Grande-Synthe : « Si on se laisse déborder, on aura perdu la partie »

© REUTERS / Darrin Zammit Lupi Une fille migrant
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Une semaine après l’ouverture du camp de la Linière, le maire écologiste de Grande-Synthe Damien Carême s’exprimait devant la presse lundi 14 mars. Ce premier camp humanitaire de France ouvrait lundi 7 mars à son initiative mais contre l'avis de l'Etat.

Il a été mis en demeure par le préfet qui s'est dit "inquiet des dangers relevés par la commission communale de sécurité".

Le maire de Grande-Synthe doit faire face à une double difficulté: l'entretien du camp qu'il a fait construire face à l'inertie de l'Etat et la mise en demeure qu'il a reçu de la part de la préfecture.

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Pour l'entretien du camp, qui accueille 1500 personnes (soit sa capacité maximale), le maire envisage de lancer un appel aux dons sur internet. Le financement annuel est estimé à 3 million d'€ (charges, personnel sur place, etc.). L'idée vient d'informaticiens qui se sont portés volontaires pour mettre au point cette opération de crowdfunding. Effectivement, difficile pour cette petite commune du Nord payer les factures: cela ne relève pas de sa compétence, ajoute le maire. Elle a déjà financé une partie de la construction du camp à hauteur de 500 000 euros. Le reste, c'est Médecins Sans Frontière (MSF) qui s'en ait chargé, soit 2.6 millions. Mais si l'Etat répond à l'appel du maire, il n'y aura pas de raison de faire cet appel aux dons.

« C'est pour cela que je souhaite que l'Etat vienne, intervienne, et participe et prenne en charge le fonctionnement de ce camp. Si on n'y arrive pas ou si ça dure, c'est en attendant que je vais lancer cet appel aux dons sur Internet pour qu'on puisse sensibiliser tout le monde et recevoir les dons pour participer [..] C'est que je me dis que dans la situation actuelle, avec ce que je lis, je ne le trouve pas très favorable à venir dessus. Ce n'est pas moi qui le dit, c'est la presse qui relate que le préfet dit: c'est pas envisagé, le financement. Quand je lis ça, je suis un peu inquiet. Donc si je veux continuer et que l'opération ne se limite pas au déménagement, j'ai besoin de trouver les moyens. Donc je vais lancer cela. »

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Tel qu'il est construit actuellement, le camp de satisfait pas l'Etat. S'il répond certes aux normes humanitaires, certaines normes de sécurité sont à revoir. A peine le camp a-t-il ouvert que la préfecture a mis en demeure le maire. Il est prié de revoir quatorze points relevant de la sécurité du camp et de ses réfugiés. Sur les points qui posent problème, douze sont ou seront résolus: par exemple, mettre des détecteurs de fumée dans chaque cabane, installer une clôture coté autoroute, et faire en sorte qu'il y ait du personnel formé à la sécurité incendie. Restent deux points sur lesquels il sera difficile de répondre: respecter une distance de cinq mètres entre chaque cabane et s'assurer que le bois avec lequel elles sont construites soit antifeu. Un bilan doit avoir lieu avec la Commission de Sécurité en mai.

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« On a peur de l'appel d'air partout. Or, ça ne crée pas d'appel d'air, encore une fois moi, je dis que ça fait huit ans que j'en accueille à Grande-Synthe. Ce n'est pas parce qu'on avait des conditions d'accueil sommaires que les gens sont venus. Les réfugiés sur le camp, toute la presse en témoigne aujourd'hui, leur but, ce n'est pas de rester ici, c'est de partir en Angleterre, ils le disent tous. Donc ce n'est pas le fait de faire un coin qui va faire un appel d'air, c'est simplement de leur permettre de se poser et d'avoir des conditions de vie dignes d'être humain. »

Le maire prend sur lui la responsabilité pénale et sait les risques encourus. En décembre, il a été reçu par le Ministre de l'intérieur, qui s'est engagé a intensifié leur partenariat autour de trois axes: démanteler les réseaux de passeurs, orienter les migrants vers une demande d'asile en France et… les mettre à l'abri. Et pourtant, pas grand-chose a été fait:

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« Oui, il faut que j'obtienne de l'Etat, c'est pour cela que j'en ai besoin, qu'il prenne en charge le fonctionnement de ce camp. Il n'y a pas de raisons qu'il le fasse à Calais et qu'il ne le fasse pas chez nous. Même si à Calais c'est lui qui a décidé, qui l'a fait, là il a peut-être moins décidé mais il a accepté et sur le fonctionnement on a la même problématique qu'à Calais. C'est pour cela que je souhaite que l'Etat vienne, intervienne, et participe et prenne en charge le fonctionnement de ce camp ».

Damien Carême a reçu beaucoup de soutien de politiques de tous bord, excepté de l'extrême droite. Le camp de Linière remplace celui de Basroch qui était passé de 80 personnes à près de 2500 en quelques mois, rendant les conditions de vie plus que déplorables.

L'aide de l'Etat est indispensable pour son fonctionnement: aucun autre réfugié ne sera accueilli et les cabanes seront démantelées au fur et à mesure des départs Le maire de Grande-Synthe, en ouvrant ce camps avec l'aide de MSF, souhaite montrer l'exemple. Seul contre tous, Damien Careme déplore: "On a raté complètement toute cette Europe de la solidarité. C'est un grand regret ».

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