Le traité FNI, conclu il y a 30 ans, peut être considéré comme mort et enterré. Du moins, le président américain Donald Trump parle déjà de la sortie des USA de cet accord-cadre russo-américain — qui avait mis un terme à la Guerre froide — comme d'un fait accompli.
Moscou s'attend à ce que l'annulation de l'accord entraîne la reprise du projet Pershing II aux États-Unis — des missiles qui étaient l'un des symboles de la confrontation américano-soviétique. Le général Vladimir Chamanov, responsable de la commission compétente de la Douma (chambre basse du parlement russe) pour la Défense, en a parlé récemment. Mais Donald Trump n'a pas simplement annoncé la sortie du traité FNI: il a appelé à signer un nouvel accord sur les missiles à portée intermédiaire qui inclurait obligatoirement non seulement la Russie, mais également la Chine.
La Chine, qui n'est pas signataire du traité et développe donc son programme balistique sans être inquiétée, est le principal destinataire du message du président américain selon les experts de Moscou et de Washington. «La Chine fabrique des missiles terrestres de nouvelle génération directement dirigés contre les USA et les bases de leurs alliés, ainsi que contre les navires présents en Asie-Pacifique, auxquels Washington ne peut rien opposer à cause du traité», écrit pour The Hill l'expert du Centre des intérêts nationaux Harry Kazianis.
Et Pékin ne s'empresse pas d'aller dans le sens de Washington et ses appels à une restriction volontaire. Les avertissements chinois sont appuyés par les faits.
A en juger par le rapport publié ce lundi par le Centre Carnegie, la Chine, qui dispose de 280 ogives nucléaires, a l'intention d'accroître significativement le nombre de sous-marins lanceurs d'engins (SNLE) dont elle dispose.
La version DF-21D, d'après le Pentagone, est le premier et unique missile balistique antinavire au monde. Il est devenu le premier missile capable de détruire des groupes aéronavals en mouvement à grande distance à l'aide de systèmes de lancement terrestres mobiles. Comme indiqué, les tout nouveaux DF-26 font également partie de cette catégorie unique.
Les satellites de reconnaissance Yaogan-1 et Yaogan-2 lancés en 2009 pourraient fournir aux forces de missiles les informations nécessaires pour la désignation des objectifs. De cette manière, les capacités des Chinois, notamment pour empêcher l'entrée des navires de guerre américains (porte-avions y compris) dans le détroit de Taïwan, se sont significativement accrues, écrivait en 2009 The Washington Times.
Le chiffre de 2.000 missiles est certainement sous-estimé, précise l'expert militaire Oleg Ponomarenko, collaborateur du Centre de conjoncture stratégique. «L'ampleur de la construction militaire en Chine est relativement importante. Simplement, les élaborations chinoises, les modèles créés, ne sont pas annoncés au début de leur développement: nous apprenons leur existence quand ils sont déjà produits. Par conséquent, l'ampleur de l'économie militaire et le rythme de la construction ne peuvent faire l'objet que d'estimations nominales. Je répète donc que l'estimation à 2.000 unités est très relative. Nous ignorons le nombre réel de missiles de cette classe détenus par la Chine», explique l'expert.
«Les missiles chinois modernes sont des armes de haute précision et la Chine est en tête dans ce secteur, qui est devenue le premier pays du monde à déployer des missiles antinavires à moyenne portée, des missiles balistiques capables d'éliminer des cibles en mouvement», constate Vassili Kachine. Pour les Chinois, ce sont des éléments cruciaux de leur domination militaire en Asie-Pacifique, souligne-t-il.
Selon ce dernier, aucune défense antiaérienne ne serait capable de parer l'attaque d'autant de missiles.
«Plusieurs dirigeants et experts militaires américains expriment des craintes par rapport à ce facteur précis, notant que la présence en Chine d'un armement balistique aussi puissant et l'impossibilité de le développer aux USA placent les États-Unis dans une position défavorable. Il est tout à fait possible que la force motrice de la révision de ce traité ne soit pas le mécontentement des USA par rapport aux prétendues infractions russes, mais précisément le changement de l'équilibre des forces en Asie-Pacifique», poursuit l'expert.
Il n'est donc pas étonnant que les Chinois aient déjà déclaré qu'ils ne participeraient à aucun dialogue à ce sujet et ne renonceront pas à leur avantage crucial, conclut Vassili Kachine.
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