Amir (le nom a été changé à la demande de l'intéressé) et l'une des rares personnes qui a réussi à quitter la zone avant qu'elle ne soit entièrement bloquée. Membre du conseil populaire d'Al-Foua et Kefraya, notamment de la communauté chiite les peuplant, lui et ses camarades consacrent désormais tout leur temps pour sauver la vie de ceux qui y restent.
"C'est très rare que nous contactions les nôtres. Les communications sont coupées. C'est par le biais de nos propres réseaux que nous avons de leurs nouvelles, souvent en achetant des informateurs", avoue-t-il à un correspondant de RIA Novosti.
Le dernier assaut terroriste contre les villes date de 2012. Ils étaient des milliers. Pour percer la ligne de résistance, ils ont même employé un véhicule blindé chargé d'explosifs. Appuyés par l'aviation syrienne, les habitants locaux ont alors réussi à dévier l'attaque.
Mort pour un "islam incorrect"
"Ils considèrent que nous (les musulmans chiites, ndlr) sommes des hérétiques et méritons la mort. S'ils s'emparent d'Al-Foua et de Kefraya, ils exécuteront tous les habitants pour la simple raison que nous ne sommes pas sunnites", relate-t-il.
En 2015, 50 personnes, principalement des blessés et des enfants, ont été échangés contre des terroristes de Madaya (près de la frontière libanaise). Un autre échange a eu lieu le 8 septembre et concernait onze personnes.
Politique de l'autruche
Actuellement, c'est la situation humanitaire dans la ville d'Alep qui attire toute l'attention de la communauté internationale. Entre 200.000 et 300.000 civils y vivent dans les zones contrôlées par les terroristes. La dernière fois que le Croissant-Rouge syrien leur a livré de l'aide humanitaire était fin juillet.
Avec le concours du gouvernement syrien, la Russie a mis en place des corridors humanitaires par le biais desquels les civils peuvent quitter les zones occupées. Or, rares sont ceux qui osent les emprunter par peur de recevoir une balle de la part des terroristes.
"A Al-Foua et Kefraya, les gens ont perdu tout espoir. Les nôtres sont sous le blocus depuis plus de trois ans et tout le monde s'en fout", affirme Amir.
"Je ne peux pas comprendre pourquoi ni l'Onu, ni l'Occident ne soulèvent la question d’aider nos villes? Sommes-nous des sous-hommes?", s'exclame-t-il.
Des milliers d'enfants sous le blocus et l'absence de soins médicaux
Amir avoue que les villes assiégées souffrent d’une pénurie de médicaments. "Il ne reste même pas d'antiseptiques élémentaires. Avec l'absence d'hygiène, les blessures pourrissent et le sepsis emporte la vie de nombreuses personnes", explique Amir.
"Depuis le début du blocus, 2.200 personnes ont péri à Al-Foua et Kefraya, dont 400 enfants et 850 femmes. Plus de 4.500 personnes sont blessées et risquent de mourir", poursuit le Syrien et montre des photos prises dans les villes occupées. Elles présentent des scènes affreuses.
Tout espoir se dissipe
Les forces gouvernementales ont entrepris de nombreuses tentatives de lever le blocus des deux villes. En novembre dernier, les milices populaires et l'armée syrienne sont parvenues à s'approcher à 30 km des deux communes. Mais elles n'ont pas pu aller plus loin.
"Nos villes essuient quotidiennement près de 1.500 bombes. Parfois, les terroristes tirent sur nous jusqu'à 3.000 obus et roquettes. D'où attendre l'aide?", regrette Amir.
Les habitants d'Al-Foua et de Kefraya guettent la levée du blocus, mais chaque jour leurs espoirs se dissipent.