Les autorités turques cherchent déjà à minimiser les conséquences de la destruction de l'avion russe pour les relations bilatérales. Elles tentent si bien qu'elles tombent parfois dans l'extrême inverse: le président Erdogan a notamment déclaré que les Turcs ignoraient l'origine de l'avion qu'ils avaient abattu — ce qui est un mensonge honteux ne pouvant que dégrader davantage les relations russo-turques.
Pour sa part, le premier ministre Davutoglu a déclaré qu'Ankara ne souhaitait pas aggraver les relations avec Moscou, son "ami et voisin", mais il n'a pas non plus présenté d'excuses — les Turcs continuent d'insister sur le fait qu'ils défendaient leur territoire.
Est-ce qu'Erdogan avait des raisons de croire que la Russie, malgré une vive réaction à la destruction de l'avion, ne mettrait pas en péril les relations bilatérales et que tout reviendrait à la normale avec le temps? Il a probablement mal interprété la réaction souple de la Russie à ses déclarations contre Moscou au printemps (après le voyage de Poutine en Arménie) et en automne (après le lancement de la campagne russe en Syrie). A l'époque, Erdogan avait publiquement fait du chantage à la Russie en disant qu'elle risquait de perdre un partenaire important, la Turquie, pour la reconnaissance du génocide arménien et le soutien militaire d'Assad.
En d'autres termes, les relations pourraient se rétablir, même avec Erdogan quand il présentera ses excuses pour les événements du 24 novembre, mais il n'y aura plus jamais de confiance personnelle entre les deux chefs d'État.
Ce qu'a fait Erdogan est plus qu'un crime: c'est une erreur. Et ceux qui ont tenté d'organiser le blocus et font aujourd'hui tout pour freiner la Russie cherchent à en profiter. Ils s'efforceront de monter la Russie et la Turquie l'une contre l'autre, de faire en sorte d'empêcher leur coopération bilatérale pendant des décennies.