Record de défenseurs de l’environnement tués en 2019, les Amérindiens en première ligne

© Photo Pixabay / Beto0alboManifestation de femmes Huaorani en Équateur, décembre 2017 (image d'illustration)
Manifestation de femmes Huaorani en Équateur, décembre 2017 (image d'illustration) - Sputnik Afrique
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Un nouveau rapport de l’ONG Global Witness alerte sur la quantité de personnes tuées dans le monde pour des motifs liés à l’écologie: plus de 200 en 2019. Militants ou peuples autochtones défendant leurs terres, les victimes n’ont jamais été aussi nombreuses.

C’est un chiffre jamais atteint auparavant, et encore «très certainement sous-évalué», avertit Global Witness, car «beaucoup de cas ne sont pas enregistrés et font rarement l’objet d’enquêtes».

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Chaque année depuis 2012, l’ONG britannique publie un rapport recensant le nombre de personnes tuées dans le monde dans le cadre de leur défense de l’environnement: des gens ordinaires assassinés alors qu’ils se battaient contre la déforestation, l’implantation de mines ou de projets agro-industriels. Pour l’année 2019, l’association établit le triste record de 212 meurtres de ce type. Qui sont les victimes? La définition donnée par Global Witness est à souligner:

«Par “défenseurs de l’environnement et des terres”, nous entendons tous les gens qui agissent pacifiquement contre l’exploitation injuste des ressources et milieux naturels», peut-on lire dans le rapport publié le 29 juillet.

Il ne s’agit donc pas seulement de militants écologistes, mais aussi de membres de tribus autochtones, de diverses populations dont le cadre de vie est menacé, ou de gardes forestiers et autres «rangers», sans qu’ils soient nécessairement engagés politiquement.

Ainsi, 40% des tués appartiennent à des peuples autochtones, une catégorie surreprésentée alors qu’elle ne constitue que 5% de la population mondiale. Pour ces communautés, l’écologie se révèle donc être un enjeu de survie immédiate. L’Amérique latine concentre les deux tiers des 212 victimes de 2019, dont 33 personnes en Amazonie.

​Au Brésil notamment, les ressources naturelles suscitent la convoitise de grandes entreprises, mais aussi de trafiquants, tandis que le gouvernement de Jair Bolsonaro mène une politique de libéralisation de l’exploitation des terres déforestées. «Un feu vert donné aux réseaux criminels et aux entreprises peu scrupuleuses» pour s’approprier les ressources des territoires autochtones d’Amazonie, s’emporte le rapport.

Coup de hache ou opération militaire

Mais c’est la Colombie qui occupe la première place du macabre classement, avec pas moins de 64 morts, quand les Philippines se hissent à la deuxième avec 43 victimes. Deux pays qui à eux seuls représentent la moitié de ces meurtres, liés à leurs nombreux sites miniers et agro-industriels. Datu Kaylo Bontulan, représentant du peuple philippin Manobo, a ainsi perdu la vie dans une opération militaire en avril alors qu’il tentait de s’opposer à un projet de mine. L’armée philippine l’a présenté comme un membre de groupe rebelle tué lors d’un bref affrontement, tandis que ses proches rappellent qu’il s’agissait d’un civil.​

La Cour constitutionnelle colombienne considère de son côté que 36 cultures autochtones courent un risque d’extinction, tandis que l’Organisation nationale indigène de Colombie (ONIC), une instance représentative des Amérindiens du pays, n’hésite pas à parler de «génocide en cours».

Si l’Europe est la région du monde la moins affectée par le phénomène, Global Witness dénombre malgré tout deux morts en Roumanie, qui abrite l’une des forêts primaires les plus importantes du Vieux Continent. Alors qu’ils faisaient leur travail de surveillance contre l’exploitation sauvage du bois, deux gardes forestiers y ont perdu la vie, l’un abattu en octobre par des bucherons illégaux, l’autre tué d’un coup de hache sur la tête le mois précédent.

Quant aux auteurs des violences, le rapport de l’ONG note «l’impunité et la corruption généralisée» rendant difficile leur identification.

Global Witness pointe du doigt le crime organisé, les gangs locaux, les organisations paramilitaires, voire certaines forces de sécurité officielles, responsables selon l’association de 37 victimes en 2019 et accusées de collusion avec des acteurs économiques.

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En outre, «de nombreux gouvernements, des États-Unis au Brésil en passant par la Colombie ou les Philippines, ont utilisé la crise sanitaire pour […] revenir sur des réglementations environnementales durement acquises», regrette l’association. L’administration Trump, par le biais de l’Environmental Protection Agency (EPA), a ainsi assoupli fin mars une centaine de normes de protection de l’eau et de l’air, dans le but de réduire la contrainte sur les entreprises dans le contexte de la pandémie de Covid-19. En principe temporairement.

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