Un coup sur la tête. Les restrictions sur l’exportation de gallium et de germanium mettent Washington en délicatesse dans la guerre des puces électroniques, ces deux composants étant indispensables à leur fabrication, a expliqué à Sputnik Thomas W. Pauken, géopolitologue américain.
Ironiquement, les États-Unis se sont mis eux-mêmes en difficulté, en frappant les premiers et en renforçant les contrôles à l’exportation sur l’achat de puces avancées, en octobre. Des sanctions présentées à l’époque comme une victoire côté américain, mais qui entraînent aujourd’hui ces contre-mesures chinoises sur les terres rares, souligne Thomas W. Pauken.
"Il est plutôt risible que l'administration Biden ait pensé pouvoir gagner cette guerre technologique. Si vous n'avez pas accès aux terres rares, si vous n'avez pas accès aux chaînes d'approvisionnement pour produire ces appareils électroniques, vous êtes totalement détruits, vous êtes dévastés, les États-Unis le savaient. Ils savaient à quel point ils dépendaient des terres rares. Ils savaient à quel point ils devaient compter sur la Chine pour relocaliser leurs usines", explique-t-il ainsi.
C’est donc bien la Chine qui tient les meilleures cartes dans cette confrontation, souligne Thomas W. Pauken. L’Empire du Milieu contrôle 63% de l’extraction mondiale de terres rares et 78% de ces matériaux importés aux États-Unis viennent de Chine, rappelait d’ailleurs une étude de l'US Geological Survey de 2022.
Politique "incohérente" et "enfantine"
Malgré ces données objectives, l’administration Biden s’est entêtée dans la confrontation, en favorisant le découplage économique avec la Chine et en limitant les ventes de semi-conducteurs sophistiqués. Un coup assez bien encaissé par Pékin, qui met désormais en place ses propres chaînes d’approvisionnement en puces et peut même se permettre de sanctionner certains fabricants américains, comme l’a prouvé l’affaire Micron.
L’escalade américaine, qui passe également par les sanctions contre le géant chinois Huawei ou les menaces sur le réseau TikTok, symbolise donc la politique "incohérente et enfantine" de l’administration Biden, souligne Thomas W. Pauken. De sanctions en contre-sanctions, le découplage risque de coûter cher aux industries américaines, affirme l’expert
"S'ils continuent cette politique de découplage de la Chine, cela ne fera que les pénaliser de plus en plus durement. Je ne sais pas commentils pensaient pouvoir frapper la Chine et ne pas connaître de riposte. C'est la réciprocité de base. Si vous frappez un pays avec des barrières commerciales, celui-ci va réagir avec ses propres barrières", explique-t-il.
Certaines voix commencent d’ailleurs à s’élever aux États-Unis contre les politiques agressives de Washington en matière de puces électroniques. Les restrictions contre Pékin ne l’empêcheront pas de se doter de ses propres puces avancées, avait ainsi déclaré Bill Gates, fondateur de Microsoft, en mars.