Les médias occidentaux décernent la palme au Président russe

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En analysant la réaction des médias étrangers, et notamment britanniques, aux exercices militaires russo-chinois et au Forum économique oriental de Vladivostok, force est de constater que les grandes lignes de leur propagande se contredisent.

D'un côté, ils cherchent par tous les moyens à persuader le lecteur que la Russie est un acteur faible sur la scène mondiale, que Poutine est un autocrate désespéré et qu'il ne faut pas prendre au sérieux ce pays «station-service» qui est sur le point d'être achevé par les sanctions économiques américaines.

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De l'autre, dans ces mêmes médias, nous assistons à un véritable «culte du terrible Poutine et de la terrible menace russe». Par exemple, les exercices de grande envergure des armées de la Russie et de la Chine, qui se sont déroulés parallèlement au Forum économique oriental, ont été qualifiés par le journal britannique The Telegraph de «moment de triomphe» du président russe. Autrement dit, les journalistes britanniques ont formulé pour cet événement des éloges que même les médias russes ou chinois publics ne s'étaient pas permis.

De plus, les journalistes britanniques ont perçu dans les vols d'avions-espions américains à proximité de la zone des exercices le signe que l'Occident collectif s'inquiétait des risques représentés, pour l'Occident collectif, par la coopération russo-chinoise active. La phrase concernant le triomphe de Vladimir Poutine s'éclaire à la lumière du contexte médiatique dans lequel évoluent les journalistes britanniques: le fait est que dans leur réalité personnelle, la Russie reste un pays «à l'armée rouillée et inefficace, qui n'est plus capable de rien depuis longtemps», et ni les tirs de missiles Kalibr ni les opérations réussies de l'aviation et des forces spéciales russes en Syrie n'ont permis de briser ce stéréotype médiatique. Il est donc logique que dans ces conditions, les auteurs du Telegraph éprouvent un sérieux choc quand l'armée russe organise des manœuvres d'envergure, qui plus est avec son homologue chinoise.

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Étant donné que, malheureusement, nous vivons à une époque où les mèmes, les images marquantes et les sound bites (ou «bouchées sonores») sont plus importants et influentes que les réflexions complexes, on peut considérer que le Forum économique oriental de 2018 et les manœuvres militaires qui se sont déroulées en parallèle ont bénéficié d'une couverture médiatique appropriée, sachant que l'effet médiatique a été assuré en grande partie de par les médias occidentaux de leur plein gré. Les photos et les images de Vladimir Poutine et de Xi Jinping mangeant ensemble des blinis et du caviar rouge ont été relayées par les plus grandes chaînes mondiales, les agences de presse et les journaux.

© Sputnik . Mikhail Klimentiev / Accéder à la base multimédiaLes Présidents russe et chinois ont visité, en marge du Forum économique oriental de Vladivostok, une exposition où ils ont eu l’occasion de préparer des crêpes
Les Présidents russe et chinois ont visité, en marge du Forum économique oriental de Vladivostok, une exposition où ils ont eu l’occasion de préparer des crêpes - Sputnik Afrique
Les Présidents russe et chinois ont visité, en marge du Forum économique oriental de Vladivostok, une exposition où ils ont eu l’occasion de préparer des crêpes

Cette image visuelle de l'amitié russo-chinoise paraît particulièrement marquante sur fond de décision du président américain Donald Trump de n'assister à aucun des sommets asiatiques prévus, ce qui laisse aux experts occidentaux le sentiment désagréable que l'Asie dans l'ensemble sort de la sphère d'influence et d'intérêts des USA et que dans cette région-clé de la planète régnera désormais l'alliance russo-chinoise. Du point de vue d'un expert américain ou britannique typique, c'est clairement une perturbation du cours normal des choses.

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Plus encore, la venue du premier ministre japonais Shinzo Abe au forum de Vladivostok ne fait que renforcer les soupçons que la politique américaine de «guerre commerciale contre tous», couplée à l'usage incontrôlable du «bâton des sanctions», entraîne des résultats déplorables: les pays impactés par les agissements de Washington commencent à régler les problèmes dans le dos des USA.

Les projets gaziers russes comme Sila Sibiri («Force de Sibérie») et le gazoduc entre la Russie et la Corée du Sud passant par la Corée du Nord évoqué pendant le forum, sont un thème particulièrement sensible pour ceux qui, en Occident, s'opposent à Moscou. D'ailleurs, Sila Sibiri est mentionné par les journalistes russes dans le même contexte que les exercices militaires. En d'autres termes, ils y voient un instrument d'influence géopolitique de la Russie — et ce n'est pas dépourvu de logique. Le fait est que la Chine (tout comme la Corée du Sud et le Japon) est un pays qui dépend des importations d'hydrocarbures, ce qui la rend très vulnérable (et dans certains cas même dépendante) des pays exportateurs d'hydrocarbures (c'est-à-dire de pétrole et de GNL), ainsi que des pays qui peuvent bloquer toutes les voies maritimes de fourniture de pétrole et de GNL — c'est-à-dire des USA, qui appliquent le principe de l'Empire britannique selon lequel «celui qui contrôle le commerce maritime contrôle le monde».

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En l'occurrence, la Russie est à la fois l'ennemi juré des USA (parce qu'il est impossible de l'isoler depuis la mer, notamment après l'échec de l'idée américaine de «voler la Crimée» en 2014) et un sérieux facteur de risque pour les USA dans leurs relations avec d'autres pays. Le gazoduc Sila Sibiri ne peut être bloqué par aucun groupe aéronaval américain, c'est pourquoi ce projet a une telle importance géopolitique — et c'est aussi pour cette raison que les activistes proaméricains en Russie ont même mené une campagne active contre celui-ci. Si de tels projets étaient menés avec la Corée du Sud et/ou le Japon (comme cela a été évoqué pendant le Forum économique oriental), trois changements géopolitiques et géoéconomiques majeurs, loin de réjouir Washington, s'opéreraient dans le monde.

Premièrement, le «marché premium du GNL en Asie» disparaîtrait ou se réduirait considérablement parce que la Russie comblerait la majeure partie des besoins des importateurs asiatiques grâce au gaz de pipeline bon marché. A l'heure actuelle, le GNL coûte en Asie, en fonction de la conjoncture de marché, 20 à 50% de plus qu'en UE, et c'est ce marché qui intéresse les compagnies gazières américaines dont les intérêts sont activement promus par Donald Trump. Ces compagnies n'arrivent pas à se faire à l'idée que les revenus qu'elles considèrent déjà comme leurs (on parle ici de milliards de dollars) partiront dans les caisses de Gazprom.

Deuxièmement, si la Russie garantissait aux économies asiatiques un accès aux hydrocarbures bon marché, elles recevraient un grand avantage dans les guerres économiques contre les USA qui cherchent actuellement à tirer le maximum de leurs propres ressources énergétiques.

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Troisièmement, Washington pense à juste titre que l'«habitude» de l'UE d'importer du gaz russe explique une certaine influence de Moscou sur les pays européens, sans laquelle un rideau de fer total serait dressé depuis longtemps à la frontière Russie-UE. C'est un cauchemar pour tout diplomate américain que d'imaginer la Russie exercer la même influence en Asie du Sud-Est.

Les opposants occidentaux ne savent pas encore comment faire face à ces risques, mais on peut dès à présent prédire leur décision principale: les sanctions. D'ailleurs, le New York Times a déjà annoncé que les USA préparaient des sanctions contre la Chine pour «violation des droits de l'homme dans la lutte contre le terrorisme ouïghour». Il faut donc s'attendre à l'élargissement du club des pays frappés par les sanctions américaines.

Toutefois, plus Washington prendra de décisions irréfléchies, plus nombreux seront les alliés potentiels qui tendront la main à Moscou.

Les opinions exprimées dans ce contenu n'engagent que la responsabilité de l'auteur.

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