Une intervention militaire de la CEDEAO au Niger "sera pour des intérêts français"

Une éventuelle intervention militaire de la CEDEAO au Niger sera mandatée par Paris qui n’est pas prêt à céder ce pays, comme cela a été le cas pour le Burkina et le Mali. D’autant plus que l’énergie française dépend de l’uranium nigérien, a affirmé à Sputnik Afrique un enseignant-chercheur burkinabè.
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Dépendante "à 70% de l’uranium nigérien", la France n’est pas prête à perdre le Niger, elle est prête à tout, même à envoyer la CEDEAO pour intervenir militairement dans le pays, a déclaré ce 4 août à Sputnik Afrique Hyacinthe Wendlarima Ouédraogo, enseignant-chercheur à l'Université Nazi Boni/Bobo au Burkina Faso, et membre du Groupe d'initiatives pour la refondation de la patrie (GIRP) et du Rassemblement des intelligences pour la souveraineté de l'Afrique (RISA).

"La France ne va pas céder alors que la CEDEAO actuellement est sous son diktat. Si le président de la CEDEAO était libre, il n'oserait pas engager une guerre contre une autre armée d’un pays frère […]. Si aujourd'hui une armée nigériane et ivoirienne et une armée béninoise, togolaise peuvent aller attaquer le Niger, tout le monde sait que ce n'est pas pour les intérêts africains. Ce sera pour des intérêts français", a-t-il indiqué.

Il a rappelé qu’il y avait de grandes entreprises françaises, comme Areva, qui opèrent au Niger. "La France ne peut même pas s'imaginer qu'elle peut perdre le Niger, alors que le peuple veut la rupture comme cela se passe au Mali ou au Burkina Faso", poursuit Hyacinthe Wendlarima Ouédraogo.
Selon l’enseignant-chercheur, la France serait prête à faire une "Ukraine bis" avec le Niger. Mais contrairement à l’Ukraine, où elle envoie des armes, en Afrique elle envoie ses troupes. Il faut donc un sursaut d’orgueil des Africains.
"En Ukraine, la France n'envoie pas de soldats, mais elle envoie des armes pour soutenir les Ukrainiens. Mais quand c'est en Afrique, la France refuse d'envoyer des armes. La France envoie des troupes. Donc pour les Africains, ce n'est pas une défense, ce n’est pas pour participer à la défense de l'Afrique, mais c'est une forme de reconquête, de recolonisation de l'Afrique qui est savamment organisée et c'est un plan qui entre en droite ligne aussi avec les exigences du nouvel ordre mondial", a poursuivi le chercheur.

Exit la France, bienvenue la Russie

M.Ouédraogo pense que le fait qu’à chaque révolte, les Africains agitent le drapeau russe "est une symbolique historique". Puisque nul n’est censé ignorer que la Russie n’a pas pris part "aux douleurs de l’Afrique, à l’esclavage […] et encore moins à la conquête coloniale". Au contraire, Moscou a plutôt aidé les pays africains à s’en défaire, rappelle-t-il.

"Aujourd’hui, la Russie ou le drapeau russe est le symbole d'un espoir, le symbole d'une puissance qui peut défendre la cause des nations meurtries, des nations victimes de l'impérialisme […]. Et pour les peuples africains, le drapeau russe ou la présence russe est symbole de résistance, symbole de contrepoids, symbole d'équilibre au niveau de la scène internationale […]. Brandir le drapeau russe, c'est aussi un appel au secours", a-t-il souligné.

Pour lui, il va de soi que la France n’est plus désirée en Afrique, où elle est "la cause de la colonisation, de l’esclavagisme, de la néocolonisation, de l’exploitation des richesses, et de la soumission".
"Les peuples africains vivent dans la frustration. Il y a aujourd'hui une prise de conscience des peuples africains que la France, sa présence en Afrique, n'est pas pour le bien des Africains, mais que c'est pour continuer à exploiter l'Afrique, le sentiment anti-français est nourri par ces frustrations", a-t-il précisé.

Complicité entre la France et le terrorisme?

M.Ouédraogo trouve incompréhensible le fait "qu'une puissance militaire comme la France puisse installer des bases au Mali, au Niger, au Burkina Faso et en Côte d'Ivoire et qu'en dépit de cela, les terroristes arrivent à circuler à leur nez et barbe".
"Pour les Africains, il y a une complicité entre la France et les terroristes, c'est un sentiment qui est fortement ancré et ce n'est pas d'une illusion, c'est la réalité et plusieurs faits viennent prouver cela. Viennent, en tout cas, étayer cette thèse. Deuxièmement, aujourd'hui, beaucoup d'Africains sont convaincus que le terrorisme n'est qu'une nouvelle forme d'impérialisme", a-t-il conclu.
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