Le Sénégal pourrait bientôt s'atteler à des réformes monétaires, la question monétaire étant fondamentale pour œuvrer à la transformation du pays et garantir sa souveraineté, a déclaré le 16 mai le Premier ministre du Sénégal, Ousmane Sonko, lors d'une conférence devant les étudiants à Dakar en compagnie de l'ex-député français Jean-Luc Mélenchon.
"La monnaie, tout autant qui l'impôt, est un puissant levier économique et un instrument de souveraineté […]. On ne peut pas imaginer une seconde que la France puisse avoir une monnaie qui ne lui appartient pas véritablement. Aucun État digne de ce nom ne doit sous-traiter sa monnaie […]. Nous nous acheminons sûrement vers ces réformes", a-t-il indiqué, en référence au franc CFA piloté depuis Paris.
Le général de Gaulle lui-même avait refusé de se laisser imposer le "billet drapeau", monnaie imaginée par les Américains pour la France après la Seconde Guerre mondiale, a rappelé le dirigeant. Or en Afrique, "les États s'endettent en devises étrangères et donc sont exposés aux fluctuations du marché".
Se doter d'"une monnaie flexible"
"Presqu'aucun pays africain ne peut s'endetter en devises locales. Et cela doit cesser parce que nous en subissons les contrecoups. Nous voulons une monnaie flexible, arrimée à au moins deux devises, à même d'amortir les chocs exogènes et de renforcer notre compétitivité à l'exportation", a estimé M.Sonko.
Le responsable a encore critiqué l'omerta autour de la souveraineté monétaire et d'une potentielle sortie du franc CFA. Il a déploré que ces sujets ne puissent être abordés librement dans les médias ou au parlement sénégalais.
"À chaque fois qu'un homme politique africain soulève la question monétaire, il devient le diable incarné. Nous n'avons pas le droit de parler de notre propre monnaie", a-t-il ajouté.
Certaines conditions -comme une balance commerciale excédentaire- pourraient cependant être nécessaires à une sortie du pays du franc CFA, expliquait récemment à Sputnik Afrique le journaliste sénégalais Babacar Dione. Les débats autour de la création d'une monnaie commune dans la sous-région pourraient néanmoins accélérer le processus, soulignait-il.