Les dernières déclarations de Boris Johnson appelant au boycott de la Coupe du Monde de football qui aura lieu en Russie ont fait grand bruit. Le ministre des Affaires étrangères britannique est au cœur d'une polémique après avoir rapproché Poutine et la Coupe du Monde de cet été d'Hitler et des Jeux olympiques de Berlin en 1936 pour justifier le boycott britannique. Un point Godwin au plus haut sommet de l'État, en somme.
Boris Johnson trouve «juste» de dire que Poutine pourrait utiliser la Coupe du monde comme Hitler a utilisé les JO de 1936 | Europe — https://t.co/X7zTsVXH86 https://t.co/p6mXbSzL0N
— Jaume S. Regàs (@JaumeRegas) 22 марта 2018 г.
Le 14 mars dernier, Theresa May annonçait en effet devant le parlement britannique un boycott diplomatique de la Coupe du Monde. Les médias se sont tout de suite emparés de l'affaire et, à coup de grands titres, le boycott diplomatique est devenu un boycott ou serait en passe de devenir un boycott massif. Le coup de communication a fonctionné, mais le gouvernement britannique n'est pas à l'abri de faire un bide… comme à l'époque l'appel au boycott des JO de 1936.
Car un boycott pur et simple —c'est-à-dire le retrait de la sélection d'Angleterre de la compétition- n'est ni envisagé, ni envisageable pour la Première ministre. Un peu plus de 26.000 supporters anglais feront le déplacement en Russie et ont engagé, pour la plupart, d'importantes sommes d'argent pour encourager leur équipe. De plus, les sanctions qu'imposerait la FIFA à la sélection aux trois lions pourraient l'écarter de toute compétition internationale pendant plusieurs années.
«La non-venue des dignitaires anglais n'aura pas d'impact sur la qualité du tournoi», estimait Alexeï Sokorine, président du comité organisateur de la Coupe du Monde.
Le boycott diplomatique du Royaume-Uni est «sans impact» sur la Coupe du monde https://t.co/2cYCo8vacQ pic.twitter.com/X4FWaP5l8J
— LesoirSports (@LesoirSports) 14 марта 2018 г.
Y a-t-il une chance que ce boycott diplomatique se généralise? Rien n'est moins sûr. À en croire de nombreux médias, l'Ukraine, la Pologne, l'Australie, le Japon, la France, l'Allemagne, l'Islande, la Suède, le Danemark et les États-Unis seraient prêts à emboîter le pas à Londres et à ne pas envoyer de représentants politiques à Moscou.
Les États-Unis: les absents pro-boycott
Commençons donc par le plus simple. Les États-Unis ne se sont pas qualifiés à l'issue des matchs éliminatoires de leur confédération et ne sont, de ce fait, pas conviés aux célébrations de la Coupe du Monde 2018. Qu'ils se prononcent pour un boycott diplomatique ne change donc absolument rien.
La Pologne: l'antirusse traditionnel
Si le Président polonais, M. Duda, a indiqué par l'intermédiaire de son chef de cabinet qu'il avait «pris la décision de ne pas participer comme représentant de la Pologne à la Coupe du Monde», il n'a en revanche à aucun moment annoncé de boycott diplomatique, ni n'a enjoint ses ministres à bouder la compétition.
La France: le silence est d'or
En France, aucune personnalité politique de premier plan, de la majorité ou de l'opposition, n'a réclamé de boycott diplomatique et bien que le gouvernement ait annoncé sa solidarité avec les Britanniques, il n'a en revanche pas communiqué sur le sujet. On peut donc en déduire qu'il s'agit tout au plus d'une hypothèse à l'heure actuelle.
L'Allemagne: l'abstention en son nom et celui de l'UE
«Nous aborderons le sujet durant le Conseil européen, mais n'est pour l'instant pas question d'un boycott de la Coupe du Monde de football.»
L'Ukraine: le soutien au boycott plus qu'à Londres
Les autres cas sont plus complexes, car plus nuancés. L'Ukraine, par exemple, s'est prononcée en faveur d'un boycott à travers son Président, Petro Porochenko. Mais ce dernier évoquait la possibilité d'un boycott et ne déclarait à aucun moment que son pays allait boycotter, d'une manière ou d'une autre, la Coupe du Monde 2018.
La Suède et le Danemark: l'indécision scandinave
Ensuite, la Suède et le Danemark n'ont pas écarté l'hypothèse d'un boycott diplomatique. Le porte-parole du ministère des Affaires étrangères suédois, Per Enerud, évoquait «beaucoup d'idées que nous étudions», parmi lesquelles un éventuel boycott diplomatique. Copenhague, sur la même ligne, informait l'AFP qu'il s'agissait d'une des mesures à l'étude et qu'aucune décision n'avait été prise. Tout est possible, mais rien n'est fait en somme.
Le Japon: la grande inconnue
Concernant le Japon, de nombreux articles reprennent le Sun du 10 mars faisant état d'un potentiel soutien japonais au boycott diplomatique britannique, mais cette information n'a pu être ni confirmée ni infirmée et le mystère sur la position japonaise reste entier actuellement.
L'Australie: le flou de l'allié du Commonwealth
L'Islande: le «pion d'une guerre politique»
L'Islande, quant à elle, a reconnu se concerter avec ses alliés scandinaves et britanniques sur la possibilité de ne pas envoyer de représentation diplomatique en Russie, mais le ministre des Affaires étrangères, Gudlaugur Tor Torgeson expliquait à la chaîne de télévision RUV qu'aucune «décision n'a été prise sur le fait que des membres du parlement islandais assistent à la Coupe du Monde».
Et, en effet, la question de la participation se pose. Après un Euro réussi, il estime que la Coupe du Monde est «une opportunité unique» et qu'
«il est important que nous profitions de cette opportunité maintenant que nous avons éveillé tant d'intérêt pour notre pays et pour ce que nous avons à offrir.»
Mikhail Degtyarev, le Président du comité parlementaire pour le sport, regrettait à l'avance un éventuel boycott islandais. Il se disait «désolé» que les officiels risquent de ne pas pouvoir encourager leur sélection nationale et observait:
«Il est triste de voir l'Islande devenir le pion d'une guerre politique et informationnelle contre la Russie.»