Drones US pour Taïwan: "Une situation similaire à ce qui a été fait en Ukraine envers la Russie"

Les États-Unis devraient livrer à Taïwan quatre drones de reconnaissance capables de partager des données avec Washington et Tokyo, écrit le Financial Times. Auprès de Sputnik, un ex-militaire américain estime que cette stratégie provoquerait la Chine "dans une situation dangereuse". Pour cause, Pékin se rapprocherait encore plus de Moscou.
Sputnik
Promis par les Etats-Unis à Taïwan, quatre drones de reconnaissance MQ-9B Sea Guardian pourraient partager les données avec Washington et Tokyo, selon les informations du Financial Times.
Les possibles enjeux et les conséquences potentielles de ce transfert ont été avancés par un lieutenant-colonel de l'armée américaine à la retraite dans une interview accordée à Sputnik.
"Les discussions pour les vendre [à Taïwan] ont eu lieu pour des choses mineures en 2020", a fait remarquer Earl Rasmussen. "Alors maintenant, nous obtenons juste une confirmation de la finalisation de la vente et de l'interopérabilité qui va être mise en place", poursuit-il.
En effet, le Financial Times écrivait le 8 juin, citant des personnes proches du dossier, que les États-Unis, le Japon et Taïwan devraient partager les données en temps réel grâce à ces drones de reconnaissance navale. Par ailleurs, le ministère taïwanais de la Défense refuse pour l’heure de le confirmer.

Le réseau de drones US dans la région

Le MQ-9B Sea Guardian est un système d'aéronef piloté à distance (RPAS) qui peut être configuré pour mener diverses missions de renseignement, de surveillance et de reconnaissance maritimes , y compris la guerre anti-surface, la guerre anti-sous-marins, les contre-mesures aéroportées contre les mines, les missions de reconnaissance stratégique à longue portée, etc.
"Leur portée est supérieure à 1.000 kilomètres. Ils peuvent donc assez bien s'interconnecter en fonction du nombre de personnes en vol en même temps", a noté l’ex-officier.
Il est conçu pour voler pendant plus de 30 heures, permettant ainsi aux forces interarmées d'informer en temps réel n'importe où dans le domaine maritime - de jour comme de nuit.
En plus de cela, ces appareils opéreraient aux côtés de la flotte japonaise d'avions anti-sous-marins et de surveillance maritime Lockheed P-3C Orion qui auraient été utilisés pour des missions de surveillance dans la mer de Chine méridionale, contestée depuis au moins 2015, suggère le journal The Diplomate.
De ce fait, il semble que les États-Unis construisent une sorte de réseau de drones dans la région, selon M.Rasmussen. Il a évoqué le fait que fin avril, Washington a déployé pour la première fois des drones meurtriers aux Philippines pour des exercices conjoints. Une paire de MQ-9 Reapers a participé à des missions de renseignement, de reconnaissance et de surveillance lors des manœuvres annuelles Balikatan.
"Alors maintenant, pensez à toute la géographie du Japon, de la Corée [du Sud], en passant par Taïwan, jusqu'aux Philippines", a indiqué le vétéran de l'armée américaine.
"Fondamentalement, ils essaient de mettre en place une présence ou une capacité de surveillance. Et nous naviguons déjà avec nos flottes, de manière assez discutable, grâce à la liberté de mouvement maritime. Il est par ailleurs à rappeler que [les États-Unis ne font] pas partie de l'accord de l'Onu, mais [ils] utilisent cela pour justifier l'envoi de navires [américains] vers la mer de Chine méridionale. Et maintenant, nous avons la mer de Chine orientale qui, j'en suis sûr, sera impliquée".

Dissuasion de la Chine

Selon Rasmussen, le renforcement militaire en cours des États-Unis dans la région Asie-Pacifique constitue une provocation claire contre la Chine, d'autant plus que Pékin considère Taïwan comme une partie inaliénable de la République populaire. Pendant ce temps, le projet de l'Otan d'établir un bureau de liaison au Japon est susceptible d'ajouter de l'huile sur le feu.
Il faut garder à l'esprit que la Chine n'a jamais menacé d'envahir Taïwan, ni le Japon, ni aucun autre pays de la région, a souligné l'expert militaire, mentionnant que le renforcement américain dans la région n'a rien à voir avec la "défense".
Ces démarches semblent s'inscrire dans un plan global de dissuasion renforcée contre la Chine exprimé par l'amiral John C. Aquilino, commandant pour l’Indo-pacifique, en avril 2023.
Celui-ci a noté que ce département militaire prévoyait d'intensifier l'interopérabilité avec la force AUKUS, le partenariat diplomatique Quad et l'organisation de renseignement anglophone Five Eyes pour renforcer leurs positions en Asie-Pacifique.
Dans ce grand dessein, les États-Unis "créent fondamentalement une situation similaire à ce qui a été fait en Ukraine envers la Russie", a fait remarquer le lieutenant-colonel à la retraite.
"Les États-Unis utilisent cela pour provoquer la Chine dans une situation très, très dangereuse".
Toute cette politique exercée par Washington et ses alliés facilitera évidemment un rapprochement plus poussé entre la Chine et la Russie, selon Rasmussen.
"Je pense que cela pousse les Chinois plus loin vers les Russes, renforce les liens russes et chinois parce qu'ils voient la même chose leur arriver que ce qui est arrivé à la Russie par le biais de la partie ukrainienne", a-t-il avancé.
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