Manque de sérieux. Alors que le Parlement européen a accusé Ankara de ne pas couper les ponts avec Moscou dans un récent rapport, ces réprimandes sont accueillies avec indifférence en Turquie, explique à Sputnik Hasan Unal, professeur de sciences politiques et de relations internationales à l'université d'Ankara Baskent.
Les Turcs sont habitués aux rapports hostiles venus des institutions européennes, souligne-t-il. Le dernier en date, qui reproche notamment à Ankara de continuer de commercer avec Moscou, ne fait que creuser davantage le fossé entre la Turquie et Bruxelles.
"Le Parlement européen a l'habitude de publier des rapports antiturcs, qui ne sont pas pris au sérieux en Turquie. Au fond, le Parlement se ridiculise. Parfois vous riez, parfois vous jetez simplement le rapport et laissez les bureaucrates s'en occuper. En général, c'est ainsi que les choses sont perçues dans le pays", explique ainsi Hasan Unal.
Le politologue n'exclut pas que l'Europe se lance désormais dans une chasse aux sorcières, visant spécifiquement la Turquie. D'autant qu'Ankara continue de se rapprocher de Moscou, voyant dans ce partenariat "une plus grande opportunité".
Un constat partagé par l'analyste politique Hasan Selim Ozertem, qui explique à Sputnik que le rapport européen est "un document décevant pour la Turquie". Il doute lui aussi de son impact, soulignant que "les rapports turcs de l'UE ont perdu leur pouvoir de transformation et leur influence sur la politique turque".
Médias russes et sanctions économiques
Le dernier rapport du Parlement européen reprochait par ailleurs à la Turquie de ne pas avoir censuré les médias russes. En Europe, Sputnik avait notamment été visé dès le début du conflit. Mais Ankara semble voir les choses sous un autre angle et la censure n'est pas près de s'installer, selon Hasan Unal.
"Les médias russes dans ce pays sont libres de fonctionner. Et je ne pense pas que la Turquie ferait quoi que ce soit en la matière. L'Union européenne et en particulier le Parlement européen sont et seront très critiques sur ce point" souligne-t-il ainsi.
Le dernier rapport annuel du Parlement européen sur la Turquie déplorait un "déclin significatif de l'alignement de la Turquie sur la politique étrangère et de défense de l'UE". L'organe européen reprochait notamment à Ankara de stimuler le commerce russo-turc en accueillant des citoyens russes et en ne rejoignant pas le train des sanctions contre Moscou.
Le ministère turc des Affaires étrangères avait fustigé "un ensemble d'allégations et de préjugés infondés" dans un communiqué.