Le groupe terroriste Daech entend s'aménager une armée de migrants défavorisés d'Afrique dans son nouveau fief en Libye, à Syrte, et n'hésite pas à leur proposer une rémunération de 1.000 dollars, apprend-on des chefs du renseignement libyen.
En Libye, les migrants des pays où la plupart des habitants gagnent au mieux un dollar par jour sont en quête d'un avenir meilleur, et le trouvent — dans les mains des djihadistes qui leur offrent des sommes égales à un salaire annuel dans leur pays natal.
Et alors que les autorités libyennes sont désarmées face à l'afflux de réfugiés, Daech utilise une stratégie du colonel Kadhafi qui avait enrôlé des milliers de mercenaires Africains pour grossir les rangs de son armée et pour mettre fin à la révolution qui a ensuite renversé son pouvoir, il y a cinq ans. De cette manière, l'armée djihadiste dans la ville natale du colonel est de plus en plus étoffée grâce aux mercenaires africains qui rejoignent les rangs des Irakiens et Syriens, l'essentiel de l'armée de l'EI.
"L'immigration illégale est une menace pour nous car elle apporte des vagues de mercenaires étrangers, encouragés à venir et combattre aux côtés de Daech", estime un policier libyen, le colonel Muncif al Walda.
"Le gros des migrants souhaitent pénétrer en Europe, mais certains sont déterminés à rejoindre Daech. Malheureusement, ici en Libye, nous sommes juste au cœur de la route de passage des migrants", ajoute-t-il, cité par le Telegraph.
Londres et Washington ne sont pas restés à l'écart de la situation en Libye, la forçant à accepter l'aide militaire occidentale pour vaincre Daech. Ils ont proposé, tous les deux, au gouvernement libyen 1.000 personnels britanniques et 5.000 italiennes à des fins d'entraînement. Et malgré la portée politique de la présence militaire occidentale en Libye, Tripoli ne peut pas ignorer le fait que ses propres forces de sécurité ne sont pas capables de déloger les djihadistes par elles-mêmes.
Arrivés à Syrte il y a un an, Daech aurait formé jusqu'ici une armée d'entre 2.000 et 3.000 combattants, transformant ainsi la ville portuaire en une version libyenne de Raqqa. En cela, l'armée de l'EI est constituée pour la plupart (environ 70%) de non-Libyens, fait savoir Ismail Shukri, chef du renseignement militaire dans la ville de Misrata (nord-ouest de la Libye).
"La majorité d'entre eux (…) ce sont des Tunisiens, et le reste est constitué par des Soudanais, des Egyptiens, des citoyens des pays au sud du Sahara, la zone du Tchad au Nigéria, et ensuite d'Algérie et du Golfe", précise M.Shukri.
"Nous entendons dire que Daech offre la bagatelle de 1.000 dollars pour que des gens viennent combattre à ses côtés, ce qui est vraiment une grosse somme dans plusieurs pays d'Afrique", rajoute Jamal Zubia, représentant du Congrès général national libyen, alors que des locaux à Syrte disent avoir vu des Africains venant du sud du Sahara parmi les volontaires de Daech.
En avril dernier, un homme a été témoin d'un Soudanais au volant d'une voiture piégée, se dirigeant vers un point de passage entre Syrte et Misrata. Au moins six personnes ont trouvé la mort dans l'attentat.
Généralement, des images représentant des Africains tués en plein milieu de combats circulent sur les réseaux sociaux. D'autres Africains apparaissent dans des vidéos de Daech en tant que défenseurs actifs des terroristes.
Ainsi, les autorités libyennes ne cessent pas leurs tentatives d'attirer l'attention sur le problème migratoire et mettent en garde contre des attentats du style de ceux de Paris, réalisés par des Africains transitant par la Libye et y nouant une amitié étroite avec des djihadistes.
"Au moment où un migrant qui a transité par la Libye perpétra un attentat en Europe, le monde sera incapable de ne pas y réagir", résume le colonel Walda.