Les USA, la France, le Royaume-Uni, Israël et l'Ukraine ont voté contre, informe le site de la chaîne Russia Today (RT). L'Assemblée générale compte lancer les pourparlers pour élaborer un document juridiquement contraignant sur la démilitarisation de l'espace. La résolution n'a pourtant aucune chance d'être adoptée au Conseil de sécurité des Nations unies, dont trois États membres permanents ont voté contre. Pourquoi Washington bloque-t-il les tentatives d'interdire le déploiement d'armes dans l'espace?
Le document a été soutenu par les représentants de 121 États avec 45 abstentions (essentiellement des diplomates de pays européens). Les représentants des USA, de la France, du Royaume-Uni, d'Israël et de l'Ukraine se sont prononcés contre.
Les auteurs de la résolution appellent instamment à ouvrir immédiatement les négociations sur la mise au point d'un document juridiquement contraignant qui interdirait de déployer des armes dans l'espace.
La Première Commission a également approuvé plusieurs autres résolutions concernant la démilitarisation de l'espace. D'après l'information publiée sur le site de l'Onu, les documents ont été initiés par la Russie et les USA n'en ont approuvé aucun.
Le représentant de Washington s'est notamment opposé au projet de résolution interdisant «le déploiement en premier d'armes dans l'espace».
Des démarches irresponsables
La Russie a attiré l'attention de la commission sur l'importance de préserver l'espace extra-atmosphérique afin de pouvoir continuer à effectuer des recherches purement pacifiques. D'après Moscou, des mesures irresponsables ont été entreprises dans le secteur spatial par le passé, qui ont poussé le monde au seuil de la catastrophe, souligne le site de l'Onu.
Comme l'a expliqué le représentant de la délégation américaine au sein de la Première Commission, les résolutions ne donnent pas de définition suffisamment claire des armes qui doivent tomber sous le coup de l'interdiction.
D'après Washington, les armements antisatellites terrestres (qui seraient à disposition de la Russie et de la Chine, comme sont persuadés les USA) ne correspondent pas aux «exigences de transparence et de confiance». C'est pourquoi il est nécessaire d'instaurer un régime d'inspection des systèmes antisatellites.
Le représentant américain au sein de la commission a déclaré que la résolution interdisant le «déploiement en premier d'armes dans l'espace» n'était pas dans l'intérêt des USA en matière de sécurité. Il a noté que Washington était prêt à évoquer au niveau des experts gouvernementaux les paramètres d'un éventuel accord avec Moscou et Pékin sur la démilitarisation de l'espace.
Des craintes réciproques
Les résultats du vote des représentants des USA, du Royaume-Uni et de la France à l'Assemblée générale des Nations unies indiquent que la résolution n'a aucune chance de passer au Conseil de sécurité, dont ces trois pays occidentaux sont membres permanents.
La militarisation de l'espace est une composante de la mise en place de la défense antimissile globale des USA (ABM). Le Pentagone y travaille depuis 1983 dans le cadre du programme Initiative de défense stratégique (IDS), qui vise à mettre au point un système de défense antimissile avec des éléments installés dans l'espace.
Les USA comptaient développer une arme fonctionnant selon des «principes physiques différents». Avec la fin de la Guerre froide, l'IDS a été gelé mais le Pentagone n'a pas suspendu les travaux de développement sur la création d'armes spatiales.
Comme le rapportent les médias américains, Moscou et Pékin craignent particulièrement le laboratoire volant américain Boeing X-37, qui rappelle le vaisseau soviétique Bouran.
Le commandement américain ne dévoile pas les missions que remplit cet avion unique. Les experts russes supposent que le Boeing X-37 peut être utilisé pour le renseignement, par exemple pour inspecter les satellites et éventuellement les mettre hors service.
Les spécialistes militaires occidentaux sont persuadés que Moscou et Pékin ont considérablement avancé dans le développement d'armements antisatellites terrestres. Ils prétendent que la Russie teste le missile antisatellite PL-19 Noudol, et la Chine le missile extra-atmosphérique Dong Neng-3 (DN-3).
Selon les prévisions de l'Institut international d'études stratégiques (IISS), la course aux armements spatiaux continuera de prendre de l'ampleur. Les analystes annoncent que le nombre de satellites militaires sera supérieur à mille d'ici 2020. A l'heure actuelle, les USA disposent de 127 satellites différents contre 94 pour la Russie et 72 pour la Chine.
La bataille pour l'espace
L'expert militaire Iouri Knoutov souligne que de facto, le contrôle de l'espace extra-atmosphérique permet de suivre la situation dans toute région du monde, et que le déploiement d'armes en orbite offre la possibilité d'infliger des dégâts maximaux à un grand nombre de cibles dans les plus brefs délais.
«En réalité, les USA n'ont pas suspendu leurs travaux sur l'IDS et aujourd'hui nous voyons apparaître certains fruits de ce programme. Les Américains travaillent à la création d'un éventail de moyens, notamment d'armes cinétiques, laser et à faisceau dirigé pour éliminer rapidement des objectifs au sol et en orbite», précise Iouri Knoutov.
Il ajoute que les USA n'abandonneront pas leur position de leader dans le domaine de la conquête militaire de l'espace et refuseront de négocier sur la démilitarisation. Cependant, la Russie et la Chine disposent de ressources pour faire face au Pentagone — même si à l'heure actuelle les forces ne sont pas égales.
«Aujourd'hui Moscou et Pékin ont du retard sur les USA, mais si une vraie course aux armements démarrait, la Russie saurait tenir le coup au prix de certaines difficultés. Sur différentes élaborations techniques dans le secteur spatial, la Russie pourrait parfaitement dépasser les USA et la Chine. Mais, évidemment, notre pays cherche à éviter un tel scénario», note le spécialiste.
Iouri Knoutov pense que les USA cherchent à attirer la Russie dans une course aux armements. Selon lui, Moscou entreprend les bonnes démarches en soulevant le débat à l'Onu sur la nécessité de démilitariser l'espace.
«L'espace doit être pacifique. La destruction de satellites entraînerait de graves conséquences pour nous tous puisque beaucoup de choses dépendent d'eux. Tôt ou tard, les USA et leurs alliés apparaîtrons comme des pays agresseurs s'opposant à une conquête pacifique et conjointe de l'espace», conclut l'expert.
Les opinions exprimées dans ce contenu n'engagent que la responsabilité de l'auteur de l'article repris d'un média russe et traduit dans son intégralité en français.