Près de 400 tonnes de plomb présents dans Notre-Dame de Paris se sont répandus dans les environs à la suite de l’incendie de la cathédrale survenu le 15 avril. L’Agence régionale de santé (ARS), la préfecture et la mairie ont depuis effectué plusieurs mesures de concentration au plomb. Bien que ces taux soient nettement supérieurs au seuil réglementaire, les autorités ne les publient pas, «mettant en danger les riverains et les ouvriers du chantier», relève Mediapart qui a pris connaissance de documents ad hoc.
La mairie de Paris a «sciemment menti sur les taux de concentration au plomb relevés dans les crèches, les maternelles et les écoles, exposant ainsi les enfants et le personnel au risque de saturnisme», affirme le média. Les autorités n’auraient pas respecté l'instruction de la Direction générale de la santé (DGS) relative au dispositif de lutte contre le saturnisme infantile et de réduction des expositions au plomb.
Un «mensonge criminel»
Pour la spécialiste des questions de santé publique Annie Thébaud-Mony, directrice de recherche honoraire à l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm), ce mensonge est «criminel».
Sur 10 établissements scolaires contrôlés, neuf ont des taux de concentration au plomb nécessitant une intervention rapide de décontamination. Les prélèvements réalisés montrent des taux égaux «parfois près de dix fois supérieurs» au seuil d’intervention, selon les documents étudiés par Mediapart. Les poussières de plomb recouvrent les sols de certains espaces fréquentés par les enfants où ils peuvent l’ingérer accidentellement.
Aucune école fermée
Le 15 mai, un mois après l’incendie suivi de la contamination, et la prise de connaissance des premiers résultats, aucun établissement n’a été fermé et la mairie ne s’est toujours pas prononcée sur les mesures d’hygiène à adopter, s’étonne le média. Seule la Préfecture de police de Paris a décidé de fermer temporairement sa crèche et de procéder à un nettoyage approfondi, quand la crèche de la mairie restait ouverte.
Sur son site, la mairie dissimule les taux d’exposition au plomb les plus élevés, ne présentant que «la moyenne arithmétique des niveaux constatés dans des pièces accueillants les enfants» et dérogeant aux règles de prévention sanitaire, affirme Mediapart.
Qui plus est, «il n’y a pas de seuil en-dessous duquel le plomb serait inoffensif. Toute contamination est dangereuse, pour les enfants en particulier, mais aussi pour les adultes», a commenté pour Mediapart la scientifique Annie Thébaud-Mony, présidente de l’association Henri-Pézerat qui alerte sur la situation depuis fin avril.
Deux mois d’exposition au plomb
La mairie va profiter des vacances pour réaliser «un nettoyage de l’ensemble des établissements» et «des mesures de contrôle avant la rentrée», a-t-elle finalement indiqué après un long silence, ajoute le média.
Élisabeth Kutas, secrétaire départementale du syndicat des enseignants des écoles contactée par Mediapart, déplore que «les centaines de millions mis pour la reconstruction de la cathédrale ne soient pas utilisés aussi pour préserver la santé des enfants, des ouvriers, des enseignants, des habitants et de toutes les personnes qui travaillent autour du site. Les ravages de l’incendie ne sont pas que matériels, ils sont aussi sanitaires!».