Avec l'apparition de la théorie de la relativité dans la physique a commencé l'époque de la diversité des modèles fondamentaux, qu'il est impossible de rassembler en un système commun à ce jour. Aujourd'hui, les données les plus précises sur le fonctionnement de la matière sont fournies par la physique des hautes énergies. Cette dernière étudie les processus de naissance des particules fondamentales dans les collisions de protons et de noyaux accélérés jusqu'à une vitesse proche de celle de la lumière. Cela permet de vérifier les pronostics théoriques et de trouver de nouveaux états physiques des particules.
Le modèle standard formé dans les années 1960 est constitué d'un ensemble de théories sur la physique des particules expliquant la plupart des phénomènes fondamentaux, mais pas tous. Par exemple, il n'explique pas la gravité. C'est pour peaufiner ce modèle qu'a été créé le LHC.
L'information générée par les détecteurs pèse des dizaines de petabytes (millions de gigabytes) par mois, et son analyse demande parfois plus d'un an de travail aux scientifiques. Les données des laboratoires du centre sont traitées par un réseau de plusieurs niveaux dont les serveurs se trouvent dans les universités et les centres de recherche de 40 pays, Russie y compris.
La découverte en 2012 du boson de Higgs a marqué le final du travail grandiose pour confirmer le Modèle standard. Aujourd'hui, sur la base du CERN se déroulent plusieurs programmes expérimentaux parallèles consacrés aussi bien à la précision des prédictions du Modèle standard qu'à la recherche de phénomène de «nouvelle physique».
L'analyse du boson de Higgs permettra d'étudier les phénomènes en dehors du Modèle standard. Les scientifiques s'intéressent surtout aux phénomènes comme la matière noire et l'énergie noire, ainsi que la matière asymétrique et l'antimatière.
Un creuset de nouvelles technologies
«Il est impossible de connaître la direction de la recherche scientifique qui nous conduira aux nouvelles technologies, c'est pourquoi seule l'étude des problèmes fondamentaux supposant le dépassement des frontières du possible à l'heure actuelle pourrait garantir le développement de la science appliquée», explique Anatoli Romaniouk, professeur du MEPhI participant à la collaboration ATLAS.
La nécessité de traiter une immense quantité de données a fait du CERN un centre de développement des technologies numériques. Hormis l'internet qui y a été créé en 1989 pour faciliter le travail des chercheurs, l'organisation a significativement influencé la technologie du calcul distribué.
Les chercheurs sont particulièrement fiers de la réduction des dimensions physiques des accélérateurs. Les accélérateurs miniatures sont activement utilisés dès aujourd'hui pour scanner la structure interne des objets, par exemple dans la médecine ou l'expertise d'art.
De plus, les conditions expérimentales uniques permettent d'étudier l'impact de la radiation cosmique sur le climat et d'élaborer les méthodes de protection de l'électronique contre celle-ci pour le secteur aérospatial.
Le CERN possède une expertise unique en termes de compétences industrielles et de gestion des processus, ce qui en fait un hub avancé de l'industrie 4.0 influençant les entreprises de pointe dans le monde entier.
Aux portes de l'avenir
En tout, plusieurs dizaines de collaborations d'expérimentateurs travaillent au sein du CERN, dans différents domaines élargissant les horizons de la science. Les plus grandes étant ATLAS et CMS orientées sur la recherche de nouvelles particules élémentaires, de la matière noire et d'autres nouveaux phénomènes. LHCb étudie l'antimatière, et ALICE est spécialisée dans l'étude de l'état de la matière dans les premières microsecondes après le Big Bang.
Afin d'améliorer l'efficacité des observations du LHC, à l'heure actuelle se déroule un projet de modernisation qui le transformera en collisionneur à haute luminosité (HL-LHC). Cette mise à jour permettra de charger les scientifiques en données approximativement jusqu'en 2035.
Selon les plans des chercheurs, le LHC sera remplacé soit par le Futur collisionneur circulaire, d'un périmètre d'environ 100 km, soit par un accélérateur de tout nouveau type - un collisionneur linéaire. L'objectif de ces projets consiste à étudier en détail le boson de Higgs.
«Je trouve que le plus grand exploit du CERN est la communauté qu'il a été possible de créer. S'y réunissent les plus grands cerveaux de la planète qui travaillent dans différents domaines de la physique et des technologies. Nulle part ailleurs existe un tel niveau de communication professionnelle, un tel échange d'expériences», a déclaré Anatoli Romaniouk.
Actuellement, près de 2.600 chercheurs et ingénieurs travaillent au CERN à titre permanent. Plus de 12.000 physiciens de 85 pays participent aux expériences du centre, dont plus de mille Russes. Depuis sa naissance le centre s'est élargi de 11 à 23 pays partenaires.
L'article a été préparé à partir de la conférence «Grand collisionneur de hadrons: l'histoire et l'avenir des recherches du CERN» organisé à l'agence d'information internationale Rossiya Segodnya en collaboration avec des chercheurs de l'Université nationale de recherche nucléaire MEPhI (Institut d'ingénierie physique de Moscou).