Supporters russes accusés en France: la nationalité «ne doit pas être un argument discriminatoire»

© AFP 2024 ANNE-CHRISTINE POUJOULATBagarres lors de l'Euro 2016 à Marseille
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Le procès des supporters russes emprisonnés à Marseille pour en avoir agressé un anglais lors de l’Euro 2016 s’ouvrira en décembre. Une étape importante pour Mikhaïl Ivkine, dont le dossier est de plus en plus sensible depuis son arrestation en mars 2018. Témoignages.

La date est fixée. Le 7 décembre 2020 s’ouvrira le procès de Mikhaïl Ivkine, supporter russe détenu en France depuis mars 2018. Il sera jugé pour «violences en réunion et avec arme suivies d’une infirmité permanente». Les faits remontent à 2016 quand en plein Euro de football, des heurts éclatent sur le Vieux-Port à Marseille entre supporters russes et anglais.

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Maître Julien Pinelli, avocat engagé par la famille de M.Ivkine, affirme au micro de Sputnik que son objectif principal est «d’obtenir la mise en liberté» de son client avant son jugement, «afin notamment qu’il comparaisse libre devant la Cour.»

Difficultés des conditions de détention

L’avocat du supporter russe assure que «Monsieur Ivkine dispose désormais de solides garanties de représentation en France puisqu’il pourrait bénéficier d’un logement et d’un travail dès sa mise en liberté. Il peut obtenir un titre pour travailler en tant que community manager en France, sous contrôle judiciaire».

«Le fait qu’il soit de nationalité russe ne doit pas être un argument discriminatoire pour retenir un risque de fuite et justifier son incarcération», précise l’avocat à Sputnik.

Bien que Mikhaïl Ivkine soit autorisé à communiquer avec sa famille, comme tout détenu en France, Me Pinelli dit que «l’éloignement et le coup de voyage rendent extrêmement rares des visites dont il pourrait bénéficier». Et l’accès à une cabine téléphonique est une consolation bien maigre.

«La principale préoccupation de mon client est aujourd’hui de pouvoir retrouver une vie familiale normale dont il est aujourd’hui privé», souligne Me Pinelli.

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L’avocat français assure auprès de Sputnik que «la moindre demande est problématique en détention». «Il est extrêmement difficile pour Monsieur Ivkine d’accéder à la littérature russophone», précise-t-il. Il a fallu à l’avocat faire plusieurs démarches pour qu’il soit «autorisé à lui remettre certains ouvrages, qu’on ne peut acheter en détention».

«Il y a très peu de russophones aux [centre pénitentiaire, ndlr] Baumettes. Ainsi, M.Ivkine est naturellement beaucoup plus isolé que le reste de la population carcérale. Il apprend le Français par la force des choses, mais ne le maîtrise pas suffisamment pour pouvoir communiquer avec d’autres détenus. Cela rend les conditions de détention encore plus difficiles», déplore Me Pinelli.

La bonne nouvelle est que Mikhaïl Ivkine n’a pas été en contact avec des personnes porteuses du virus SARS-CoV-2 au sein du centre pénitencier. «Néanmoins, comme les autres détenus, il a été privé de tout type d’activité sportive ou scolaire durant toute la durée de la crise sanitaire», rappelle son avocat.

Récit d’un témoin des confrontations à Marseille

Le 11 juin 2016, quand les heurts éclatent, Fabien Buzzanca, à l’époque reporteur pour la chaîne RT, est présent dans la fan-zone des Plages du Prado. Il est témoin de scènes d’une grande violence impliquant principalement des supporters anglais.

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Au milieu de l’après-midi, alors qu’il filme en live des supporters qui regardent le match «dans une superbe ambiance», le journaliste entend des sirènes «d’un nombre de camions policiers conséquent qui passent sur le boulevard, en direction du Vieux-Port».

«Je saute dans un taxi pour suivre et voir ce qui se passe. Arrivé en bas d’un escalier sur une immense place devant le Vieux-Port, j’entends un bruit: on dirait une charge de cavalerie de guerre. Et je vois au bout des dizaines d’Anglais avancer», raconte Fabien.

Pas de doutes sur leur nationalité, il les entend parler et crier.

«Ils sont sortis. Ils ont défoncé toutes les tables des restaurants, ont fait voler les chaises. C’était un carnage. Les gens ont eu tellement peur qu’ils se sont enfermés dans les restaurants. Le personnel a mis les chaînes», décrit Fabien Buzzanca.

Resté à l’autre bout de la place, le journaliste tente une fixation vidéo. Mais sous les «regards de travers des mecs » et visé par des «f**k you», il coupe le live de cette «cohue incroyable».

«Un supporter avance menaçant. Je recule. Il m’a tapé sur la bouche. Dans le feu de l’action je n’ai même pas remarqué que je saignais. Le patron d’un resto m’a tiré à l’intérieur. On a attendu que ça passe. Quand on est sorti, il y avait des trucs cassés partout. C’était hallucinant», poursuit Fabien.
«L’après-midi, quand les Anglais sont venus tout casser sur la place où j’étais, il n’y avait pas un flic», témoigne le journalise.

Les heurts ont continué tout l’après-midi. Échaudé par un coup reçu au visage et «vu la violence» du peu qu’il a vu, notre collègue ne s’approchera plus de trop près. Il fait néanmoins état d’une «castagne pure».

«Je pense qu’il n’y avait aucun motif politique. Cela n’avait rien à voir. Des mecs sont venus pour se battre. Mais il faut dire que les Anglais étaient vraiment bourrés. J’ai vu des mecs en train de boire des pintes à 10h00 du mat’. Ils étaient vraiment chauds, chauds bouillants», avance Fabien qui conclut: «Et ce qui est assez drôle, c’est que dans la soirée, il s’est passé quelque chose de dingue: des jeunes Marseillais sont venus se mêler aux bastons. Et j’ai vu des Anglais se mettre avec des Russes – ils se tapaient sur la gueule une heure avant – se battre contre les jeunes de Marseille».
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