Les implications du rejet de l'accord
La question posée était donc de savoir si les électeurs hollandais approuvaient ou non l'accord d'association. De fait, les électeurs hollandais ont rejeté cet accord d'association par une large majorité (64% des votants). Mais dans le même temps, le gouvernement hollandais, et les institutions de l'Union européenne, ont affirmé qu'ils ne seraient pas tenus par le résultat de ce référendum. Certes, et on l'a dit, le vote n'avait qu'une portée consultative. Mais, la réaction des autorités, tant européennes que hollandaises, est de ce point de vue exemplaire. Elle vient confirmer ce que nous savions déjà avec le comportement de ces mêmes autorités tant par rapport au référendum de juillet 2015 en Grèce, que lors des différents votes en France et au Pays-Bas en 2005.
Les autorités européennes prises au piège
Le président du Conseil européen, Donald Tusk a donc « pris note », jeudi 7 avril, du non des électeurs néerlandais. Il a indiqué qu'il entendait « poursuivre [ses] contacts » avec le Premier ministre des Pays-Bas, M. Mark Rutte sur ce sujet: « j'ai besoin d'entendre quelles conclusions lui et son gouvernement vont tirer du référendum et quelles seront ses intentions ». Clairement, il entend faire peser tout le poids de la décision sur les épaules du gouvernement hollandais. En janvier dernier, le Président de la Commission européenne, M. Jean-Claude Juncker, avait prévenu qu'un « non » pourrait conduire à ce qu'il appelait « une crise continentale ». Ceci équivalait à avouer l'importance du référendum. Jeudi, il s'est dit « triste », selon un porte-parole. Quant aux conséquences du vote, « il appartient désormais avant tout au gouvernement néerlandais d'analyser les résultats et de décider de la marche à suivre ». Comme Donald Tusk, il rejette la responsabilité de ce qui pourrait survenir sur le gouvernement néerlandais. Mais, on voit bien que le problème ne pourra être cantonné aux seuls Pays-Bas. Que les autorités européennes acceptent de tenir compte de ce référendum, et c'est toute leur stratégie, tant à l'intérieure de l‘UE qu'à l'extérieur qui en sera fragilisée de manière décisive. Qu'ils décident de n'en pas tenir compte et ils offrent sur un plateau un argument très fort aux partisans du « Brexit » et plus généralement à tous les partis « eurosceptiques » en Europe.
Ceci survient alors que se déroule une double crise au sein de l'Union européenne. D'une part, il est clair que l'Euro est en train de détruire l'Europe. Cette constatation s'impose désormais depuis 2011 et le durcissement du cadre disciplinaire mis en œuvre pour faire face à la crise de l'Euro. Ce processus est devenu évident avec la crise entre le gouvernement grec et les autorités européennes du premier semestre 2015. Cette destruction découle de l'ensemble du cadre économique et social que l'Euro favorise ou impose dans les différents pays membres. Mais, elle découle aussi du cadre politique implicite qui se met en place à propos de l'Euro dans les pays de la zone Euro et qui est marqué par un abandon progressif de tous les principes démocratiques.
L'Ukraine était devenu le « symbole » de cet affrontement avec la Russie. Or, voici que le vote néerlandais remet brutalement en question la logique de cette stratégie.
Une crise de la stratégie européenne
Or, le vote néerlandais remet en cause une partie de cette création d'un ennemi imaginaire. La stratégie de certains milieux européens est ici touchée au cœur. Au-delà, Le "non" des Néerlandais au référendum sur l'accord d'association entre l'Ukraine et l'Union européenne témoigne d'une crise profonde au sein de l'UE. Remettant en cause les relations entre l'Ukraine et l'UE, ce vote signe la fin de la politique d'élargissement vers l'Est de l'UE.
Car, derrière la remise en cause de cet accord se profile la question de la Russie, et de la justification de la politique de sanctions décidée par l'UE. Le fait que les Néerlandais se soient clairement prononcés contre cet accord est hautement symbolique. On se souvient que les protestations de la Place Maïdan, à Kiev, avaient eu en partie pour prétexte cet accord.
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