Ainsi donc, Alexis Tsipras, le nouveau Premier Ministre de la Grèce sera-t-il le 8 avril à Moscou. Or, le 9 avril, la Grèce doit effectuer un paiement au Fond Monétaire International. Et, le 14 avril, la Grèce doit simultanément émettre pour 1,4 milliard d'Euros de bons du Trésor, renouvelant la dette à court terme et le gouvernement doit payer 1,7 milliard en pensions et salaires.
La Grèce face à l'Union européenne
La Grèce a conclu un accord de nature provisoire avec ses créanciers (l'Eurogroupe mais aussi le FMI). Aujourd'hui le pays fait face à des difficultés importantes de court comme la fuite des capitaux hors du système bancaire (12 milliards d'Euros pour le mois de février) ainsi que l'incertitude financière sur sa capacité à effectuer les remboursements de sa dette. Ces problèmes viennent s'ajouter à ceux, que l'on peut qualifier de tragiques, que le pays connaît depuis qu'il applique la politique décidée par la Banque Centrale Européenne, la Commission Européenne et le FMI, ce que l'on appelle la « troïka ». De ses problèmes il faut retenir la crise économique engendrée par cette politique, la chute du PIB, l'appauvrissement d'une large partie de la population et le problème du chômage, qui touche aujourd'hui plus de 26% de la population active (et plus de 50% des moins de trente ans) et de la fuite des cerveaux. Ce chômage constitue par ailleurs le risque de vider la Grèce de ses éléments les plus brillants et les plus prometteurs. Dans ces conditions, l'Eurogroupe (i.e. la réunion des Ministres des finances de la Zone Euro) a pris la responsabilité d'exercer des pressions politiques et économiques de plus en plus fortes sur le gouvernement grec. Mais, il est clair pour tous en Grèce qu'il est désormais impossible de revenir en arrière, au statu quo ante tel qu'il était avant les élections du 25 janvier qui ont porté au pouvoir le nouveau gouvernement. La crise entre la Grèce et les institutions européennes vient précisément de ce que ces dernières n'ont pas compris l'ampleur et la portée du changement qui était survenu lors des élections.
Très clairement les politiques mises en œuvre sous le nom de « Mémorandum » ne fonctionnent pas et ont de plus des effets destructeurs très importants sur l'économie. Ces politiques, et il faut insister sur ce point, n'ont pas été mises sur pied pour « aider » la Grèce, mais bien uniquement pour permettre aux pays créditeurs d'être remboursés. Ceci a été reconnu dernièrement dans une note du FMI. Mais, sur ce point aussi, elles se révèlent contre-productives. En effet, il est clair que la Grèce, à la suite des divers Mémorandums, ne pourra pas rembourser sa dette. La politique mise en œuvre pour sortir ce pays de l'insolvabilité l'a, au contraire, plongé dans l'insolvabilité.
Le « nœud coulant » européen
Les relations du nouveau gouvernement grec, résultant d'une alliance entre le parti d'extrême-gauche Syriza et la droite souverainiste des « Grecs Indépendants » ou An.El. a vu se relations se dégrader régulièrement avec les institutions européennes, la BCE, mais aussi avec l'Allemagne. La visite à Berlin d'Alexis Tsipras du 23 mars 2015 n'avait pour but que de faire retomber l'émotion médiatique et le niveau des invectives réciproques dans la presse allemande et grecque. Sur le fond, Tsipras n'a rien cédé et Mme Merkel non plus. De fait, les institutions européennes établissent une politique qui cherche à étrangler la Grèce afin de la faire capituler.
L'importance du voyage à Moscou
On le voit, le voyage à Moscou d'Alexis Tsipras, mais aussi les relations étroites que son gouvernement est en train d'établir avec la Chine et plus généralement avec les pays des BRICS, représente potentiellement un moment historique. Celui du reflux des institutions européennes de l'UE au profit d'une avancée, certes timide, certes prudente, mais néanmoins réelle des puissances émergentes, comme la Russie et la Chine, dans le jeu européen. C'est pour cela qu'il y a bien plus dans ce voyage que ce que l'œil d'un observateur peut voir.