Une menace pour la diversité énergétique européenne, rien de moins. C'est ainsi que Bruxelles voit le projet Nord Stream 2, selon Anna-Kaisa Itkonen, porte-parole de la Commission. C'est pourquoi elle a reçu les plus importants dirigeants du projet, dont l'ancien chancelier allemand Gerhard Schröder.
Jens Müller, porte-parole de Nord Stream 2, a accordé une interview exclusive à Sputnik News sur le sujet, suite à la réunion avec la Commission Européenne.
"Je ne peux pas évaluer la position de la Commission européenne, je pense qu'ils vont présenter leur point de vue. Il n'y a pas de doute que Nord Stream 2 apportera une contribution importante à la sécurité énergétique à long terme de l'Europe. Et c'est la position que nous avons présentée de manière appropriée à Bruxelles devant la Commission européenne.
Nous insistons constamment qu'à l'avenir Nord Stream 2 acheminera des quantités de gaz supplémentaires à l'UE. Au cours des vingt prochaines années, la production dans l'UE sera considérablement réduite, et la nécessité d'importations augmentera. Nord Stream 2 vise à fournir des volumes supplémentaires d'énergie. Personne n'a l'intention de remplacer le transport de gaz par l'Ukraine."
(traduit directement de l'allemand au français)
"Le fait d'avoir un nouveau tracé ne correspond pas à une diversification. Pour l'Union européenne, cela signifie différents tracés, différentes compagnies, différents fournisseurs et d'autres énergies."
Les parlementaires européens polonais reprochent à Nord Stream 2 de violer l'union énergétique entre pays membres. En effet, depuis plus de 10 ans, les deux gazoducs ont posé un problème aux pays d'Europe de l'Est, qui aimeraient ne plus avoir à dépendre de Moscou. Selon le commissaire slovaque Maros Sefcovic, une seule route convoierait 80% du gaz pour l'Europe si Nord Stream 2 devait être mis en place.
Written Draft Declaration of European Parliament on Nord Stream 2 pic.twitter.com/Db9WceG3Zm
— Jacek Saryusz-Wolski (@JSaryuszWolski) 4 апреля 2016 г.
"Depuis son annonce par Gazprom et ses partenaires, plusieurs pays européens ont demandé à la Commission européenne de prendre position sur ce projet. La Commission s'est saisie de ce dossier et a demandé des informations complémentaires, à la lumière de la stratégie d'union énergétique, établie pour la première fois en février 2015 à la suite de la crise russo-ukrainienne."
Or, voici quelques semaines, cette même Commission avait été épinglée pour avoir occulté son programme en matière de biocarburants, rendant sa politique énergétique aussi transparente qu'un baril de brut.
"La Commission se renseigne sur le projet à l'heure actuelle. De par les traités européens, la Commission a un certain nombre de pouvoirs à la fois dans le domaine de l'énergie et dans le domaine de la concurrence. La Direction de la concurrence a en ce moment un différend avec Gazprom, en cours de négociation. Ce sont donc aussi des questions de concurrence, stratégiques, politiques, qui relèvent autant de l'UE que des pays membres."
Xavier Moreau: "Le transit gazier est l'un des seuls leviers dont dispose Kiev pour faire du chantage. Avec Nord Stream 2, Kiev perd cette capacité de nuisance, mais perd aussi 2 milliards de revenus annuels; donc pour les bailleurs de fonds de l'Ukraine — les États-Unis — c'est une catastrophe."
Francis Perrin: "Selon Moscou, il n'y aurait plus de gaz transitant vers l'Europe via l'Ukraine dès 2019. Bruxelles a peur de voir ainsi l'économie ukrainienne se fragiliser."
Si l'on devait s'en tenir aux adages populaires, la Commission européenne, à l'instar d'un Politburo, semble bien appliquer cette expression: faites ce que je dis, pas ce que je fais.
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