du bois, deux gardes forestiers y ont perdu la vie, l’un abattu en octobre par des bucherons illégaux, l’autre tué d’un coup de hache sur la tête le mois précédent.
Quant aux auteurs des violences, le rapport de l’ONG note «l’impunité et la corruption généralisée» rendant difficile leur identification.
Global Witness pointe du doigt le crime organisé, les gangs locaux, les organisations paramilitaires, voire certaines forces de sécurité officielles, responsables selon l’association de 37 victimes en 2019 et accusées de collusion avec des acteurs économiques.