Rapport Fotyga : l’UE alimente une nouvelle guerre froide

© AFP 2024 Frederick FlorinСкульптура "Сердце Европы" напротив здания Европарламента в Страсбурге
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Le rapport du député européen Anna Fotyga contre la « propagande des pays tiers » a été adopté au parlement européen, à 304 voix contre 179. Une majorité moins écrasante que nous ne l’attendions. Plusieurs députés se sont fait remarquer par leur opposition à ce texte.

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Daesh n'a pas été mentionné une seule fois durant les explications du vote qui ont suivi l'adoption du rapport Fotyga, à 304 voix contre 179. C'est donc la Russie qui a été la seule et unique cible des attaques. Sputnik a d'ailleurs été mentionné en plein hémicycle par le député britannique Steven Woolfe, qui a voté contre le texte. En fait, c'est l'auteur de science-fiction George Orwell qui était sur toutes les lèvres, cité pour son roman 1984 : partisans et opposants du rapport se sont accusés mutuellement de céder à la propagande.

« Le même phénomène se passe aujourd'hui, a déclaré la Roumaine Monica Macoveï, qui accusait la Russie d'attaquer l'Europe "par le biais de la propagande" ». Comme Anna Fotyga, les partisans du rapport demeurent engoncés dans une loi d'airain de l'histoire : « reconnaissons que l'histoire est susceptible de se reproduire », poursuivait Macoveï. « La guerre dure », ajoutait le polonais Marek Jurek.

Une majorité moins écrasante

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Pourtant, des voix se sont élevées, d'ailleurs plus nombreuses que les estimations qu'avançaient le 22 novembre Jean-Luc Schaffhauser (Front National) ou le député letton Tatiana Zdanocka (Verts). Virulent contre ce rapport mais pessimiste quant à l'issue du vote, Schaffhauser nous déclairait qu'une centaine de députés s'y opposeraient

Une majorité moins écrasante que prévu en faveur de cette résolution, donc. D'autant plus que la règle en vigueur au sein de l'Hémicycle strasbourgeois veut qu'aucun eurodéputé ne votecontre la consigne de son groupe parlementaire. Seul moyen d'assouplir cette discipline parlementaire : s'abstenir. Il semblerait donc qu'un certain nombre des 268 abstentionnistes soient en fait critiques à l'égard du rapport d'Anna Fotyga, sans qu'on puisse bien sûr les évaluer avec précision. Car le nombre considérable d'abstention ne peut s'expliquer par les seuls députés non-inscrits, au nombre de 17.

En tout état de cause, les débats ont vu des arguments intéressants fuser dans l'hémicycle : «  [ce rapport] est le signe de l'effondrement de la civilisation occidentale : je ne veux pas qu'une administration réglemente la pensée », déclarait Michal Marusik, Polonais du groupe Europe Nations et Libertés, estimant là que le vote est un pas décisif vers le contrôle de l'information au sein de l'UE.

Alimenter une nouvelle guerre froide

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Le Bulgare Momchil Nekov, de l'Alliance progressiste, a de son côté souligné que le texte « s'oppose à un partenaire global et (…) contribuera à remettre en question notre relation bilatérale ». Plus mordant, le Britannique Jonathan Arnott s'est amusé à déclarer que « les fonds des contribuables ne devraient pas être utilisés pour cela » avant d'ajouter : « on pourrait utiliser une partie des fonds pour lutter contre la propagande pro-européenne ». Et puis enfin Diane James, elle aussi britannique : selon elle, ce rapport « adopte une position agressive contre la Russie, ignorant tous les autres pays qui sont aussi coupables ». « L'Union doit cesser d'aggraver les relations avec la Russie, ce n'est pas très constructif d'alimenter une nouvelle guerre froide », a-t-elle conclu.

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En définitive, le Parlement européen ne semble pas sortir grandi de ces débats, de ce rapport et de ce vote. Les partisans de Mme Fotyga évoquaient les « millions de dollars » du Kremlin ou de Vladimir Poutine, et ce pour les opposer au budget selon eux dérisoire de Stratcom, l'organe de communication externe de l'UE, doté de un million d'euros. Mais cela a-t-il un sens ? Les moyens considérables des médias dominants, favorables à l'Europe de Bruxelles, n'ont pas été évoqués. Anna Fotyga et ses alliés renversent en fait totalement le rapport de force asymétrique entre les adversaires de la Russie et celle-ci.

Plus encore, ceci révèle la logique fallacieuse du rapport, qui au-delà d'une hostilité délibérée, voile difficilement certains: Bruxelles veut en réalité augmenter le budget de son propre organisme — que les eurosceptiques ne manquent pas de qualifier « de propagande ». Somme toute, l'UE semble se rigidifier, se crisper, réagir à sa manière et avec maladresse à la contestation à son encontre, qui se fait de plus en plus vive depuis au moins une décennie.

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