Après sept mois de mobilisation des Gilets jaunes, une quinzaine d'experts se sont réunis lundi 17 juin à Beauvau pour évoquer «une évolution en profondeur» de la doctrine et des moyens de maintien de l'ordre, vu «la montée des violences et la multiplication des débordements en marge des manifestations observées ces dernières années», a indiqué le ministère de l’Intérieur.
«J'aimerais connaître votre perception sur l'usage de la force, sur nos armements et sur ce que certains appellent les “violences policières”, a déclaré Christophe Castaner. Ce n'est pas parce qu'il y a blessure qu'il y a faute.»
«On ne répond pas à des cocktails molotov avec des bons sentiments, on ne protège pas l'ordre républicain avec des mots doux. On peut faire croire que tirer au LBD [lanceur de balle de défense, ndlr] serait une violence policière, que lancer une grenade de désencerclement serait une violence policière, utiliser une matraque serait encore une violence policière, mais ce serait oublier les circonstances et le cadre d'emploi», a-t-il poursuivi.
«J'ai besoin de vos idées [...] pour répondre fermement à une violence débridée tout en préservant évidemment au maximum l'intégrité physique des personnes, y compris celle de celles et ceux qui provoquent les débordements», a indiqué Christophe Castaner.
Dans une interview publiée samedi 15 juin par Le Journal du Dimanche, le ministre a souligné qu’il n’acceptait pas l'expression «violences policières» en rappelant que 1.900 policiers et gendarmes avaient été blessés.
«Si certaines scènes m'ont surpris, c'est d'abord par la violence à laquelle ont été exposées les forces de l'ordre», a-t-il lancé.
Plusieurs experts ont été invités à cette rencontre, notamment le procureur de la République adjoint au parquet de Paris, Olivier Christen, l'ancien patron du RAID, Jean-Michel Fauvergue, et l'ancien chef du groupement de sécurité et d'intervention de la gendarmerie nationale, le général d'armée Jean-Régis Vechambre.
Or, cette composition a soulevé certaines critiques.
Brigitte Jullien, chef de la «police des polices», a elle aussi «totalement» réfuté le terme de «violences policières» en commentant pour Le Parisien les enquêtes ouvertes depuis le début du mouvement des Gilets jaunes et visant des membres des forces de l’ordre.
Dans le contexte du refus d’utiliser le terme de violences policières, le journaliste spécialisé David Dufresne se demande quelle expression il faudrait employer…
Puisque @EmmanuelMacron comme #BrigitteJullien (cheffe IGPN à @PoliceNationale) récusent le terme de #ViolencesPolicières, quelle expression devrions nous utiliser ?
— David Dufresne (@davduf) 15 juin 2019
…tandis que le co-fondateur de Mediapart, Edwy Plenel, met en doute l’impartialité de Brigitte Jullien.
La cheffe de l’IGPN justifie l’absence de sanctions des policiers auteurs de violences car «aucune enquête n’a permis de conclure que la responsabilité d’un policier était engagée à titre individuel». De quoi jeter un doute sur son impartialité @Mediapart https://t.co/gzTFx582Uo
— Edwy Plenel (@edwyplenel) 15 июня 2019 г.
Le journaliste David Perrotin se contente pour sa part de relever quelques phrases, très révélatrices, de l’interview accordée par Chritsophe Castaner au Journal du Dimanche.
Christophe Castaner dans le JDD:
— David Perrotin (@davidperrotin) 16 juin 2019
- «Le professionnalisme des forces de l'ordre n'a jamais été pris en défaut
- Je n'accepte pas l'expression violences policières
- Si certaines scènes m'ont surpris, c'est d'abord par la violence à laquelle les forces de l'ordre ont été exposées» pic.twitter.com/YlShM9Y5rB
Les manifestations des Gilets jaunes, qui ont souvent dégénéré en heurts avec la police, ont ravivé les polémiques sur le maintien de l'ordre, de nombreux manifestants ayant été violentés, éborgnés ou ayant reçu d'autres blessures graves.
Selon les chiffres du ministère de l'Intérieur à la mi-mai, 2.448 blessés ont été recensés parmi les manifestants et 1.797 parmi les forces de l'ordre.