Les chiffres montrent clairement que l'approbation et le soutient à cette politique se sont inversés avec le temps. En effet, 17,5 % des sondés ont déclaré avoir récemment changé d'opinion, après avoir soutenu cette politique à ses débuts.
Quels ont été les résultats de la politique migratoire de Mme Merkel? Mme Catherine Wihtol de Wenden, sociologue et directrice de recherche au CNRS, et Mme Christine Bierre, membre du mouvement Solidarité et Progrès, nous répondent.
Comment expliquer les 52% d'opposition obtenus dans le sondage?
Catherine Wihtol de Wenden: « L'opposition est la même qu'en France: la peur de l'autre, faire entrer des terroristes, les Länders de l'Est sont confrontés au chômage et ont peur de la concurrence apportée sur le terrain, les villes et les villages ne sont pas prêts à voir arriver de nouvelles têtes, il y a des formes de xénophobies, PEGIDA est très actif à Dresde; pour les mêmes raisons que les Européens, les Allemands sont frileux. »
Donc, lorsqu'il y a eu l'affaire de Cologne (qui n'était pas liée aux réfugiés syriens mais avec des personnes issues de l'immigration et déjà présentes en Allemagne depuis un long moment), pour les Allemands qui ont connu par le passé le miracle et le développement économique, ça a été le déclencheur d'un rejet de la politique de Merkel, et ça s'est traduit par des résultats électoraux très forts pour le mouvement Alternative für Deutschland, dans une situation où les gens ne voient pas de porte de sortie. »
Catherine Wihtol de Wenden: « L'Allemagne est assez isolée sur ce point. Les voisins de l'Allemagne sont adeptes du respect du droit d'asile de façon limitée. (…) il n'y a en fait que quelques pays européens, qui sont montrés du doigt, qui ont dits ne pas être prêts à accueillir les demandeurs d'asiles. »
Au final, ces chiffres s'accumulent à d'autres: le quart des votants de la Saxe-Anhalt soutient l'AfD, les manifestations de mécontentement grandissent à chaque fois, chaque élection est une nouvelle humiliation pour la coalition CDU/SPD, voire un clou enfoncé dans un cercueil.
Face à la possibilité d'un Brexit, auquel une part grandissante des Allemands semble éprouver de la sympathie, l'idée d'un « Deutsch-exit » n'est pas à écarter non plus.
S'il est facile de critiquer la Chancelière depuis l'étranger, il est plus terrible d'accepter une situation de fait pour l'Allemagne: la politique de Berlin ne correspond plus aux besoins du reste du pays, et, ce alors que Merkel a répété (une nouvelle fois) ne pas envisager de plan B.
Qui a parlé de République Fédérale, ou même de Weimar, dans ce cas-là?
Les opinions exprimées dans ce contenu n'engagent que la responsabilité de l'auteur.