Ces dernières années, les défenseurs des droits de l'homme exigent pourtant que les États-Unis ferment ce «centre de détention des terroristes». Barack Obama a promis de le faire, mais n'a pas tenu sa parole. Sputnik vous offre un regard sur les conditions de vie des détenus de la prison secrète la plus célèbre du monde et sur son avenir sous la présidence de Donald Trump.
On suspectait Shaker Aamer du « recrutement de nouveaux mercenaires, du financement du terrorisme et de la collaboration avec Al-Qaïda». Les affirmations concernant le fait qu'Aamer était pratiquement le bras droit d'Oussama ben Laden, se fondaient sur le témoignage d'un autre détenu, qui était informateur de l'administration de la prison. En février 2002 Aamer a été transféré à Guantanamo, où il a passé, selon lui, deux ans et dix mois dans une cellule solitaire. «En fin de compte je me suis mis à parler à tous les êtres vivants dans la cellule, notamment aux fourmis », indiqué-t-il, soulignant que le nombre des séances de torture pouvait atteindre 300 par an. Il a comparé Guantanamo à Azkaban des livres sur Harry Potter: «Il n'y a aucune joie sur l'île d'Azkaban. On suce ta vie et tu ne peux plus rien sentir.» Certaines séances de torture utilisaient le bruit blanc ou la musique assourdissante. Pour faire face à cette dernière Aamer chantait avec les artistes.
Suite à son investiture en 2009, Barack Obama a signé le décret ordonnant de fermer la prison au cours d'un an. Pourtant, il s'est avéré plus tard qu'il était impossible de transférer tous les détenus à d'autres prisons pendant une période aussi limitée. Quoi qu'il en soit, les autorités ont déjà lancé leur envoi vers les États-Unis et d'autres pays pour qu'ils se présentent devant les tribunaux militaires.
Shaker Aamer, traducteur arabe-anglais, est devenu la «voix des détenus de Guantanamo». C'est lui qui présidait le conseil local de l'examen des plaintes des détenus et a forcé les gardiens à tenir compte des Conventions de Genève. L'administration a même consenti à changer le menu après qu'il a arrêté la grève de faim massive chez les prisonniers. Le refus de manger a été le moyen principal de protestation des détenus: si en mars 2013 cela concernait 28 des 166 prisonniers, ce chiffre a atteint 102 personnes deux mois plus tard. Les gardiens nourrissaient certains détenus de manière forcée, à l'aide d'un tube.
Shaker Aamer aurait dû être libéré et transféré en Arabie saoudite encore en 2007, mais ses avocats insistaient sur son retour en Grande Bretagne, chez sa femme et ses quatre enfants. D'abord, le gouvernement britannique refusait de négocier cette requête, mais le ministre des Affaires étrangères David Miliband a envoyé en 2007 la demande de libération d'Aamer et de quatre autres détenus. Shaker Aamer est revenu au Royaume-Uni le 30 octobre 2013 après avoir passé plus de 13 ans à Guantanamo.
Le nouveau président américain Donald Trump a dénoncé beaucoup d'initiatives de l'administration d'Obama, notamment son idée de fermer le camp de Guantanamo. Il s'est prononcé contre la libération des détenus encore en 2014, avant le lancement de la course électorale. «Beaucoup de détenus libérés de Guantanamo sont actuellement engagés dans les rangs de Daech ou d'autres groupes hostiles. Nous avons besoin d'un leader fort avant qu'il ne soit trop tard», a-t-il écrit sur Twitter.
Il a confirmé cette position à la veille de son investiture. En tant que président, Trump a considéré la décision de libérer les détenus comme «terrible», car 122 d'eux ont repris, selon lui, le combat. Lors de sa campagne électorale en 2016 il a promis de «remplir à fond la prison des méchants». Devenu chef d'État, il a signé la loi interdisant le transfert des détenus de Guantanamo aux prisons américaines ou dans les pays tiers.
Le camp de Guantanamo reste toujours actif: selon les données d'août 2017, il y a encore là-bas 41 prisonniers, dont seulement sept font face à des accusations officiellement formulées, alors que trois sont détenus en faveur d'une décision du tribunal ou d'un aveu de culpabilité.
Les défenseurs des droits de l'homme organisent régulièrement en janvier dans le monde entier des manifestations exigeant de fermer la prison. Ainsi, l'ONG Human Rights Watch a plus d'une fois appelé le gouvernement américain à lancer les procès des détenus aux USA ou à les transférer dans les pays tiers. Les militants soulignent successivement les fautes du camp de Guantanamo: les détenus se trouvent hors de la juridiction américaine; pratiquement tous les prisonniers ont subi des tortures et des humiliations ce qui constitue une violation du droit humanitaire international et des lois militaires; la détention se basait sur des fait non-confirmés; les dossiers des détenus de Guantanamo étaient examinés par des commissions militaires intérieures, dont l'organisation ne correspondait pas aux standards internationaux; de nombreux prisonniers restent en détentions sans accusations officielles, ni procédure judiciaire appropriée.