La mort soudaine de dizaines de milliers d'animaux inscrits au Livre rouge des espèces protégées a choqué les environnementalistes: depuis dix ans la population de saïgas commençait à peine à se rétablir après une très forte réduction dans les années 1990. En 2014, selon le ministère des Ressources naturelles du Kazakhstan, la population de saïgas dans cette ancienne république soviétique était estimée à 256 700 spécimens — la plus grande concentration au monde.
Après la chute de l'URSS, une chasse massive a été ouverte contre les saïgas — notamment à cause de leur viande et leurs cornes utilisées par la médecine chinoise traditionnelle. Au final, en 2003, leur nombre au Kazakhstan avait été divisé par 50 pour passer d'un million à 20 000 spécimens. En 2004, le gouvernement a commencé à adopter des restrictions pour protéger les animaux et en 2012 leur population était revenue à 130 000.
Pour enquêter sur les causes de la mort des antilopes le Kazakhstan a fait appel aux spécialistes étrangers de la Convention sur la conservation des espèces migratoires appartenant à la faune sauvage, au Royal Veterinary College et à l'Office international des épizooties.
Les experts ne peuvent pas encore affirmer pour quelle raison les saïgas meurent en masse dans les steppes du Kazakhstan. Mais des versions ont déjà été avancées. Par exemple, le président de l'ONG kazakhe Académie écologique internationale, Moussagali Douambekov, pense que cette épizootie est due à la 1,1-Diméthylhydrazine, qui entre dans la composition du combustible des fusées lancées depuis Baïkonour.
"Il suffit que les vapeurs arrivent dans l'organisme et le processus de destruction sera lancé, même si les conséquences pourraient se manifester seulement quelques mois plus tard. Si l'herbe toxique est arrivée dans l'organisme, elle commence à agir vite et entraîne la mort en un jour ou deux", déclare Moussagali Douambekov dans une interview accordée au site kazakh Gonzo.
"La mort massive de saïgas pourrait, bien sûr, être liée à l'environnement ainsi qu'au cosmodrome. Mais sur le plan régional, les régions de Kostanaï, d'Akmola et d'Aktioubé sont loin de Baïkonour. Nous pensons qu'il n'y a pas de lien direct, mais étudierons cette question", confirme le vice-président de Kazcosmos Meirbek Moldabekov, cité par l'agence de presse Novosti-Kazakhstan.
La cause la moins probable avancée par les experts internationaux serait deux bactéries: Pasteurella et Clostridium, considérées comme mortelles pour les animaux ayant un système immunitaire affaibli. La question est seulement de savoir pourquoi des milliers d'animaux se seraient retrouvés avec une immunité affaiblie.
La présidente de Saiga Conservation Alliance E.J. Milner-Galland remet en doute cette version. Selon elle, ces bactéries sont toujours présentes dans la steppe.
Ce n'est pas le premier cas d'épizootie touchant les saïgas au Kazakhstan. De la même manière que cette année, la mort des animaux s'était produite en mai et ces derniers présentaient des symptômes similaires: bave et diarrhée. En 2001, les experts de l'Association kazakhe pour la protection de la biodiversité avaient découvert un lien entre l'épizootie et la nourriture. La mort avait été provoquée par les plantes de la famille des Brassicaceae.
En grande quantité, ces plantes peuvent provoquer chez les saïgas diarrhée et météorisme. De plus, les animaux peuvent décéder d'un œdème aigu des poumons en se nourrissant dans des prés à l'herbe mouillée, après le brouillard ou la pluie. Les bergers savent que le pâturage après la pluie ou le brouillard peut être fatal pour les animaux, c'est pourquoi ils sont lâchés dans la pâture plus près de midi.
Néanmoins, cela n'est qu'une version des faits. Les chercheurs devront encore établir la cause exacte de la mort de ces animaux.