Un nouvel acteur se joint au règlement du conflit diplomatique qui a éclaté entre la Turquie et l'Allemagne, comme en témoigne la déclaration de Jens Stoltenberg. La semaine dernière, il a proposé d'aides les députés allemands à visiter la base militaire turque de Konya: des soldats allemands participant à l'opération de l'Alliance contre les terroristes islamiques en Syrie voisine y sont déployés, mais les autorités turques ont refusé aux députés allemands le droit de rendre visite à leurs concitoyens.
«Le secrétaire général tente de trouver une solution et propose d'organiser une visite pour les députés à la base aérienne de Konya au sein d'une délégation de l'Otan», a déclaré le porte-parole de l'Alliance Piers Cazalet, en rappelant que la base de Konya était «vitale» pour la lutte contre le terrorisme. Ankara n'a pas encore donné une réponse officielle. Le ministère turc des Affaires étrangères a déclaré ne faire aucun commentaire à ce sujet. Par ailleurs, le membre de la délégation turque au sein de l'Assemblée parlementaire de l'Otan Aydın Ünal, député du parti Justice et Développement, a déclaré que son pays était prêt à accueillir les députés allemands «si tout se déroulait dans le cadre légal et conformément au traité de l'Otan». Et d'ajouter: «Mais c'est à notre président et au premier ministre de prendre une décision définitive».
Sachant que plus tôt Berlin a déjà décidé de retirer son contingent d'une autre base militaire en Turquie — Incirlik. Et ce, pour la même raison: les autorités du pays refusaient aux députés allemands le droit de visiter l'aérodrome.
Toutefois, même si la médiation de l'Otan était efficace, le conflit entre Berlin et Ankara ne serait pas clos. Depuis mi-juillet les relations se sont détériorées à tel point que l'ambassadeur turc a été convoqué par le ministère allemand des Affaires étrangères. La police turque a arrêté au total 22 citoyens allemands soupçonnés de complicité avec les terroristes, dont 9 restent en détention.
Selon le politologue Timour Akhmetov, expert du Conseil russe pour les affaires internationales, qui réside à Ankara, l'intervention de Jens Stoltenberg pourrait pousser la Turquie à accepter la visite des députés, mais pas dans l'immédiat.
«Si Ankara laissait entrer les députés tout de suite, le retournement à 180 degrés de la position des autorités pourrait sérieusement nuire à l'image du parti au pouvoir et du gouvernement, estime le politologue. Cela signifierait que toute la confrontation précédente était vaine.»
Et de poursuivre: les autorités turques pensent que la position de Berlin s'explique par des raisons politiques internes — les législatives qui approchent. «Les citoyens turcs ordinaires ne comprennent vraiment pas pourquoi l'Allemagne et les autorités de l'UE critiquent leur pays pour les méthodes choisies pour lutter contre le terrorisme, déclare Timour Akhmetov. La menace émanant du mouvement du prédicateur islamique Fethullah Gülen (considéré par Ankara comme l'inspirateur de la tentative de coup d'Etat militaire du 15 juillet 2016), selon eux, est parfaitement réelle.» Le président turc Recep Tayyip Erdogan a réagi à ces accusations en accusant à son tour Berlin du «deux poids deux mesures», de pression et de menaces, et a déclaré que l'Allemagne «envoie d'abord des espions dans le pays, puis se plaint de leur arrestation».
A deux mois des législatives prévues pour le 24 septembre en Allemagne, la confrontation avec Ankara s'est effectivement transformée en l'un des principaux thèmes de la campagne électorale. Le leader des sociaux-démocrates Martin Schulz a exigé de la chancelière Angela Merkel non seulement de condamner fermement Ankara, mais également de cesser d'ignorer un autre problème — l'affluence incessante de réfugiés et de migrants clandestins dans le pays. Selon les informations officielles, au premier semestre 2017 deux fois moins de réfugiés ont été enregistrés en Allemagne par rapport à la même période en 2016, et huit fois moins qu'en 2015. Cependant, cela représente tout de même plus de 90.000 personnes. Encore 111.000 personnes ont déposé de nouvelles demandes d'asile.
Etant donné que le flux principal de réfugiés arrivés en Allemagne transitait par la Turquie, la rupture avec ce pays pourrait engendrer des difficultés supplémentaires dans les tentatives de limiter le nombre de migrants. Aucun des candidats à la chancellerie ne peut se permettre de se brouiller complètement avec Ankara.
«En dépit de tous les différends, la Turquie reste un partenaire important pour l'Allemagne, notamment dans les domaines comme la politique de sécurité, la lutte contre le terrorisme, la politique d'asile et la coopération économique», rappellent dans leur dernière note analytique les experts de la DGAP, Société allemande de politique étrangère.
«Avec la popularité du SPD de 22-25% la seule possibilité pour Gabriel et Schulz pour rester au pouvoir consiste à préserver une grande coalition avec la CDU sous la direction d'Angela Merkel», écrit le quotidien Frankfurter Allgemeine Zeitung. Il serait plus facile pour les sociaux-démocrates de conclure un accord de coalition avec la CDU affaibli.
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