Le texte de la pétition publiée sur le portail Change.org en réponse au décret du président russe est une demande d'un groupe de citoyens russes de transférer les produits alimentaires sous embargo aux couches de la population les plus démunies, au lieu de les détruire à la douane russe.
"Pourquoi détruire des produits européens de bonne qualité si avec cela, on peut nourrir des vétérans, des retraités, des handicapés, des familles nombreuses, des victimes des catastrophes naturelles et d'autres personnes dans le besoin?", ont fait remarquer les auteurs de la pétition dans leur message.
La pétition adressée au président Poutine ainsi qu'aux députés de la Douma (parlement russe, ndlr) a récolté plus de 190.000 signatures. Selon le porte-parole du président russe, cette pétition sera présentée à Vladimir Poutine une fois l'authenticité des signatures vérifiée.
Selon le décret du président, à partir du 6 août, les produits alimentaires sous embargo en provenance des pays ayant introduit des sanctions antirusses seront détruits à la frontière russe avec tous les moyens autorisés par le droit de l'environnement.
Initialement, plusieurs dirigeants russes, dont le premier ministre russe Dmitri Medvedev, le ministre russe de l'Agriculture Alexandre Tkatchev, le premier vice-procureur général de Russie Alexandre Bouksman, ou encore le chef de Rospotrebnadzor Anna Popova, ont soutenu l'idée de la destruction des produits à la douane, en soulignant les dégâts pour l'économie russe provoqués par la contrefaçon.
Néanmoins, cette mesure, jugée trop radicale par certains, a provoqué aussi des oppositions dans les milieux socio-politiques et économiques du pays.
Ainsi, le chef du parti communiste Guennadi Ziuganov a proposé de créer une commission chargée du transfert des produits sous embargo aux orphelinats, aux communautés orthodoxes, ainsi qu'aux habitants des régions de Donetsk et de Lougansk en Ukraine.
Andreï Kroutov, député de la Douma, a soutenu l'idée de son collègue concernant le transfert des produits sous embargo dans l'est de l'Ukraine, tandis que le président du comité central du parti "Communistes de la Russie" Maxime Souraïkine est allé jusqu'à proposer d'envoyer des produits sanctionnés en Afrique.
"Nous, personnes âgées appartenant aux générations précédentes, nous souvenons bien des reportages de l'époque soviétique sur les pays occidentaux, où ils détruisaient des produits. On se demandait à l'époque — comment est-ce possible? Mais il faut comprendre que cette démarche difficile est la mesure la plus efficace afin de faire exécuter nos lois. Certes, c'est une mesure radicale, mais absolument nécessaire", a fait remarquer Tatiana Ribalova, expert de la filière laitière.
"Bien sûr que la perspective de détruire des produits alimentaires ne nous réjouit pas, surtout quand il s'agit de telles dimensions. Pourtant, si nous avons fixé certaines règles, il faut qu'une certaine sanction soit prévue lorsque ces règles sont violées. Les contrevenants doivent subir certaines conséquences", a rajouté le président de l'Union nationale des producteurs de lait Andreï Danilenko.
"C'est une décision absolument bonne, car les dimensions de la contrefaçon (…) sont hors limites", a fait savoir le maître de conférence de l'Académie de l'agriculture de Timiriazev Igor Abakoumov.
Effectivement, selon le Service fédéral des douanes russe, plus de 522 tonnes de produits alimentaires en provenance des pays occidentaux ayant introduit des sanctions antirusses ont été stoppées sur le territoire russe. Le chiffre exact des produits sous embargo vendus sur le marché russe grâce à des circuits illégaux n'est pas connu.