Celui-ci, associé à un système de défense aérienne élargi aux missions d'interception de certains armements balistiques, met le pays à l'abri à moyen terme de toute agression d'une puissance majeure. Ces aspects ont été évoqués dans les deux premiers volets de cette série d'articles.
Car il convient de ne pas créer une armée à deux vitesses. Le commandement des troupes aérospatiales, les forces nucléaires, les troupes aéroportées et les forces spéciales constituent des priorités. Ils ne doivent pas, pour autant, ponctionner une telle part des moyens financiers que les autres armées en soient réduites à la portion congrue.
L'armée de l'air russe, tous les observateurs étrangers en conviennent, opère une incontestable remontée en puissance. Si le nombre d'appareils décroît, l'entrée en service progressive des avions de combat Su-35, Su-34, Su-30SM, en attendant celle du T-50, vont redonner un tonus indéniable aux escadrons de chasse. Les pilotes, qui bénéficient pour leur formation de l'entrée en service d'un jet performant, le Yak-130, retrouvent par ailleurs des taux horaires d'entraînement proches, voire supérieurs dans certains cas, à ceux de l'OTAN. Avec la modernisation d'une partie des Mig-31, Su-24, Su-27 et la possible commande de Mig-35 en complément des Mig-29SMT programmés, nous nous dirigeons à l'horizon 2020-2025 vers une force aérienne high tech, plus ramassée, d'un millier d'avions de combat hors composante nucléaire aéroportée et aéronavale.
Mais ce tableau élogieux ne doit pas masquer certaines lacunes. Excellents missiliers les industriels russes n'ont pas encore mis au point toute la gamme des munitions intelligentes et aptes à l'apport en soute que requiert le T-50. Ce n'est qu'une question de temps. La question des armes hypersoniques est plus problématique. La Russie via Almaz-Antey ou KTRV dispose de toutes les briques technologiques nécessaires à la mise au point de tels vecteurs. Leur intérêt opérationnel (frappe à longue distance en stand-off, quasi-invulnérabilité face aux dispositifs d'interception…) est évident. Mais elles nécessiteront un investissement lourd qui devra, sans doute, être reporté dans un second temps, post-2020, pour rester dans la course vis-à-vis des « Occidentaux » tout en économisant des moyens indispensables, dans les dix ans qui viennent, à d'autres programmes.
La Russie, nous y avons déjà fait allusion dans un précédent article, doit compenser la fin de la collaboration avec l'ukrainien Antonov faute de se trouver rapidement en difficulté en matière d'aviation de transport.
Dans la foulée du conflit russo-géorgien de 2008, marqué notamment par la prise de conscience du manque de moyens de reconnaissance tactique modernes, les forces russes ont fait l'acquisition de drones tactiques puis développé leur propre gamme.
Mais elles restent dépourvues d'engins de type MALE (Moyenne Altitude Longue Endurance) et HALE (Haute Altitude Longue Endurance), offrant à la fois des capacités de permanence sur le terrain, de frappe précises et rapides dans la profondeur d'un théâtre d'opérations, de renseignement plus précis enfin. Des atouts qui peuvent s'avérer précieux dans le cadre de théâtres d'opérations permissifs ou semi-permissifs comme le furent les conflits afghan, tchétchènes et géorgien.
Et les défis financiers, technologiques ne seront peut-être pas les plus difficiles à résoudre. Alors que l'armée de l'air russe concentre en son sein le commandement des troupes aérospatiales, la composante nucléaire aéroportée et les forces classiques d'une armée de l'air, elle doit parvenir à intégrer ses moyens au sein d'un système de contrôle et de commandement détenant réellement la maîtrise en temps réel de tous ces moyens. Ce qu'elle n'est encore jamais parvenue à faire.
Les opinions exprimées dans ce contenu n'engagent que la responsabilité de l'auteur.