Les ouvriers du bâtiment polonais devront-ils obligatoirement parler la langue de Molière sur les chantiers français? C'est en tout cas ce que propose la clause éponyme.
La « sécurité sur le lieu de travail » et la lutte contre le dumping social sont-elles les vraies raisons de cette « clause Molière », adoptée en urgence par la région Ile-de-France qui a voté un « Small Business Act »? Est-ce que la nouvelle carte d'identité professionnelle du BTP qui sera généralisée à partir du 22 mars à toutes les personnes qui travaillent sur les chantiers est une réponse dans la lutte contre le travail au noir?
Étienne Deschamps, juriste de la Confédération Nationale des Travailleurs — Solidarité Ouvrière, présente son point de vue, qui est bien différent de celui du député frontiste M. Bouchet. Pour lui, il s'agirait plutôt d'un coup médiatique et non pas d'une directive nationale.
« Il n'y a aucun projet de loi gouvernemental sur cette disposition. C'est une mesure prise en premier par le président de la région Rhône-Alpes — Auvergne qui a décidé de faire un coup médiatique en disant "dorénavant, il va falloir parler français sur les chantiers dans la région" », a-t-il déclaré à Sputnik.
Le délégué syndical a également souligné que cette initiative serait contraire aux valeurs de l'Europe.
« On est sur les valeurs de la discrimination raciale de la pire espèce qui n'a aucun justificatif en termes de sécurité, parce qu'on a toujours les coordinateurs sécurité sur les chantiers qui maîtrisent parfaitement ces situations, il y a toujours un leader pour réguler les choses », a tranché le représentant syndical.
Alors que l'idée de la clause « Molière » survient en pleine campagne électorale, Gauthier Bouchet, député FN de Saint-Nazaire, donne son opinion sur la question à Sputnik.
« La "clause Molière" est un premier pas qui permet de rétablir la primauté de la langue française sur les chantiers. Un premier pas intéressant, mais nettement insuffisant. Ce qu'il faut faire — c'est une sortie complète des institutions européennes, de l'UE, singulièrement — de cette directive du détachement des travailleurs qui contraint les travailleurs français », explique M. Bouchet.
Pour lui, le problème des travailleurs étrangers et de leur présence sur les chantiers en France va bien au-delà du simple souci de sécurité qui était évoqué car les travailleurs étrangers viennent concurrencer la main d'œuvre française sans contribuer au système de protection sociale du pays.
D'ailleurs, pour M. Bouchet, cela ne concerne pas seulement la France mais aussi tous les pays d'Europe centrale et orientale.
En même temps, le député soulève le problème de l'insertion française dans le système européen qui, selon lui, serait plutôt nuisible pour la France, qui perd petit à petit sa souveraineté, notamment dans les domaines de l'économie et de l'industrie.
« La France ne fait qu'appliquer les GOPE [Grandes Orientations de Politique Économique, ndlr], annuellement émises par la Commission Européenne. Tant que nous resterons soumis à cet échelon supranational, nous ne serons pas souverains dans nos lois et continuerons à nous exposer volontairement aux directives comme celle du détachement des travailleurs », conclue le député.
La clause de langue française, dite clause « Molière », est une mesure qui vise à imposer l'usage du français sur les chantiers publics. L'objectif affiché de cette initiative serait d'améliorer la communication entre les différents intervenants notamment en matière de sécurité ou d'exécution des tâches. Selon certaines organisations syndicales et personnalités politiques, elle viserait surtout à restreindre l'accès des travailleurs détachés au marché du travail français et constituerait ainsi une discrimination.
Le nom communément donné à cette clause fait référence à la périphrase désignant la langue française comme « la langue de Molière ».
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