Comment répondre à un dérapage

© Sputnik . Ramil Sitdikov / Accéder à la base multimédiaFemmes musulmanes
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En effet, comment répondre au dérapage d’un élu, ou de quelqu’un d’important, lorsqu’on est visé ? Mode d’emploi fait d’esprit et d’humour face à la bêtise chronique.

L'affaire a fait le tour du web. Mr David Cameron, Premier Ministre britannique, avait déclaré: « apprendre la langue anglaise aiderait les femmes musulmanes à sortir de leur soumission ». En effet, Jeudi 26 Janvier, le gouvernement britannique avait décidé d'imposer des tests de langue aux migrants. Un programme de 26 Millions d'Euro. Une semaine auparavant, Cameron avait estimé que les « femmes musulmanes devaient connaître la langue anglaise, ou faire face à l'expulsion du pays », car, selon lui, «des lacunes dans la langue anglaise rendent les femmes musulmanes vulnérables aux messages de DAECH ».

C'est ce qu'on appelle un dérapage.

Le premier-ministre britannique David Cameron - Sputnik Afrique
Le gouvernement britannique devrait-il passer un test de langue?
Au-delà des réactions furieuses du camp adverse (les Travaillistes) et des associations islamiques d'Angleterre, ce sont les réactions sur Twitter qui ont créé un vrai ouragan. Les propos de Cameron ont en effet visé des millions de personnes, et ce dans un pays qui a toujours eu une tradition de respect des consciences.

Le hashtag #TraditionallySubmissive a été lié au compte du Premier Ministre, et les tweets se compte par centaines depuis plusieurs jours, les retweets encore plus. La dérision et l'esprit ont pris le dessus sur l'humiliation, le but n'étant pas de détruire M. Cameron, mais de rire.

​En parallèle à ces tweets, la question de l'identité des musulmans britanniques se pose. Selon Nigel Farage, la communauté musulmane souffre d'une personnalité tiraillée par ses origines étrangères, et par le « british way of life ».

Or selon un sondage publié en 2011 par le think-tank inter-parti Demos montre que 83% des musulmans de Grande Bretagne sont « fiers d'être britanniques ». Le patriotisme n'a pas de couleur ni de religion; les Israélites italiens et allemands du 19ème siècle en sont un bon exemple, alors que ceux de Russie faisaient face aux pogroms, et l'affaire Dreyfus avait divisé la France.
Identité et religion, des thèmes lancés et relancés par les gouvernants et les médias, parfois dans le but de taper dans l'œil; pourtant, les inquiétudes existent de ce côté.​

Mme Patricia Lalonde, Secrétaire Générale de l'organisation non-gouvernementale MEWA, nous explique de quoi il en tourne.

« Je pense que c'est une réaction assez maladroite, parce que ce n'est pas nécessaire de lier la problématique d'apprendre l'anglais à des questions de sécurité.

migrants écoutent un guitariste dans un théâtre improvisée, Calais - Sputnik Afrique
Quelle place pour la culture dans la Jungle de Calais?
Je pense que ça paraît logique d'apprendre la langue du pays, mais ça n'est pas valable que pour l'Angleterre, c'est valable pour tout le monde partout. (…) Je pense qu'il a voulu faire quelque chose de positif, en mettant un fond de 20 Millions de Livres pour aider les personnes à apprendre la langue nationale; l'intention est bonne mais la formulation est maladroite.

Et c'est ce qui explique pourquoi les femmes musulmanes se sont senties visées, parce qu'il a stigmatisé; il a stigmatisé une immigration. »

Le message des tweets est juste, selon Mme Lalonde. La langue est en effet un moyen d'intégration, et de lutte contre le communautarisme.

« Elles se sont senties visées (…), alors que celles qui résident depuis 20 ans et qui ne parlent pas anglais, ne trouvent pas de travail et ne s'intègrent pas du tout dans la société.

En ayant la possibilité d'apprendre l'anglais et de pouvoir bénéficier de ce fond qu'a donné M. Cameron, c'est une façon de faire sortir la femme de chez elle; la femme qui sort, qui travaille et étudie, c'est beaucoup plus simple pour la communauté en général.
Il a surtout comparé cela à des problèmes de sécurité alors que la plupart des terroristes (…) parlent tout-à-fait bien la langue et se sont intégrés. »

Le premier ministre britannique David Cameron - Sputnik Afrique
La fronde des «femmes musulmanes soumises» contre Cameron
David Cameron semble en effet oublier que Jihadi John parlait bien anglais et qu'il était (au même titre que ce cher David) sujet de sa majesté, ce qui ne l'a pas empêché de décapiter beau nombre de personnes au nom de DAECH (y compris des musulmanes et des musulmans); les amalgames sont toujours plus faciles que les remises en cause. DAECH, Al-Qaeda, Boko Haram, AQMI sont des organisations terroristes, et si les préoccupations existent concernant les questions d'identité et d'attachement national, la religion ne peut en aucun cas être lié à de la violence. Si M. Cameron veut parler de sécurité et de lutte anti-terroriste, il devrait davantage se focaliser sur les moyens coercitifs et, d'infiltration de ces groupes, afin de traiter le mal par la racine.

De la même façon, personne ne ferait de parallèle entre l'Inquisition et l'Eglise catholique, ni entre les combattants Gurkhas et le bouddhisme. Sachons appeler un chat un chat: un terroriste est un terroriste, et un violeur est un violeur.

« Mister Cameron » ne battra pas DAECH sur ce terrain avec ces propos. Il joue le jeu de DAECH, et travaille (involontairement) à son expansion. En faisant preuve d'esprit, les musulmanes britanniques ont su montrer qu'elles ne joueront jamais à ce jeu, et préfèrent jouer avec les mots.

Les opinions exprimées dans ce contenu n'engagent que la responsabilité de l'auteur.

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