Du point de vue du format adopté, rien de tel dans les pays de l'UE. Cet échange traditionnel de Poutine avec le peuple a été très peu médiatisé en France. Le Monde a verrouillé l'accès à l'intégralité de l'article pour les non-abonnés, dommage, RFI a fait preuve de neutralité s'en tenant au factuel pur et dur quoique le terme de « show » employé dans le titre puisse faire sourire. Serait-on en présence d'un spectacle avec des questions préparées à l'avance et minutieusement filtrées ou d'une rencontre réelle grandement animée par des réactions spontanées? Suivant cette ligne depuis 2001, je pencherais avec plus de conviction vers la deuxième option.
Je soumets à votre attention l'analyse de M. Fabrice Béaur, expert en relations internationales, spécialiste des médias et des réseaux sociaux. Secrétaire-Général d'EODE.
Fabrice Béaur. C'est toujours un plaisir que de suivre cette émission qui n'a aucun équivalent dans le monde à part peut-être celle, mais dans un autre style, de feu Chavez. J'ai retenu plusieurs questions qui correspondent à peu près à celles que vous avez mentionnées. Concernant la non-livraison des navires Mistrals, Poutine a indiqué qu'au-delà de la décrédibilisation de la parole de la France, la Russie s'attend à un remboursement des sommes versées. Mais cette réponse derrière le ton diplomatique indique clairement que cette commande, bien qu'intéressante d'un point de vue technologique puisque c'était le système et non pas tant le bateau en lui-même qui intéressait l'armée russe, n'est plus une priorité russe sur un plan politique. Le chantage de François Hollande n'a donc aucun effet sur la Russie si ce n'est d'avoir renforcé le camp du partisan de tout développement national. Dans le domaine de l'armement, cette mesure n'a finalement fait que renforcer la Russie.
Sputnik. Poutine a posé un regard plutôt positif sur l'impact des sanctions. Son argumentation, vous a-t-elle convaincu?
Sputnik. En regardant s'exprimer les intervenants- surtout des gens "simples", des tréfonds de la Russie — j'avais l'impression de voir des personnes décontractées et plutôt optimistes. Partagez-vous cette impression?
Fabrice Béaur. Oui. La plupart des intervenants reflétaient la diversité de la société russe, autant socialement que politiquement. Si nous avions auparavant un plateau sélectionné, ce n'était pas un tri complaisant… les interventions d'opposants à Poutine l'ont bien démontré. Nous avions un plateau qui a posé les questions que se posent beaucoup de Russes au quotidien mais également politiques, européennes et internationales. Quand un leader fixe une ligne claire ce qui est le cas de Poutine depuis son arrivée au pouvoir, fait face aux critiques et explique tous ses choix en assumant la totalité des responsabilités, échecs y compris, il est normal que le peuple reprenne confiance en lui et dans l'avenir de son pays. Ce facteur explique la côte de popularité de Poutine qui est estimée à plus de 80 %, bien loin des scores politiciens occidentaux qui ne se confrontent que très rarement aux questions directes de leurs citoyens. Pour conclure, cette ligne directe donne une grande leçon de démocratie!
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