Comment les grands chocolatiers se sucrent sur le dos du Ghana

Les géants occidentaux de l’agro-alimentaire font des bénéfices énormes au Ghana, alors que le sort des agriculteurs locaux ne s’améliore guère, selon une récente étude d’Oxfam International.
Sputnik
Un chocolat au goût amer. Les agriculteurs ghanéens voient leur revenus chuter alors que les principaux groupes chocolatiers engrangent au contraire des bénéfices pharamineux, révèle un récent rapport d’Oxfam International.
Les fortunes combinées des familles Mars et Ferrero, qui possèdent les deux plus grandes sociétés privées de chocolat, ont en effet augmenté de 39 milliards de dollars depuis 2020. Même refrain pour les géants Nestlé et Lindt qui ont réalisé des milliards de bénéfices ces trois dernières années, grâce à leur seule division confiserie.
En parallèle, les producteurs locaux de cacao ont vu leur revenu chuter de 16% au Ghana depuis 2020. La rémunération des femmes fait même pire, reculant de 22%, selon une enquête de l’Oxfam. Conséquence: 90% de ces producteurs ne gagnent pas de revenu vital, c’est-à-dire le salaire minimum pour couvrir les besoins élémentaires comme la nourriture, le logement et les vêtements.
"Il y a beaucoup d'argent dans le chocolat, mais certainement pas pour les agriculteurs. Les producteurs de cacao travaillent extrêmement dur, dans des conditions exténuantes, mais ne peuvent pas toujours nourrir leur famille", a ainsi souligné Amitabh Behar, directeur exécutif par intérim d'Oxfam dans un communiqué.

Fausses promesses du chocolat durable

Oxfam note encore l’écart qui existe entre les promesses des grands groupes industriels pour promouvoir un "développement durable" et les réalités ghanéennes. Les dix principaux fabricants de chocolat opérant au Ghana se sont ainsi tous engagés à aider les agriculteurs locaux, mais aucun de leurs programmes n’a atteint son objectif d’augmenter la production et par conséquent les revenus.
"Les géants du chocolat doivent se débarrasser de leur héritage colonial d'extraction de matières premières et de maintien des agriculteurs dans la pauvreté tout en faisant des profits astronomiques pour leurs riches actionnaires. Sans une tarification équitable et des revenus décents, il n'y aura jamais de chocolat +durable+", résume ainsi Amitabh Behar.
Aucune des primes versées en plus du prix de vente aux agriculteurs n’a augmenté significativement leurs revenus, note encore la confédération qui regroupe une vingtaine d’ONG.
En novembre, la Côte d'Ivoire et le Ghana avaient adressé un ultimatum aux multinationales du cacao, leur demandant de prendre en charge la totalité du "différentiel de revenu décent" (DRD), un supplément de 400 dollars par tonne par rapport au prix du marché, pour améliorer la rémunération des producteurs.
Si les deux pays avaient par la suite salué les efforts des groupes industriels, certains observateurs redoutent désormais que les pays européens ne jouent sur les standards écologiques pour réduire les producteurs locaux au silence. Bruxelles entend notamment interdire les importations de certains produits contribuant à la déforestation, un problème récurrent rencontré par l’industrie du cacao.
Discuter