En cédant face au président de Turquie Recep Tayyip Erdogan, la chancelière allemande Angela Merkel s'est engagée sur la voie de la "capitulation morale", écrit l'observateur du Wall Street Journal (WSJ) Bret Stephens.
Selon le WSJ, Mme Merkel avait toutes les raisons légales de mettre un terme à l'affaire, mais elle a sacrifié le satiriste afin de calmer Erdogan, garant du marché entre la Turquie et l'Union européenne. Un marché qui, selon les calculs de la chancelière, pourrait arrêter l'afflux de migrants en Europe.
"Une légère dérogation aux principes débouche d'ordinaire sur des concessions plus graves. La justice pourrait disculper M. Böhmermann, mais Erdogan sait désormais qu'il n'y a rien de plus malléable qu'un homme (ou une femme) politique européen tâchant d'éviter un choix difficile. Aussi recherchera-t-il de nouveaux moyens d'imposer sa volonté et ses valeurs à une Europe conciliante", estime l'auteur du WSJ.
Cela concerne au premier chef Angela Merkel, dont la décision est, de fait, une trahison des valeurs libérales qu'elle défend en paroles.
Les sociaux-démocrates allemands et les socialistes français, notamment les chefs de file de ces derniers François Hollande et Manuel Valls, se sont opposés à la décision de la chancelière en déclarant qu'il fallait défendre la liberté d'expression et les autres valeurs fondamentales de l'Etat laïc.
Recep Tayyip Erdogan n'a pas tardé à poursuivre Jan Böhmermann en justice. Le gouvernement allemand a cédé et a finalement autorisé des poursuites pénales contre le journaliste. M.Böhmermann est notamment accusé d'avoir violé l'article 103 du code pénal allemand ("Offense aux organes et représentants d'Etats étrangers") et risque trois ans de prison.