Municipales: le RN parviendra-t-il à conjurer le mauvais sort?

© AP Photo / Thibault CamusMarine Le Pen
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Combien de mairies le Rassemblement national parviendra-t-il à gagner lors de ces municipales? Bien que le nombre de communes tombées dans l’escarcelle du parti frontiste progresse, le fossé entre les résultats de Marine Le Pen aux élections nationales et ceux de son parti aux municipales est jusqu’à présent béant. Analyse.

L’implantation locale, le «casse-tête» du Rassemblement national. Si Marine Le Pen réalise des scores toujours plus élevés aux élections présidentielles et que le scrutin des Européennes est historiquement synonyme de franc succès, ceux des municipales sont à l’inverse loin d’être une partie de plaisir pour le parti frontiste.

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Lors du précédent scrutin en 2014, onze communes avaient viré bleu marine. Le parti lepéniste était alors présent dans 315 villes au second tour, contre 119 lors de sa dernière performance en 1995. Cette année-là, le parti avait remporté quatre mairies. Une nette progression? Pas vraiment. En 2008, le FN ne remportait aucune mairie et avec 430 listes pour les municipales alignées cette année, c’est près d’un tiers de moins qu’en 2014.

Mais dimanche prochain, plusieurs communes sont pressenties pour passer sous la bannière du RN. Parmi elles, Moissac, dans le Tarn-et-Garonne, une ville de 13.000 habitants ancrée à gauche, mais où le jeune Romain Lopez a survolé le premier tour en recueillant 47,03% des suffrages. Vauvert, dans le Gard, et ses 11.000 habitants, pourrait également rejoindre l’écurie frontiste, avec un candidat à deux points du maire socialiste sortant. Le basculement de la commune est à portée de main, d’autant plus que le maire PS sortant est la cible d’accusations d’achat de voix.

Stratégie des «sauts de puce»

Plus modeste, Marles-les-Mines dans le Pas-de-Calais, une commune de 5.500 âmes, gérée par les communistes depuis plus de 50 ans. Une prise symbolique au PCF, tout comme pourrait l’être Givors, une commune de l’agglomération lyonnaise dirigée par le Parti communiste depuis 67 ans. Antoine Mellies, candidat RN, y est arrivé deuxième avec 22,84% des suffrages, juste derrière la maire sortante Christiane Charnay et son score de 24,55%. Pris dans une quadrangulaire où aucun accord n’a été trouvé entre les trois autres candidats pour «faire barrage» au RN, le candidat mariniste pourrait bien parvenir à créer la surprise en remportant cette ville de 19.000 habitants.

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Néanmoins, cette année, toutes les attentions médiatiques se portent sur Perpignan. La belle catalane et ses 120.000 habitants ont porté Louis Alliot en tête du scrutin (35,6%) lors du premier tour, loin devant le maire sortant Les Républicains Jean Marc Pujol (18,4%). Si l’ex-président du Front national l’emportait, Perpignan serait la plus belle prise du parti, après le secteur 7 de Marseille et ses 154.000 habitants lors du précédent scrutin. La même année, Béziers et Fréjus, avec respectivement 76.000 et 53.000 habitants, rejoignaient le cercle des communes dirigées par des maires RN ou jugées proches de celui-ci. Robert Ménard et David Rachline ont d’ailleurs été réélus au premier tour.

Il faut dire que «l’extrême droite» a des atouts au niveau local. 1995 reste un mauvais souvenir pour le parti frontiste, avec trois de ses quatre premiers élus condamnés dans diverses affaires attenantes à la gestion de leurs communes. Depuis, le parti a redressé la barre. Avec une politique de désendettement qui en privilégie la baisse des dépenses publiques à l’augmentation d’impôts, les élus RN ont fait de leur gestion budgétaire rigoureuse –«austère», diront certains– une marque de fabrique. Les communes conquises par le Front sont en effet destinées à devenir les vitrines du parti, pour rassurer les électeurs potentiels.

Quid des grandes villes… pour LREM

RN des champs qui rit, RN des villes qui pleure? Si les résultats du parti sont modestes dans la France périphérique, qu’en dire dans les grandes agglomérations? Il est d’usage de considérer que le Rassemblement national n’y a pas ses chances. En reprenant les résultats du premier tour dans les vingt plus grandes villes de France, le parti frontiste accomplit dans la majorité des cas des scores avoisinant les 5%. Pour autant, certains de ses candidats réalisent de bonnes percées, avec des scores plus qu’honorables: 19,45% des voix pour Stéphane Ravier à Marseille, qui se place en troisième position, quelques points derrières les deux candidats PS et LR, au coude à coude.

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Du côté de Nice, bien que Christian Estrosi soit aux portes de la réélection (47,63%), Philippe Vardon arrive en deuxième position avec 16,70% des suffrages. Deuxième position pour le RN également à Toulon, où Amaury Navarranne a été élu au conseil municipal avec 14,99% des voix. Lui aussi était face à une figure des Républicains qui a survolé l’élection. Même chose à Reims, bien que les voix frontistes aient fondu depuis 2014, ou encore à Nîmes où Yoann Gillet a de bonnes chances d’être réélu au conseil municipal, avec un score 14,34% au premier tour.

Mais si l’on martèle que le Front –maintenant Rassemblement– national n’arrive pas à s’implanter dans les grandes agglomérations, que dire de LREM? Présenté comme l’antithèse du parti de Marine Le Pen, le parti de la majorité présidentielle est supposé être électoralement porté par l’électorat des grandes villes. Pourtant, là aussi, lorsqu’on y regarde de plus près, les candidats LREM sont loin de s’imposer partout. L’échec est flagrant à Paris, où la farce Grivaux a laissé place au scandale Buzyn. À Lyon, deux candidats affiliés à la majorité parlementaire s’entredéchirent et les candidats de l’Union centriste sont à la peine à Strasbourg et Lille. Dans d’autres villes, les candidats du centre sont surclassés par ceux du Rassemblement national, comme à Marseille, Toulon et Saint-Étienne.

Dimanche, la seule grande ville que la majorité pourrait remporter est Le Havre, mais seulement parce que son maire sortant, Édouard Philippe, a changé d’allégeance depuis sa victoire sous l’étiquette LR en 2014.

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